Maïwenn lors du photocall du festival de Cannes en mai 2011© BestImage
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Pour défendre le film Polisse, Maïwenn assiste à une foule d'avant-premières et se livre à coeur ouvert dans une avalanche d'interviews. De nature franche, elle n'élude jamais les questions des journalistes, abordant frontalement ses souffrances d'enfant notamment. Pour Le Nouvel Observateur, l'artiste à fleur de peau qu'elle est évoque la personnalité de sa mère, sa relation avec son ex, JoeyStarr, mais surtout, elle s'attarde longuement sur son travail, sa plongée poignante et choquante dans l'univers de la brigade de protection des mineurs. Sans détours.
La Croisette se souvient encore de ce long métrage électrochoc qui nous entraîne dans le quotidien de la brigade de protection des mineurs de Paris. Pour arriver à une telle authenticité dans son film et avoir fait aussi bien honneur au travail de la police, Maïwenn s'est introduit dans la BPM, faisant face à une certaine méfiance. "Les gens de la police, à part Cassel, Marceau, Bellucci, Béart et Adjani, ils ne connaissent rien. C'est la France profonde. On leur dit Karin Viard ou Marina Foïs, ils ne savent pas qui c'est. [...] Tous les comédiens du film était sur scène et un policier a demandé : 'Pourquoi n'avoir pris que des acteurs inconnus ?' Ça les a remis à leur place !"
Le fléau de la pédophilie est au coeur de Polisse, mais comment la retranscrire sans voyeurisme ? Maïwenn s'est heurté à nombre de dilemmes. "La jeune fille qui met la main dans sa culotte devant sa webcam, on croirait une gamine de 14 ans, mais c'est une actrice porno de 19 ans. Sinon, je n'aurais pas pu le faire. Je ne veux pas être traitée de pédophile."
Puis est venu le problème des enfants-acteurs. Maïwenn a obtenu l'autorisation de la Ddass pour tourner avec des enfants, non sans mal. Elle nous fait revivre le déroulement : "Au début, ils ne voulaient pas me rencontrer, pour vous dire. [...] Un jour, j'en avais tellement marre que je suis allée à la Ddass. [...] Je voulais qu'ils me regardent, qu'ils entendent que je suis maman, j'ai deux enfants de 18 et 8 ans. J'ai une vie de femme. J'ai déjà avorté. Je ne suis pas Jean-Claude Brisseau [réalisateur de Noces blanches, il a été condamné en décembre 2005 à un an de prison avec sursis et 15 000 euros d'amende pour le harcèlement sexuel de deux actrices, NDLR]. Ils étaient super méprisants. Leur discours, c'était : un enfant qui joue dans un film d'horreur où sa mère se fait violer et décapiter devant lui est sans conséquence dans sa vie intime. En revanche, votre film madame, les attouchements, même faux, créent un risque."
Les méthodes de travail de Maïwenn ont dû être bouleversées, elle qui aime travailler à l'instinct. Elle s'est engagée solennellement à filmer ce qui était écrit et storyboardé sous peine de poursuites. "Je n'étais pas d'accord, la Ddass prend un peu les enfants pour des cons. Mais j'ai signé. Je me suis dit, imaginons que je me trompe, que je fasse dire une phrase non prévue à Dolorès, la petite fille qui dit 'papa m'a gratté les fesses', et que six mois plus tard, j'apprenne qu'elle est en chute de résultats scolaires, qu'elle ne s'entend plus avec ses parents, qu'elle a des TOC... Si j'apprends ça, je ne peux plus me regarder en face. C'est trop cher payé pour un mot ou pour un plan. La Ddass m'a rendu service. J'avais prévu de montrer des choses dures, j'ai mis le spectateur face à son imaginaire." Et concernant la parole de la victime présumée : "A la brigade, la majorité des enfants disent la vérité."
En matière de maltraitance, Maïwenn a sa propre expérience, dans une famille de cinq enfants - dont la comédienne Isild Le Besco - où elle était la seule à être battue. "Mon père frappait ma mère quand ils étaient ensemble. Quand elle est partie, il s'est mis à me frapper moi." Sa mère, qu'elle décrit comme un poison pour elle, lui "pourrit la vie" : "Elle a rédigé elle-même ma fiche Wikipédia. [...] Sur les forums d'Allociné, ele laisse d'interminables commentaires sur mes films, où elle prend sous pseudo sa propre défense."
Malgré ses traumas, Maïwenn n'a cessé de se construire, pour se hisser bien haut dans la nouvelle génération de cinéastes français. Le prix du jury à Cannes empoché, elle dévoilera le 19 octobre l'électrochoc de Polisse dans toutes les salles.
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans Le Nouvel Observateur du 13 octobre.
La Croisette se souvient encore de ce long métrage électrochoc qui nous entraîne dans le quotidien de la brigade de protection des mineurs de Paris. Pour arriver à une telle authenticité dans son film et avoir fait aussi bien honneur au travail de la police, Maïwenn s'est introduit dans la BPM, faisant face à une certaine méfiance. "Les gens de la police, à part Cassel, Marceau, Bellucci, Béart et Adjani, ils ne connaissent rien. C'est la France profonde. On leur dit Karin Viard ou Marina Foïs, ils ne savent pas qui c'est. [...] Tous les comédiens du film était sur scène et un policier a demandé : 'Pourquoi n'avoir pris que des acteurs inconnus ?' Ça les a remis à leur place !"
Le fléau de la pédophilie est au coeur de Polisse, mais comment la retranscrire sans voyeurisme ? Maïwenn s'est heurté à nombre de dilemmes. "La jeune fille qui met la main dans sa culotte devant sa webcam, on croirait une gamine de 14 ans, mais c'est une actrice porno de 19 ans. Sinon, je n'aurais pas pu le faire. Je ne veux pas être traitée de pédophile."
Puis est venu le problème des enfants-acteurs. Maïwenn a obtenu l'autorisation de la Ddass pour tourner avec des enfants, non sans mal. Elle nous fait revivre le déroulement : "Au début, ils ne voulaient pas me rencontrer, pour vous dire. [...] Un jour, j'en avais tellement marre que je suis allée à la Ddass. [...] Je voulais qu'ils me regardent, qu'ils entendent que je suis maman, j'ai deux enfants de 18 et 8 ans. J'ai une vie de femme. J'ai déjà avorté. Je ne suis pas Jean-Claude Brisseau [réalisateur de Noces blanches, il a été condamné en décembre 2005 à un an de prison avec sursis et 15 000 euros d'amende pour le harcèlement sexuel de deux actrices, NDLR]. Ils étaient super méprisants. Leur discours, c'était : un enfant qui joue dans un film d'horreur où sa mère se fait violer et décapiter devant lui est sans conséquence dans sa vie intime. En revanche, votre film madame, les attouchements, même faux, créent un risque."
Les méthodes de travail de Maïwenn ont dû être bouleversées, elle qui aime travailler à l'instinct. Elle s'est engagée solennellement à filmer ce qui était écrit et storyboardé sous peine de poursuites. "Je n'étais pas d'accord, la Ddass prend un peu les enfants pour des cons. Mais j'ai signé. Je me suis dit, imaginons que je me trompe, que je fasse dire une phrase non prévue à Dolorès, la petite fille qui dit 'papa m'a gratté les fesses', et que six mois plus tard, j'apprenne qu'elle est en chute de résultats scolaires, qu'elle ne s'entend plus avec ses parents, qu'elle a des TOC... Si j'apprends ça, je ne peux plus me regarder en face. C'est trop cher payé pour un mot ou pour un plan. La Ddass m'a rendu service. J'avais prévu de montrer des choses dures, j'ai mis le spectateur face à son imaginaire." Et concernant la parole de la victime présumée : "A la brigade, la majorité des enfants disent la vérité."
En matière de maltraitance, Maïwenn a sa propre expérience, dans une famille de cinq enfants - dont la comédienne Isild Le Besco - où elle était la seule à être battue. "Mon père frappait ma mère quand ils étaient ensemble. Quand elle est partie, il s'est mis à me frapper moi." Sa mère, qu'elle décrit comme un poison pour elle, lui "pourrit la vie" : "Elle a rédigé elle-même ma fiche Wikipédia. [...] Sur les forums d'Allociné, ele laisse d'interminables commentaires sur mes films, où elle prend sous pseudo sa propre défense."
Malgré ses traumas, Maïwenn n'a cessé de se construire, pour se hisser bien haut dans la nouvelle génération de cinéastes français. Le prix du jury à Cannes empoché, elle dévoilera le 19 octobre l'électrochoc de Polisse dans toutes les salles.
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans Le Nouvel Observateur du 13 octobre.