Quelques heures après que le JDD a éventé la belle opération financière que sa fille Françoise a pu réaliser grâce à leur rapprochement, Liliane Bettencourt ressurgit ce mercredi dans Le Figaro, à l'occasion d'une interview exclusive aux allures d'état des lieux.
"Il fallait batailler, mais je suis heureuse de vivre en paix" : tout - ou presque - est dans le titre. Tranquille et de nouveau abritée du feu des médias depuis sa réconciliation officielle avec sa fille en décembre dernier, au terme de plusieurs années d'une virulente brouille cristallisée autour de son ami le photographe François-Marie Banier (contre qui les poursuites pour "abus de faiblesse" ont été abandonnées par le tribunal de Bordeaux) et qui a éclaboussé les hautes sphères politico-financières, la deuxième femme la plus riche de la planète reçoit dans les jardins de... l'hôpital américain de Neuilly-sur-Seine.
"Je suis en forme certains jours et un peu moins d'autres, comme tout le monde. Evidemment, je vous reçois à l'hôpital, où je dois passer quelques jours après une petite chute [sur une hanche, déjà opérée, précise Le Figaro], je vous avoue que je serai en meilleure forme d'ici quelques jours", explique-t-elle. La vie normale d'une vieille dame très consciente. "Je ne suis plus une jeune fille qui peut trottiner sur des béquilles."
"Je vais me remettre vite. J'ai hâte de rentrer chez moi, mes chiens et ma maison me manquent. Ce que je regrette également, c'est que cette petite chute m'empêche de me rendre à l'assemblée générale de L'Oréal. J'ai beaucoup hésité. Vous imaginez que ce sera l'une de mes rares défections depuis la cotation du groupe ?", cogite la fille et héritière d'Eugene Schueller, fondateur du groupe.
Réitérant son bonheur que sa fille et elle se soient "retrouvées", et se félicitant a contrario de n'avoir jamais perdu ses petits-enfants, "deux beaux et bons garçons [qu'elle] voi[t] grandir avec beaucoup de plaisir", la milliardaire de 88 ans survole tout les thèmes, insoucieuse : "aucun emprunt n'a été fait par Téthys dans le cadre de la gestion de Téthys ou pour verser de l'argent en Françoise", se contente-t-elle de préciser au sujet de la réduction de capital de 300 millions opérée par sa fille et son mari via la société gérant sa fortune.
La réorganisation du présent
Désireuse de voir son mandat d'administrateur de L'Oréal renouvelé, la véritable information de cet entretien concerna la réorganisation de son entourage et de ses avoirs. A la question de savoir si elle a remis de l'ordre, après l'éviction de son ancien homme de confiance Patrice de Maistre, la réponse est laconique : "oui." Au coeur de ce nouveau dispositif, Me Pascal Wilhelm, un avocat de 48 ans investi du mandat de protection des biens de mme Bettencourt, qu'il représente pour tous les actes concernant son patrimoine, qu'il conseille en tout, et qui "est en contact régulier avec l'administration fiscale et règle ce qui doit être réglé".
On sent que la milliardaire se repose pleinement sur son nouvel homme de confiance, que Le Figaro décrit comme "ennemi du flou artistique". Et sa prise de fonctions a déjà été suivie d'effets, comme le remarque le quotidien quant au volet "évasion fiscale" du dossier Bettencourt médiatisé en 2010 : "Tous les avoirs qui s'étaient égarés à l'étranger ont été rapatriés en attendant que Bercy envoie la facture fin juillet. Elle sera évidemment immédiatement payée. Quant à l'île d'Arros, elle est bien redevenue la propriété de Liliane Bettencourt, qui a également récupéré les 20 millions d'euros abrités avec l'île dans une fondation qui a été dissoute." Liliane Bettencourt envisage d'ailleurs de s'en séparer, n'ayant pu s'y rendre depuis un an en raison de la difficulté d'accès du lieu : "Cela ne me fera pas tourner de l'oeil si je dois m'en séparer", lâche-t-elle sans ambages.
Par la suite, une structuration musclée mise en place par Me Wilhelm interviendra : "Les nouveaux gestionnaires de fortune désignés par un appel d'offres proposeront leurs investissements à un comité de trois financiers et parallèlement au cabinet expert Ricol et Lasteyrie."
L'avenir en préparation
Liliane Bettencourt profite de cette caution pour se projeter dans l'avenir sur d'autres tableaux. Deux en particulier.
Le premier, celui de la Fondation L'Oréal Schueller à laquelle elle est très attachée et dotée de 800 millions d'euros destinés à la recherche : "C'est une institution que j'ai aimée, que j'aime toujours et qui est importante pour la France (...) J'ai investi massivement dans la recherche médicale et dans la lutte contre le sida. La fondation va avoir un nouveau patron, une personnalité dont le nom sera bientôt annoncé."
Le second : quoi faire de ses collections artistiques ? "Je suis en train de préparer un livre sur la collection commencée par mon père et je souhaite également que ma collection soit visible par tous, donc je réfléchis à différents projets." En l'occurrence, donation à un musée ou création d'une fondation ad hoc, décrypte Le Figaro.