La finale de l'Open d'Australie 2017 avait un goût prononcé de nostalgie et pourtant elle offrait ce qui se fait encore de mieux en tennis aujourd'hui : Roger Federer, 35 ans, et Rafael Nadal, 30 ans, se disputaient pour la première fois un trophée du Grand Chelem depuis... Roland-Garros 2011. Et c'est presque comme si c'était hier tant le Suisse et l'Espagnol, au terme d'un parcours aux allures de résurrection pour l'un et l'autre, ont inscrit leur 35e duel - le 9e en finale d'un Grand Chelem, la 4e dont l'issue se décide en cinq sets - en lettres d'or dans la légende de leur sport.
Dans cette rencontre débridée, on s'est rendu coup pour coup - de génie, souvent. Des coups gagnants de folie, des balles de break en pagaille et des sauvetages presque aussi nombreux... Chacun a eu ses temps forts et ses temps faibles, et même la cinquième manche a obéi à ce scénario ; mais, à l'instar de ce qui restera comme l'un des points du match - un échange marathon de 26 coups soldé par un coup droit gagnant long de ligne du Suisse -, c'est Roger Federer qui s'est imposé : 6-4, 3-6, 6-1, 3-6, 6-3, en 3h37. Un nouveau face-à-face d'anthologie comme on rêverait pouvoir en regarder des années encore.
Jusqu'à l'ultime seconde du match, le public de la Rod Laver Arena (dont la légende qui lui a donné son nom, bien présente) et les téléspectateurs ont été électrisés par le combat de deux des plus beaux champions de l'histoire du tennis, arrivés avec l'étiquette presque incongrue de têtes de séries n°9 (Nadal) et 17 (Federer) : il a en effet fallu quelques secondes d'un suspense insoutenable pour que l'arbitrage vidéo, demandé par le Majorquin, valide le coup droit court croisé de la victoire. Lorsque l'image de la balle mordant la ligne blanche est apparue, Roger Federer a explosé de joie comme si c'était sa toute première victoire - après six mois d'absence du circuit, c'est tout comme - et les larmes lui sont montées aux yeux. Aux abords du court, son clan, son épouse Mirka en tête, exultait aussi. Une émotion incroyable.
Avec ce cinquième succès à Melbourne, Roger Federer porte son total de victoires en Grand Chelem à 18 titres (record absolu amélioré), tandis que Rafa, défait pour la troisième année d'affilée dans l'Open d'Australie (par Djokovic, puis Wawrinka précédemment) sous les yeux de toute son équipe et de sa compagne Xisca, reste pour le moment à 14.
"Je ne pense pas qu'on pensait se retrouver ici quand on était ensemble à ton académie de tennis il y a trois, quatre mois", a déclaré le vainqueur lors de la remise de la coupe Norman Brookes, faisant allusion à sa participation en octobre dernier à l'inauguration de l'Académie de tennis de Nadal sur son île natale de Majorque, à l'occasion de laquelle ils avaient "joué au mini-tennis sur une jambe".
Rivaux sur les courts, amis en dehors, Federer et Nadal ont aussi rivalisé d'élégance l'un envers l'autre dans leurs discours respectifs au cours de la cérémonie finale. "Le tennis est un sport difficile. S'il avait été possible de faire match, j'aurais été content de faire match nul ce soir et de partager le trophée avec Rafa", a notamment dit le Suisse, résumant par cette seule phrase leur extraordinaire attitude à tous les deux.
Puis, sur le chemin du vestiaire, Roger a pu célébrer son succès de la plus tendre manière : avec Mirka dans ses bras. Avant peut-être de... déguster de la soupe dans le trophée Norman Brookes, puisque c'est ce que ses jumelles Myla Rose et Charlene Riva, 7 ans, lui ont conseillé. Leurs jumeaux de 2 ans, Leo et Lennart, n'ont pas une autre suggestion ?
Rendez-vous à Roland-Garros 2017 ?