Daniel Auteuil est un acteur qui semble transformer ce qu'il touche en or. Il casse la baraque dans la plupart des films qu'il choisit de tourner. A 61 ans, l'acteur s'est donc mué en réalisateur. Il signe avec La fille du puisatier, sorti mercredi 20 avril dans les salles, avec Sabine Azéma, Kad Merad et Jean-Pierre Darroussin, un film simple et touchant issu de l'univers de Marcel Pagnol. Un univers qu'il connaît bien, puisque Daniel Auteuil a brillé au milieu des années 80 dans Jean de Florette et Manon des Sources de Claude Berri. Deux oeuvres déjà tirées du monde de Pagnol. Nous avons donc trouvé juste à Purepeople.com de vous proposer une rétrospective en 12 films des moments les plus marquants de la carrière de ce grand comédien qu'est Daniel Auteuil.
Les Sous-doués (1980) de Claude Zidi
C'est dans une comédie que Daniel Auteuil se révèle au septième art. Dans ce film, il incarne Bébel, un élève pathétique qui passe le bac pour la quatrième fois, juste parce qu'il veut continuer à s'amuser et craint la vie d'adulte. La scène ridiculo-futuriste dans laquelle il est assis dans un fauteuil qui le torture à chaque mauvaise réponse est et reste une référence d'humour absurde ! Un Daniel Auteuil décalé toujours plaisant à retrouver !
Jean de Florette et Manon des Sources (1986) de Claude Berri
Dans ces films réalistes tirés de l'oeuvre de Pagnol et qui se déroulent dans les années 1920 dans le Sud de la France, Daniel Auteuil est Ugolin Soubeyran, surnommé Galinette. Idéaliste, son rêve est de gagner de l'argent en cultivant... des oeillets ! Mais il lui manque l'eau de la source qui appartient aux voisins, les Romarins. Dans ce film culte, un Daniel Auteuil en grande forme donne la réplique à Gérard Depardieu (Jean de Florette) et Yves Montand (César Soubeyran). La suite, Manon des sources, lui offre comme partenaire de jeu la jolie Emmanuelle Béart, qui deviendra sa femme pendant 11 ans. Il obtient de plus, excusez du peu, le César du meilleur acteur pour le diptyque de Claude Berri.
Un coeur en hiver (1992) de Claude Sautet
Dans ce film, avant-dernier long métrage de Claude Sautet, Daniel Auteuil donne vie à Stéphane, un luthier que rien ne semble faire vibrer. Rien, excepté Emmanuelle Béart, avec qui il commence un jeu de séduction très implicite. Accompagnés par la musique de Maurice Ravel durant le film, les deux comédiens jouent une partition parfaite et Auteuil, tout en retenue, est une nouvelle révélation. Quatre ans auparavant, dans Quelques jours avec moi, Claude Sautet avait déjà su déceler le potentiel tragique de l'acteur au regard troublant en le faisant jouer un bourgeois mal dans sa peau.
Ma saison préférée (1993) d'André Téchiné
Véritable film familial, le long métrage d'André Téchiné permet à Daniel Auteuil de continuer un processus entamé avec Claude Sautet et qui deviendra au fil du temps une véritable composante de son jeu d'acteur : l'intériorisation. Le comédien sait jouer dans la retenue, presque sur la pointe des pieds, même quand son personnage se bat avec ses sentiments, un amour interdit pour sa soeur en l'occurrence. Ce film nous offre en outre un duo légendaire entre un talent qui se bonifie et la grande Catherine Deneuve.
Le Huitième jour (1996) de Jaco Van Dormael
Un film troublant. Face à la révélation Pascal Duquenne, acteur belge atteint du syndrome de Down (trisomie 21), Daniel Auteuil livre une prestation convaincante et permet au réalisateur d'atteindre son objectif : sensibiliser le public à une maladie trop souvent stigmatisée. L'amitié inébranlable que partagent deux hommes que tout semble opposer au départ permet au film de développer une puissance humaniste à laquelle Daniel Auteuil, toujours juste dans l'expression de ses sentiments, n'est pas étranger. A découvrir pour les retardataires !
Le Bossu (1997) de Philippe de Broca
Un film de cape et d'épée, avec petite moustache en prime, pour Daniel Auteuil ! "Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère viendra à toi" répète ostensiblement le comédien à qui s'oppose à lui, en l'occurrence Fabrice Luchini (Le comte de Gonzague). Dans ce rôle qui semble être fait pour lui, Auteuil brille, tant dans ses discours grandiloquents que dans des scènes d'actions plutôt réussies.
La fille sur le pont (1999) de Patrice Leconte
Dans ce film magistral qui s'interroge sur la chance, Daniel Auteuil incarne Gabor, un lanceur de couteaux. Musique enjôleuse, splendeur des images en noir et blanc, Daniel Auteuil brille dans sa romance intemporelle avec la sublime et délicate Vanessa Paradis. Il la sauve de la mort, ils s'aiment, se lassent, se quittent. Mais lui était moins d'accord qu'elle pour la laisser s'échapper. Au moment qu'il choisit pour abandonner la partie et en finir, elle surgit à son tour et le sauve. Mythique, ce rôle prenant offre à Daniel Auteuil son second César.
Le Placard (1999) de Francis Weber
Dans Le Placard, Daniel Auteuil est une nouvelle fois au bord du suicide ! L'approche du nouveau millénaire ne semblait pas mettre en joie les scénaristes français. Finalement, ce modeste comptable dans une boîte de préservatifs (excusez le jeu de mots) accepte l'idée d'un collègue et se fait passer pour gay ! Drôle, convaincant (5 millions d'entrées en France), le film est porté par un Daniel Auteuil en pleine forme. Le "problème Pignon" est une vraie tranche de rigolade remplie d'acteurs talentueux (Depardieu, Lhermitte, Rochefort, Michèle Larroque...)
L'Adversaire (2002) de Nicole Garcia
Retour au drame pour Daniel Auteuil avec ce film inspiré d'une sinistre histoire vraie. En effet, dans ce film, l'adversaire, c'est Daniel Auteuil. Il obtiendra une nomination aux César pour ce rôle. Pourtant, rien ne laisse présager ce brusque changement de personnalité chez cet homme qui est doux avec sa femme et ses enfants, mais aussi avec son amante, et aimé de ses parents et de ses beaux-parents. Sympathique, il devient inquiétant au fil des prises, mettant mal à l'aise les spectateurs. Une réussite de thriller français signée Nicole Garcia.
36 quai des Orfèvres (2004) d'Olivier Marchal
Le flic trahi par sa hiérarchie et victime d'une énorme machination que campe Daniel Auteuil dans ce polar est bluffant de justesse. Associé une nouvelle fois à Gérard Depardieu, un duo décidément gagnant, Auteuil est déconcertant de maîtrise et de réalisme. On serait tentés de croire que Léo Vrinks travaille tous les jours dans ces bâtiments de police du 1er arrondissement. Daniel Auteuil obtient une nouvelle nomination aux César pour sa prestation.
Caché (2005) de Michael Haneke
Une pièce de choix pour finir. Dans Caché, Daniel Auteuil fait face à la rayonnante Juliette Binoche, qui incarne sa femme. Le couple est observé, on le traque. Lancé à la recherche de la vérité, Daniel Auteuil est saisissant. Le film, qui réussit le grand écart entre une intrigue faisant réfléchir sur la culpabilité de la France par rapport à ses colonies et un style qui offre aux yeux la joie de mystères façon David Lynch, est une splendeur sacrée Palme d'or au Festival de Cannes. Et une fois encore, Daniel Auteuil y était !
Que dire après cela ? Bien entendu, cette liste n'est qu'une sélection, un florilège de quelques-uns de ses plus grands succès. Un hommage à un grand acteur qui, même s'il est toujours présent devant la caméra dans son dernier film, a aussi osé passer derrière. Un risque qui lui fait peur. Après La Fille du Puisatier, Daniel Auteuil a signé pour réaliser, l'année prochaine, le triptyque Marius, Fanny, César. Mais prudent, il précise dans un entretien au magazine L'Express : "Si personne ne va voir La Fille du puisatier, je ne tournerai pas cette trilogie." Les premiers scores au box-office sont enthousiasmants pour le moment... Bientôt, Daniel Auteuil sera à nouveau acteur dans La Mer à boire de Jacques Maillot. Une nouvelle révélation ?
Clément Razgallah