Les dommages de l'affaire Bettencourt, à l'image d'un dossier qui a depuis longtemps quitté le domaine de la querelle utérine pour le terrain politique, ne connaissent pas de limites : des répercussions familiales, sur l'imbroglio insoluble entre Liliane Bettencourt et sa fille Françoise, certaine que sa mère a été abusée en raison de sa fragilité psychologique ; politiques et financières, avec l'implication, notamment, du ministre Eric Woerth ; et voici venir les conséquences commerciales/institutionnelles...
Alors que l'affaire est revenue sur le versant médiatique en raison du dévoilement, toujours par le site Mediapart à l'origine de la divulgation des enregistrements secrets de l'ex-majordome de la milliardaire, des déclarations dudit majordome aux enquêteurs lors de son audition cet été, elle rejaillit également au travers du dernier baromètre Ipsos-Posternak sur l'image des entreprises, publié par le JDD. Où il apparaît que le groupe L'Oréal, dont Liliane Bettencourt, 87 ans, a hérité en 1957 de son père et dont elle est la principale actionnaire, toujours active au sein du conseil d'administration, accuse le coup.
Considérant les bonds en avant des marques liées au pouvoir d'achat (Leclerc, +12 points, domine les débats ; Auchan, +15, pointe à la 5e place), le JDD, s'appuyant sur ce baromètre, constate la déflagration de la notoriété des entreprises "dont l'image véhicule des valeurs de violence sociale (France Télécom), d'hyperpuissance économique (Total) ou d'argent fou (L'Oréal)". Concernant le cas particulier du géant des cosmétiques, le JDD pointe "une vraie descente aux enfers" par la faute d'un "actionnaire majoritaire irresponsable" : de la 6e place, au mois de mars, à la 22e aujourd'hui. Claude Pasternak, président de Pasternak consulting et publicité, décrypte : "L'affaire Bettencourt impacte naturellement sur la perception du groupe. Les largesses de l'héritière touchent au coeur d'un grand tabou français."
Observant les dégâts, Jean-Paul Agon, directeur général du groupe, s'émeut : "Je ne suis pas surpris (...) J'en suis très triste car il s'agit d'une affaire privée. C'est très injuste pour l'entreprise et ses salariés." Plus loin, après avoir fait valoir que le résultat commercial de l'entreprise, lui, n'en souffre pas ("le chiffre d'affaires continue de croître"), il martèle qu'il n'y a "pas de malaise" et insiste : "il y a une confusion regrettable entre une affaire privée, qui concerne son principal actionnaire, et le nom de l'entreprise".