Il y a vingt ans, Michelle Pfeiffer déambulait dans les sombres décors de Batman, le défi (1992) dans une combinaison en cuir déchirée, abîmée par les hommes tordus de Gotham City. Une Catwoman désaxée, inquiétante et hilarante, restée comme l'un des plus beaux rôles d'une actrice révélée par Brian de Palma et Martin Scorsese.
Deux discrètes décennies plus tard, le retour de Michelle Pfeiffer sur les écrans est particulièrement excitant. Passée sous les radars pendant les années 2000, revenue avec Hairspray (2007) et Stardust, le mystère de l'étoile (2007), elle retrouve Tim Burton dans Dark Shadows, une comédie décalée avec Johnny Depp et Eva Green. Un retour aux sources très attendu, comme une porte ouverte sur l'apothéose de sa carrière.
Le fouet de Catwoman
Le résumé est rapide, mais la comédienne de 53 ans est la première à le confirmer : "Batman est l'un de mes meilleurs souvenirs de tournage. J'avais adoré travailler avec Tim - je pourrais tourner l'annuaire pour lui ! Et je mourais d'envie de faire Dark Shadows, c'est l'une des obsessions de mon enfance [le film est tiré d'une série télévisée culte des années 60]. Tim m'a demandé s'il avait changé et, honnêtement, il ne m'a pas semblé si différent. Il assure être moins fou, mais je n'ai pas constaté cela !"
À Studio Ciné Live, elle explique que son absence des écrans au début des années 2000 n'était pas prévue : "Je n'avais pas consciemment pris cette décision. Il se passait simplement beaucoup de choses dans ma vie. J'étais très occupée avec mes enfants, et puis il n'y avait aucun projet qui me tentait spécialement. Du coup, sans que je m'en rende compte, toutes ces années sont passées."
Inconsciemment, il y a surtout une lassitude, relative au processus de fabrication d'un film : "On espère toujours faire de grands films, avec de grands artistes. Souvent, on croit que c'est le cas et on se fait avoir ! (...) [Le choix d'un film] pour moi est toujours lié au réalisateur et au scénario. Parfois, un script n'est pas totalement abouti, mais il est entre les mains d'un grand réalisateur. Vous lui faites confiance pour qu'il transcende le projet. D'autres fois, le metteur en scène est débutant mais le script est tellement fort... Je ne regrette pas d'avoir tourné certains films, le mot est trop fort. Disons qu'il y a deux films que j'aurais pu ne pas faire. C'est vraiment très difficile de savoir, pendant un tournage, si le film sera bon ou pas."
En l'occurrence, Michelle Pfeiffer pense à Laurier blanc (2002), un drame sur une adolescente qui traverse les familles d'accueil après que sa mère a été accusée de meurtre. "Lorsque j'ai fait [cette adaptation d'un] livre que j'avais pourtant beaucoup aimé et dont je trouvais l'héroïne envoûtante, je n'ai trouvé aucune connexion avec mon rôle. Le personnage ne ressemblait en rien à ce que je connaissais. Je n'avais qu'une hâte : que le film soit terminé. Ce ne fut pas une expérience plaisante. Sur un film, on a l'impression de surfer sur une vague. Là, je n'ai jamais trouvé la vague, je me noyais."
La coup de baguette magique
Cinq ans plus tard, elle incarne une méchante sorcière dans Stardust, le mystère de l'étoile (2007) et retrouve les étincelles du septième art : "Je me suis sentie rouillée sur [I Could Never Be Your Woman (2007) et Hairspray (2007)]. Et cela m'a fait peur. Puis, j'ai tourné Stardust de Matthew Vaughn. Ce film m'a fait sentir de nouveau opérationnelle. Quand je commence un film, je ressens aujourd'hui les mêmes frissons qu'à mes débuts."
Depuis, Michelle Pfeiffer a tourné dans le beau Chéri (2009) de Stephen Frears, le méconnu Personal Effects (2009) avec Ashton Kutcher et l'oubliable Happy New Year (2011). Mais c'est certainement avec Tim Burton et Dark Shadows qu'elle marquera encore les esprits.
Connu pour sa courte mémoire, Hollywood n'a cependant pas oublié la blonde craquante. Honorée au CinemaCon, elle a été la première actrice à être sacrée icône de cinéma par le festival. Une bien belle manière de rappeler que le cinéma, lui, n'a jamais vraiment oublié Michelle Pfeiffer.
Dark Shadows, en salles le 9 mai.
Retrouvez l'interview de Michelle Pfeiffer dans Studio Ciné Live, avril 2012.
Geoffrey Crété