Qu'est passé par la tête de Christophe Dominici le 24 novembre dernier, lorsqu'il s'est placé sur un muret haut d'une dizaine de mètres, dans le Parc de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), dont il est tombé ? C'est ce que les enquêteurs cherchent toujours à savoir, afin de déterminer si la chute brutale et mortelle de l'ancien joueur de rugby de 48 ans était intentionnelle, ou non.
Alors que l'enquête ouverte par le parquet de Nanterre est toujours en cours, L'Equipe a recueilli de nouveaux témoignages. Comme l'ont déjà confié des commerçants de Boulogne-Billancourt (où Christophe Dominici habitait avec sa compagne Loretta Denaro et leurs deux filles Chiara et Mya âgées de 14 et 11 ans), l'ancien sportif n'était pas son état normal avant sa mort, visiblement préoccupé.
Une source proche de l'enquête a confirmé à L'Equipe qu'un état "dépressif" aurait été diagnostiqué chez Christophe Dominici. L'ancien joueur international est dit "pas toujours très clair" dans ses idées et ses paroles. Un suivi médical et "médicamenteux lourd" prescrit. "Il était sous traitement médical", est-il également ajouté. On savait Christophe Dominici très fragile psychologiquement depuis de longues années, la mort de sa grande soeur Pascale en 1986 dans un accident de voiture, alors qu'il n'avait que 14 ans, l'a toujours hanté. Il n'avait jamais caché être tombé dans la dépression, comme à l'automne 2000, après que sa première femme Ingrid l'a quitté et le décès de l'un de ses amis.
L'été dernier, Christophe Dominici a connu un énorme revers sportif avec l'échec de la reprise du club de rugby de Béziers, dans laquelle le passionné de ballon ovale s'était largement investi. "Ça l'a manifestement affecté cette histoire, a confié un proche de l'affaire. Pas simplement l'échec de son projet de reprise mais tout ce qu'il y a pu y avoir autour aussi."
L'Equipe relate également cette après-midi au cours de laquelle Christophe Dominici a perdu la vie. En fin de matinée, il quitte son domicile en disant à sa compagne qu'il part acheter des cigarettes et se balader un peu. Vers 13 heures, il est aperçu à l'entrée du Domaine de Saint-Cloud par un employé, où il a l'habitude de se balader avec sa compagne. Ce dernier a été entendu par les policiers de Saint-Cloud. Christophe Dominici "marche depuis la grille d'honneur du Domaine vers l'ancien bâtiment qui a longtemps abrité la prestigieuse école normale supérieure (ENS)", poursuit L'Equipe. "Il n'avait pas l'air très en forme", a fait savoir cette même source. Non loin du Parc de Saint-Cloud, Christophe Dominci et sa compagne sont en train de faire construire une maison...
Deux salariés du domaine constatent son attitude étrange et l'interpellent. "Il lui a été demandé si tout allait bien et s'il avait besoin d'aide", aurait précisé l'un des témoins auditionnés par la police. Christophe Dominici fait savoir que ça ne va pas bien mais poursuit son chemin. "Il est encore vu ressortir du Domaine, puis arpenter l'avenue de la Grille d'honneur, le long d'un muret qui donne, une dizaine de mètres plus bas, sur des bâtiments", poursuit L'Equipe.
C'est alors que vers 14h40 un cycliste aperçoit à son tour Christophe Dominici, "revenu le long de ce muret, avenue de la Grille d'honneur". L'ancien rugbyman tombe sous ses yeux, une chute d'une dizaine de mètres. "Il n'est pas monté sur ce parapet, ni ne l'a enjambé, a confié une source proche de l'enquête. Ce dernier témoin dit l'avoir vu basculer dans le vide."
Sans nouvelles de son compagnon, Loretta Denaro contacte le Domaine de Saint-Cloud qui l'avertit de l'accident. Elle se rend sur place mais il est trop tard. Comme la famille de Christophe Dominici, elle rejette la thèse du suicide. Le père de ses deux filles "n'a pas fait de tentative de suicide, ni n'a tenu de propos morbides au cours de ces derniers mois, rapporte une source proche de Loretta Denaro. Aucun écrit n'a été retrouvé chez lui ou sur lui."
Vendredi 27 novembre, la famille de Christophe Dominici a publié un communiqué. "Hâtivement, certaines affirmations aux termes desquelles Christophe aurait mis sciemment fin à ses jours ont été relayées dans les médias ; affirmations dont la famille entend se préserver. Cette thèse - particulièrement aisée - n'est pas avérée, et ne peut, en l'état, être accréditée. La famille prie donc ceux qui seraient amenés à commenter les circonstances de son décès de bien vouloir respecter sa mémoire et notre espérance", est-il notamment indiqué dans le document.
Les enquêteurs sont à l'heure actuelle "toujours dans l'attente des résultats des analyses toxicologiques, notamment pour savoir s'il prenait bien son traitement médicamenteux", a fait savoir une source proche de l'enquête à L'Equipe.