Si les mondiaux d'athlétisme disputés à Daegu en Corée du Sud devaient signer la consécration du Roi Usain Bolt sur la distance reine, le 100 mètres, un autre athlète a eu les honneurs du public et des médias.
Car tandis qu'Usain Bolt a vécu le pire des cauchemars, le sprinter sud-africain Oscar Pistorius a lui connu un rêve éveillé. Et pourtant, il n'a gagné aucune course. L'homme s'est même fait éliminer en demi-finale du 400 mètres. Alors pourquoi un tel engouement ? Parce qu'Oscar Pistorius est handicapé, amputé des deux jambes sous les genoux...
Un rêve devenu réalité
Né sans péronés, l'homme est une star d'handisport. Celui que l'on surnomme Blade Runner, en raison de ses prothèses en forme de lames, domine le sprint et détient les records du monde du 100, 200 et 400m. Ses prothèses développées spécialement pour la compétition et d'une valeur de 20 000 euros lui permettent d'empocher 4 médailles d'or aux JO Paralympiques d'Athènes en 2004 et de Pékin en 2008. Mais la star en veut plus et veut se mesurer aux valides.
S'engage alors une longue bataille avec l'IAAF, la Fédération Internationale d'Athlétisme suite à sa participation à deux meetings où il concourt avec les valides, dont le meeting de Rome de la Golden League. L'IAAF considère alors qu'il bénéficie d'un avantage certain et l'interdit de courir avec les valides, mais suite à un recours devant le Tribunal Administratif du Sport, il est finalement autorisé à se mesurer avec les meilleurs athlètes. Dans le même temps, son histoire est médiatisée, les sponsors affluent et Thierry Mugler en fait son égérie.
Désormais, plus rien ne s'oppose à son rève, participer aux championnats du monde avec les valides. C'est chose faite le dimanche 28 août 2011, lorsque l'athlète foule la piste de Daegu pour les séries du 400m. A 24 ans, Oscar Pistorius va courir vite. Très vite même puisqu'il réussi à se qualifier pour les demi-finales de la discipline, chose que les Français ne réussiront pas. Ses six heures d'entraînement quotidien auront payé. Mais l'histoire aurait été tellement plus belle avec une médaille au bout.
Un champion qui fait débat
Pour autant, l'histoire fait encore débat dans la coulisse de l'athlétisme, et les avis divergent quant à ses performances. "Ce n'est pas le premier handicapé à se mesurer aux valides. Il y a eu Terence Parkin, un nageur sourd qui a remporté la médaille d'argent sur 200m brasse aux JO de Sydney en 200, et il y a aussi le Français Michel Salesse, handicapé de la main gauche pour une poliomyélite, qui a gagné l'or par équipes en épée en 1980 à Moscou", remaque Jean Minier dans les colonnes de France Soir du 29 août 2011. Mais alors pourquoi Oscar Pistorius séduit-il autant ? Toujours dans le quotidien, Stéphane Caristan, ancien coureur du 400m haies, avance une hypothèse : "Le gars est peut-être un peu en mal de notoriété." Avant d'ajouter : "Quoi qu'on en dise, il a des lames élastiques qui bénéficient d'un ressort. Et plus la distance est longue, plus il est favorisé. J'ai une petite réserve quant à ses performances."
Des prothèses qui sont au coeur des débats, comme le souligne Laurent Boquillet, l'organisateur du meeting Areva à Paris et qui avait invité l'athlète, qui "fait partie des stars" : "Tant qu'il est dernier ou avant-dernier, il n'est pas dérangeant. Mais le jour où il ira battre un record, on se demandera si ses prothèses lui procurent un réel avantage." Et même sa condition physique suscite des interrogations, "lui qui avait un peu d'embonpoint" selon Stéphane Caristan...
Alors, Oscar Pistorius, phénomène de mode ou véritable athlète ? Ni l'un ni l'autre pour Jean-Claude Perrin, ancien entraîneur d'athlétisme. "Il offre un message d'espoir à tous les jeunes gens qui sont amputés dès la naissance ou esquintés sur le champ de bataille." Une récompense qui vaut bien toutes les médailles...