Joaquin Phoenix, son enfance : ''Ma soeur et mon frère faisaient la manche''

Une interview de Joaquin Phoenix peut vite tourner au grand n'importe quoi, comme lorsqu'il prétend vouloir arrêter sa carrière d'acteur ou dit qu'il s'est fiancé avec sa prof de yoga. Télérama le sait bien, et, lors de la préparation de l'interview, le cas de figure d'un entretien qui tourne à la farce était donc envisagé. Mais finalement, c'est un artiste qui se questionne sans cesse que l'on a le plaisir de lire. Avec beaucoup de sincérité, il parlera notamment de son enfance particulière.

Joaquin Phoenix est un enfant des "sixties" et de la contre-culture américaine : "Nous vivions de manière assez libre, nous avons longtemps habité sur la plage au Venezuela, nous jouions beaucoup de musique, ma soeur et mon frère aînés faisaient la manche pour nourrir la famille et je les accompagnais souvent. (...) On a beaucoup parlé de notre famille, dans les années 1980. Les journalistes américains étaient très curieux de notre mode de vie jugé 'étrange', parce qu'il y a eu, pendant les années Reagan, un sérieux retour de bâton, une forte critique des idéaux hippies. Mais quand mes parents étaient jeunes, dans les années 1960, leur choix de vie était assez ordinaire."

Les idéaux de ses parents l'ont marqué et lorsqu'il commence à faire de la publicité avec son frère River - devenu une star en 1986 et mort sous ses yeux en 1993 d'une overdose -, il n'accepte pas tout : "Nous refusions pas mal d'argent. Nous n'acceptions pas n'importe quel contrat. River le premier. Pas question de faire une publicité pour McDonald's ou pour toute marque qui allait contre nos convictions. Nous nous privions quand même de 70% des revenus possibles !"

Cependant, en 1997, il tourne une pub pour Prada : "Je venais de tourner Prête à tout pour Gus van Sant, où je jouais un adolescent sombre, au physique ingrat, et je voulais qu'on me regarde autrement. Mais j'ai refusé les offres qui m'ont été faites depuis. Il me semble difficile de renier les choix que nous avons faits alors que nous étions dans la dèche." Il assume quand même ses faiblesses et souligne ainsi son envie de tourner un film de super-héros, univers qui, enfant, le fascinait. Reste qu'il ne sait pas s'il pourra se plier aux "obligations promotionnelles qui vont avec ce genre de contrat". On comprend mieux pourquoi il n'aura pas peur de critiquer les Oscars, tout en s'excusant ensuite, comme s'il voulait partager par son envie d'honnêteté et accepter le fait de cohabiter avec Hollywood-tout-puissant.

Homme entier, c'est dans cet état d'esprit qu'il a entrepris de faire le faux documentaire I'm Still Here : "Je voulais surtout me critiquer moi-même, ainsi que les acteurs rebelles de ma génération - Johnny Depp, Leonardo DiCaprio, Ethan Hawke... - pris dans le grand cirque people." Mais de cette expérience, il gardera un souvenir mitigé : "J'étais fasciné par la crédulité des médias. (...) Mais j'étais inquiet des proportions que prenaient les commentaires sur cette imposture."

Heureusement que tout ceci n'était pas vrai. Joaquin Phoenix a enchaîné depuis de grandes performances : dans The Master avec feu Philip Seymour Hoffman, face à la voix de Scarlett Johansson dans Her et dans Inherent Vice, au cinéma le 4 mars.

Retrouvez l'intégralité de l'interview dans le magazine Télérama du 14 février