Sous la couronne d'Etat impériale, sertie de la bagatelle de 2868 diamants, 273 perles, 17 saphirs, 11 émeraudes et 5 rubis pour un poids avoisinant le kilo, une habituée du protocole : à 87 ans, la reine Elizabeth II présidait hier mercredi 8 mai 2013 la 60e ouverture cérémonielle du Parlement, au palais de Westminster.
Un rituel très codifié et immuable auquel la souveraine britannique est rompue, fidèlement secondée par son roc le prince Philip. Mais cette année, le duc d'Edimbourg n'était pas le seul renfort, et c'est un événement : le prince Charles, héritier du trône depuis toujours, était convié à prendre part au protocole pour la première fois en 17 ans, en compagnie de son épouse Camilla Parker Bowles, ancienne pestiférée du royaume devenue une personnalité respectée et une servitrice dévouée de la couronne particulièrement appréciée de la monarque.
En uniforme d'apparat de la Marine royale, encore plus bardé de décorations que lors de son déplacement à Amsterdam pour l'intronisation du roi Willem-Alexander des Pays-Bas, le prince de Galles prenait très au sérieux la chose, lui qui se montrait d'humeur très joviale la veille au soir lors d'une réception donnée avec Camilla au palais St James en l'honneur de la communauté caribéo-britannique. Il faut dire que sa présence lors de ce protocole, qui voit chaque année la reine prononcer un discours attendu déterminant les principales orientations de la politique gouvernementale, était tout sauf anecodtique aux yeux des observateurs : alors qu'Elizabeth II a célébré en 2012 le jubilé de diamant de ses 60 ans de règne, que le Royaume-Uni célèbre en 2013 le soixantenaire de son couronnement, qu'il a été signalé après son déplacement en Australie et Nouvelle-Zélande fin 2011 qu'elle ne ferait vraisemblablement plus de longs et lointains voyages internationaux (ce sont les membres de la famille royale qui se sont chargés de la représenter aux quatre coins du monde en 2012 pour le jubilé), et que son époux a fait plusieurs passages à l'hôpital ces deux dernières années, l'irruption du prince Charles et de sa compagne Camilla au premier plan passe pour le signe fort d'un début de transition... Charles, qui s'est préparé toute sa vie pour monter sur le trône, devrait vraisemblablement être amené à assumer encore plus d'engagements officiels avec son épouse à l'avenir, pour décharger progressivement la reine, bien que les services du palais s'en défendent. D'ailleurs, c'est lui qui se rendra, de manière inédite, au prochain sommet du Commonwealth, en novembre à Colombo, en représentation de sa mère, a-t-il été annoncé cette semaine. Et même s'il n'est pas de tradition d'abdiquer au sein de la monarchie britannique, la certitude qu'Elizabeth II sera reine jusqu'à sa mort n'empêche pas les médias d'outre-Manche de penser qu'il faut par précaution préparer le terrain si une éventuelle régence devait s'imposer.
En silence, Charles et Camilla ont donc fait grand bruit à la Chambre des Lords, mercredi. Mais c'est bien à la monarque qu'est revenue la prérogative exclusive de faire entendre sa voix et de prononcer son incontournable Discours de la reine. Mais là aussi, le spectre du temps qui passe et pèse a plané, lorsque Sa Majesté a égratigné une demi-douzaine de mots durant son allocution de 7mn30 devant la classe politique, où elle a abordé 20 projets de lois qui doivent être votés dans les prochains mois et évoqué des thèmes aussi divers que la réforme de l'assurance maladie, la répression de l'immigration clandestine, ligne de train à grande vitesse entre Londres et le centre et le nord du pays, sécurité des transactions sur Internet, taxes, ou encore... loyers des maisons de retraite.
Malgré ces quelques "trébuchements" verbaux, la reine Elizabeth II était une fois de plus bon pied, bon oeil pour ce grand rendez-vous de la vie officielle. La monarque a fait son arrivée, dans la plus pure tradition, dans un carrosse doré, portant alors en plus de bijoux ayant appartenu à la reine Victoria le diadème d'Etat George IV, avant de le troquer contre la couronne d'Etat impériale réalisée pour le couronnement de son père George VI en 1937, et qu'elle ne porte qu'en cette occasion particulière. Elle portait, par dessus la robe de sa styliste attitrée Angela Kelly réalisée pour les portraits de son jubilé de diamant, la robe d'Etat, créée en 1952 pour son intronisation, dotée d'une traîne de plus de 5 mètres et lourde près de 7 kilos, d'où l'assistance de porteurs de robe.
La reine Elizabeth II n'a manqué l'ouverture du Parlement qu'à trois reprises : en 1959 et 1963 pour cause de grossesse (les princes Andrew, duc d'York, et Edward, comte de Wessex), et en 2011, pour cause d'annulation par le gouvernement.
Quelques heures après la pompe de ces cérémonies matinales, c'est sur les pelouses de Windsor qu'on pouvait retrouver la reine, lookée provinciale et un foulard Hermès sur la tête, pour le Windsor Horse Show. Un autre rendez-vous qu'elle ne veut manquer sous aucun prétexte.
G.J.