Elle a appris à être sans lui. Elle a écrit ses chansons sans lui. Elle sortira lundi son premier album sans lui. Elle vient de faire ses premiers concerts sans lui. Privée de Fred Chichin, l'autre moitié du groupe Rita Mitsouko désormais enseveli, après 28 ans de fusion affective et artistique, Catherine Ringer fait son retour dans la lumière, dans la vie. Pas toute seule, à vrai dire : il y a leur fils, Raoul, guitar hero qui l'accompagne sur scène. Et puis : "Fred, c'est mon héritage", résume-t-elle dans les colonnes du Parisien...
Parler de son album solo, Ring n'Roll, c'est parler de Fred, mort fin 2007 des suites d'un cancer foudroyant. "Mais ce n'est pas une thérapie. On ne vend pas sa thérapie, on la fait en privé", précise-t-elle à Emmanuel Marolle, du Parisien, qui, après s'être infiltré sur ses premiers concerts parisiens, l'a rencontrée en marge du Printemps de Bourges. "Rencontre avec une quinqua heureuse d'être en vie", annonce le journaliste ; c'est ce qu'on vérifie lorsque la grande Catherine offre ce saisissant synopsis de son existence : "J'entre dans mon troisième âge. J'ai commencé par être mannequin quand j'étais enfant, j'ai fait des petits films. Puis j'ai rencontré Fred, à 21 ans. On a passé vingt-huit ans ensemble. J'ai eu la chance de cultiver ce don pour la musique avec un merveilleux partenaire. Désormais, je suis senior et fière de l'être. Si on est vieux, c'est que l'on est pas mort avant. Quand on perd un proche, on est abattu par la perte mais on sent comme la vie est précieuse."
"Quatre semaines en internement psychiatrique, quatre mois d'arrêt..."
A l'entendre, aussi bien dans l'interview que dans l'album plein de punch (où seul le titre Mahler sonne comme un adieu déchirant), on jurerait qu'elle a tenu bon dans cette épreuve. Mais elle révèle que non : "L'année dernière, en allant travailler sur le disque aux Etats-Unis. J'ai eu un souci de billet d'avion à l'aéroport et j'ai pété les plombs. J'étais à cran. Il y avait eu la mort de Fred, la reprise de la tournée, la préparation de l'album. Je n'étais pas angoissée mais surexcitée plutôt. J'ai passé quatre semaines en internement psychiatrique avant quatre mois d'arrêt."
L'impulsion de cet album a été provoquée par Mark Plati, qui avait accompagné les Rita dans leur dernier album : "Viens, on essaie, on verra bien." Et ça a marché. Catherine Ringer explique : "Même s'il faut accepté d'être visité par la muse de la création, dans le malheur comme dans la joie. Je savais que je voulais continuer mon métier, mais je ne savais pas comment." Et Fred Chichin l'a aidée : "Fred, c'est mon héritage. Je me disais 'Comment aurait-il fait ça ?' C'était très émouvant de commencer seule..." Dans France-Soir, mystique, elle complète : "Je le sens, je peux parler avec lui, même si je ne sais pas si c'est vrai ou pas. Mais moi, je m'en fiche, je ne me pose pas la question. Intérieurement, il est toujours là, mais plus physiquement. C'est encore très difficile à avaler."
Physiquement, c'est Raoul, leur fils, qui est là : "Ce n'est pas toujours facile de travailler en famille. Mais c'est un guitariste flamboyant", dit Catringer dans Le Parisien. Et ajoute dans France-Soir : "Son père serait fier de lui."