Peut-il y avoir anniversaire heureux quand on a perdu sa réputation, ruiné son avenir, et, plus prosaïquement, qu'on risque la bagatelle de vingt-trois années de prison ? Mis en examen en mars 2012 pour le détournement présumé de près de 6 millions d'euros de fonds publics dans le cadre de l'affaire Noos, Iñaki Urdangarin pourrait sans doute répondre à la question... Mais l'époux de l'infante Cristina d'Espagne, qui a à son tour été inculpée - le 7 janvier 2014 - dans le même dossier, s'efforce de faire profil bas.
Et c'est logiquement dans la plus grande discrétion que le gendre du roi Juan Carlos Ier d'Espagne, lâché par la Maison royale dès la fin de l'année 2011 et passé du statut d'ancienne gloire nationale (champion de handball médaillé olympique) à paria honni, a célébré ses 46 ans, mercredi 15 janvier 2014.
Accompagné de sa mère Claire Françoise Liebaert Courtain, chez qui il était allé passer le Nouvel An à Vitoria, et de l'une de ses cinq soeurs, celui qui faisait autrefois figure de gendre idéal (outre son physique avenant et ses réalisations sportives, il avait le profil parfait pour insuffler un coup de jeune à la monarchie et fédérer diverses catégories dde la population) s'est rendu à Genève, où vit depuis septembre 2013 son épouse l'infante Cristina, avec leurs quatre enfants - Juan Valentin (14 ans), Pablo (13 ans), Miguel (11 ans) et Irene (8 ans). Lui continue de vivre à Barcelone, où le couple a été contraint de vendre l'an dernier sa villa très cossue de la banlieue chic de Pedralbes, dont la moitié du produit de la vente a été saisi en novembre, à l'instar de 16 biens immobiliers d'Iñaki, pour couvrir sa caution. D'où le déménagement de Cristina vers la Suisse, sous couvert d'enjeux professionnels et de désir de protéger les enfants...
De temps à autre, le mari de l'infante rejoint les siens en Suisse, où Cristina poursuit ses activités à la tête de la branche internationale de la Fondation La Caixa, et profitant d'un match de handball de leur fils aîné ou d'un entraînement de tennis d'un des cadets. Mais en dehors de quelques occasions, comme le 14e anniversaire de Juan Valentin le 28 septembre, une promenade ensemble au grand air helvétique le 30 novembre, ou le Noël de la famille royale au palais madrilène de la Zarzuela, les occasions de se retrouver en famille sont relativement rares, et le contexte difficile.
Outre un mariage - toujours solide en dépit des circonstances et du fait que l'infante et son époux font avocats à part - qui pourrait ne pas survivre à la chronique judiciaire et à l'opprobre, l'ancien héros du club de handball de Barcelone encourt vingt-trois ans de prison pour les agissements délictueux qu'on le soupçonne d'avoir commis alors qu'il présidait (de 2004 à 2006) l'Instituto Noos, organisme à but non lucratif en charge de l'organisation d'un congrès international à Majorque, dans les Baléares. Prévarication, malversation, faux en écriture, fraude, et deux cas de fraude fiscale, la liste des six chefs d'inculpation retenus par le procureur anticorruption Pedro Horrach et révélée en décembre par le quotidien El Mundo est accablante, assortie par surcroît d'une amende de 2,5 millions d'euros concernant Iñaki Urdangarin et son associé de l'époque, Diego Torres. Le journal de centre-droit a également avancé que la peine maximale pour les faits éventuellement reprochés à l'infante Cristina s'élèverait à 11 ans de réclusion... Présente à Barcelone au lendemain de sa mise en examen pour discuter avec ses avocats, dont le ténor du barreau Miquel Roca qui souhaitait déposer un recours, l'intéressée s'est mise à la disposition du juge d'instruction, auquel elle fera face le 8 février à Palma de Majorque dans une atmosphère immanquablement délétère.