Tandis que le roi Juan Carlos Ier s'efforce d'oublier le scandale de sa chasse au Botswana qui lui a valu une opération de la hanche et l'a contraint à formuler des excuses publiques inédites (majoritairement acceptées par les sujets du royaume d'Espagne, selon les médias de la péninsule), et qu'il se change les idées en recevant avec la reine Sofia le roi Carl XVI Gustaf et la reine Silvia de Suède (un voyage privé, non pas officiel, des royaux suédois à l'occasion du 63e Congrès de la Fondation mondiale de scoutisme), le prince Felipe et son épouse Letizia tiennent la baraque.
Infaillibles et systématiquement salués pour leur élégance, le prince et la princesse des Asturies accomplissaient ce lundi 23 avril 2012 la deuxième et dernière partie des cérémonies entourant la remise du Prix Cervantes 2011, plus haute distinction littéraire du monde hispanophone attribuée cette année au poète - ou plutôt "l'anti-poète" - chilien Nicanor Parra, âgé de 97 ans, comme notifié en décembre dernier. La première partie, c'était le déjeuner traditionnellement donné en l'honneur du lauréat et des belles lettres, en amont de la cérémonie de remise du prix. Le prince Felipe avait alors prié l'assistance d'excuser l'absence du couple royal, habituel hôte de ce rendez-vous, que Letizia et lui remplaçaient au pied levé, en raison de "circonstances particulières et exceptionnelles que tout le monde connaît". Le couple avait notamment pu échanger à cette occasion avec la fille et le petit-fils de l'auteur sud-américain, Colombina Parra et Cristobal Ugarte Parra.
On les retrouvait ce lundi à l'auditorium de l'Université d'Alcala de Henares, ville du centre du pays (Communauté de Madrid), pour remettre le Prix Cervantes décerné par le Ministère de la Culture entre les mains de Nicanor Parra, en présence du Premier ministre espagnol Mariano Rajoy, accompagné de sa femme Sonsoles Espinosa et du ministre de la Culture José Ignacio Wert, qu'ils croisent régulièrement en mission officielle. Au côté de Felipe, la princesse Letizia, qui aura 40 ans en septembre, serait presque passée pour une étudiante de la fac, fraîche et superbe dans une robe à motif noir sagement doté d'un col polo et de manches longues.
Le Prix Miguel de Cervantes, assorti d'une dotation de 125 000 euros, vient consacrer des auteurs ayant contribué de manière remarquable au patrimoine littéraire hispanophone. A 97 ans, Nicanor Parra, plusieurs fois nommé pour le Prix Nobel de littérature, rejoint notamment au palmarès Gerardo Diego et Jorge Luis Borges, Octavio Paz, Ernesto Sabato, Carlos Fuentes, Maria Zambrano, Francisco Ayala García-Duarte, Mario Vargas Llosa, José Garcia Nieto, José Jiménez Lozano, ou encore José Emilio Pacheco. C'est son petit-fils Cristobal Ugarte Parra qui a reçu en son nom le Prix Cervantes des mains du prince Felipe. Très loquace, dans son discours sur l'oeuvre de Nicanor Parra auquel il n'a pas manqué d'inclure quelques citations de bon aloi, l'héritier du trône d'Espagne a rappelé que le poète chilien s'était déjà vu remettre, il y a onze ans, le Prix ibéro-américain de poésie Reine Sofia.