Il y a le decorum, et l'envers du décor. Derrière le lustre de l'un, la misère de l'autre. Si Laurent Fignon, qui a succombé le 31 août 2010 au cancer contre lequel il se battait ouvertement avec bravoure, a été honoré lors de la dernière étape du Tour de France 2011, avec le dévoilement à Créteil d'une sculpture hommage érigée à l'initiative du quotidien L'Equipe, quelques jours après, le 11 août précisément, c'est une improbable braderie qui a eu lieu. Officiellement, une "vente aux enchères publiques", mais en réalité, une braderie accompagnant la liquidation judiciaire du Centre Laurent-Fignon à Gerde, au sud de Bagnères-de-Bigorre, et orchestrée sur les lieux mêmes. A quelques jours du premier anniversaire de la dmort du très regretté Laurent Fignon, le magazine France Dimanche revient sur cet affligeant spectacle.
L'inventaire de la vente répertoriait certes un sacré bric-à-brac, comprenant matériels cyclistes (des textiles et accessoires brandés "Centre Laurent Fignon", des éléments mécaniques et de l'outillage de toutes marques, des objets publicitaires...), souvenirs (dont une grande photographie de Laurent Fignon en maillot jaune sur panneau (telle que celle présentée lors de ses obsèques au Père-Lachaise, probablement), meubles et matériels de bureautique et de magasin (des ordinateurs et imprimantes aux cabines d'essayage), des groupes électrogènes et des nettoyeurs haute pression, des quads et une buggy, ou encore le 4x4 Hyundai Santa Fe du défunt, 126 000 kilomètres au compteur. Tout ce qu'il reste. Livré au plus offrant pour éponger les dettes de la société qui représentait tant pour le champion cycliste, placée en redressement judiciaire en avril, puis en liquidation judiciaire cet été.
Pour Valérie, veuve de Laurent Fignon, qui vécut dix ans d'amour avec lui dont presque autant de ménage à trois avec le cancer, la situation est d'autant plus intolérable que, en plus de voir partir aux quatre vents pour trois francs six sous le rêve de son défunt mari et des objets auquel il tenait, elle doit se résigner à abandonner le Centre Laurent-Fignon... où avait été célébré leur mariage en 2008. Terrible.
En rachetant le centre Citécycle de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées), Laurent Fignon, le rebaptisant à son nom, avait un grand projet : rassembler la planète vélo en ces lieux, la faire vibrer, accueillir des stages... "Son centre cycliste, le centre Laurent-Fignon, créé avec son associé Jérôme Prat, c'était son bébé. Il y a consacré toute son énergie", signalait Valérie dans La Dépêche du Midi en 2010, après sa mort, note France Dimanche. Un an plus tard, il n'était qu'une poignée de régionaux, de curieux et quelques passionnés, à venir se partager pour pas grand-chose une partie de la mémoire du champion, vendue à prix cassés : 30 euros pour la photo sur panneau (150x205 cm) de Laurent Fignon, 750 euros pour un quad ou quelques milliers d'euros pour le 4x4 qui en valait le double à l'argus. Heureusement qu'on se souvient de la valeur de l'homme...