Infatigable, l'excentrique et passionné Jean Rochefort sera dès le 12 août dans les salles obscures avec le film Floride. Il y incarne un homme sénile, atteint d'Alzheimer, mais joyeux et lubrique, face à celle qui joue sa fille aînée, Sandrine Kiberlain. Un rôle salué par la critique et, pour Rochefort, une réponse à ceux qui croient encore que l'octogénaire va raccrocher une bonne fois pour toute. C'est mal le connaître.
Il l'avoue, son rôle dans Floride l'a "foutu par terre". "Il y a des rôles qui vous bouffent", explique-t-il au Point, évoquant ses amis qui sont atteints de ce mal. "Nous vivons trop longtemps", estime l'intéressé. Ce dernier ne manque pourtant pas d'humour lorsqu'on lui demande pourquoi il a fait ce film. "Pour l'argent, bien sûr, et parce que je les sentais dans l'embarras", lâche-t-il à Paris Match.
La vieillesse, cette "saloperie", ne semble pas frapper l'esprit jeune de cet acteur toujours au top. Cela ne l'empêche pas de dire qu'il est pour le fait de pouvoir choisir la fin de sa vie. Marié depuis 30 ans à la même femme, Jean Rochefort est aussi de ceux qui préfèrent encore vivre dans leurs appartements plutôt que d'aller en maison de retraite. Et si un jour cela devait arriver, il préférerait encore s'en aller. "Vous me voyez, moi, me faire torcher les fesses ramollies à l'hôpital par des dames ? On n'a pas le droit de faire ça", confie-t-il au Point, entre cynisme et sérieux.
Le comédien, qui s'avoue "spleenesque" et "de plus en plus sceptique" sur lui-même malgré le temps qui passe, reste aussi une grande gueule. Avec sa gouaille et son côté pince-sans-rire, il se confie régulièrement sur son passé, la Libération de la France alors qu'il n'avait que 14 ans, ses rêves de jeunot, ses premières amours avec "une 'nymphomane d'extérieur'" qui deviendra son épouse et dont il divorcera ("ça ne compte pas", affirme-t-il), mais également les origines de sa moustache. "Je devais jouer Le Misanthrope mais mon postiche tombait. Alors je me suis laissé pousser une vraie moustache", raconte-t-il dans son entretien avec Le Point, ajoutant qu'elle a "complètement détruit la verticalité" de son visage et que sa carrière a dès lors pris un nouveau départ.
Comme père, je trouve que j'ai été très mauvais
Il raconte également celui qu'il a été en tant que père. Un certain flou a toujours été entretenu sur le nombre d'enfants et de compagnes que Jean Rochefort a eus, et c'est sans fard qu'il fait le point. "J'ai cinq enfants en tout, deux garçons [Julien et Pierre] et trois filles [Marie, Louise et Clémence]. Mais comme père, je trouve que j'ai été très mauvais", se flagelle-t-il, expliquant : "Quand je m'en occupais, je m'en occupais mal. Mes deux fils, qui ont des garçons, sont beaucoup plus compétents que moi. Je regrette de n'avoir pas été un bon père [...] J'ai été tellement occupé à nourrir tout ce monde-là que je n'ai pas su, pas pu prendre le temps qu'il fallait."
Des regrets aux fiertés, il n'y a qu'un pas, que Jean Rochefort franchit aisément. À l'écouter, ce n'est pas sa carrière flamboyante (plus d'une centaine de films à son actif) qui le rend fier, mais ses chevaux, son autre grande passion. Ces derniers lui auraient par exemple appris "à ne pas être cabot". "En vivant dans le crottin, je trouve que l'ego en prend un coup", explique l'acteur qui n'a jamais pris la grosse tête. "Mes copains du Conservatoire, Marielle, Belmondo, que j'ai tellement aimés et que j'aime toujours, n'ont jamais été comme ça", prend-t-il en exemple. La clé du succès, probablement.
Interviews à retrouver en intégralité dans Paris Match et Le Point, tous deux en kiosques le 6 août.