Nelson Mandela, Barack Obama, George Bush père et fils, Margaret Thatcher, Angela Merkel... Elle a eu les plus grands au bout du fil et pourtant, personne ne la connaît vraiment. Cette femme, c'est Amanda Galsworthy, interprète officielle de l'Elysée sous la présidence de François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Aujourd'hui loin du palais, l'Anglaise s'est confiée dans les colonnes du Point, où elle livre quelques petits secrets des grands de ce monde, qu'elle a côtoyés entre 1984 et 2012...
La "chèvre" de Mitterrand, les tartines au beurre de Chirac
Après des études à Cambridge, c'est à 23 ans seulement qu'Amanda Galsworthy, fille de diplomate, fait ses premiers pas d'interprète. D'abord aux côtés de Danielle Mitterrand, elle effectue sa première mission pour François Mitterrand en 1984. Une mission pour le président le plus "waouh !" qu'elle aura connu et dont elle garde un souvenir étonnant. Déjà plutôt stressée en arrivant au 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré pour traduire une conversation téléphonique entre le président et George Bush, la jeune interprète va connaître quelques imprévus pour sa première. En plus de la voix quasiment inaudible du républicain, la jeune Anglaise se fera accueillir un peu trop chaleureusement par le labrador de François Mitterrand, Baltique, qui, posé sur ses genoux tout au long de la conversation, lui lèchera allègrement le visage ! Et ce n'est pas tout, puisque le président Mitterrand finira par lui glisser qu'Amanda était un prénom de "chèvre", une remarque taquine typiquement mitterrandienne qu'il expliquera ensuite : "ma mère me racontait une comptine dans laquelle une petite chèvre s'appelait Amanda." Amanda le sait désormais, son nouveau job ne sera pas comme les autres...
Moins joueur et plus paternel, Jacques Chirac sera le plus généreux selon Amanda Galsworthy, un de ces personnages de l'ombre de l'Elysée, à l'instar du cuisinier Bernard Vaussion. Elle raconte ainsi qu'il est le seul président à avoir interrompu un déjeuner officiel pour son interprète, alors que celle-ci avait visiblement besoin de se restaurer. "Amanda needs to eat. Mangez, Amanda ! Allez, mangez !", lancera-t-il avant d'arrêter le déjeuner. Celui qui, attablé, n'avait parfois pas hésité à lui beurrer discrètement quelques tartines se montrera également très attentionné lors d'une autre occasion. Sentant que son interprète n'est pas au mieux de sa forme, Jacques Chirac s'inquiète. Amanda lui confie alors qu'elle a dû quitter précipitamment la fête d'anniversaire de sa fille pour venir à l'Elysée et participer à son rendez-vous avec le président singapourien. Le président écrit alors tout de suite un petit mot pour sa fille avant de lui ordonner de partir au plus vite...
Quand elle terminait les phrases de Nicolas Sarkozy...
Avec Nicolas Sarkozy, ce sera le quinquennat le plus "intense" pour Amanda Galsworthy. Mais c'est aussi avec lui qu'elle sera le plus complice, au point de connaître ses éléments de langage par coeur et de terminer ses phrases, comme un jour de 2008 à la Maison Blanche. "La prochaine fois, c'est elle qui fait l'entretien à ma place", rigole alors l'époux de Carla Bruni-Sarkozy face à Barack Obama. L'interprète ne se dit alors plus "derrière" le président, mais "avec" lui au cours d'un quinquennat où elle se surprendra à apprécier la finesse et la galanterie d'un des dirigeants les plus détestés de l'Histoire, George W. Bush, qui se démène toujours par exemple pour lui trouver une chaise.
Malheureusement, après cette expérience des plus fortes avec Nicolas Sarkozy, aux côtés duquel elle avait un sentiment de "History in the making", l'aventure à l'Elysée s'arrêtera avec l'élection de François Hollande, pour Amanda, jugée trop proche de l'ancien patron de l'UMP. Une décision que l'ex-voix du palais a eu du mal à accepter même si elle a pu se recentrer sur Alto-International, son entreprise qui regroupe des interprètes et traducteurs, fondée en 1997. Elle qui a épousé un Français travaille désormais avec de grands noms du CAC 40 tandis que Nicolas Sarkozy, qui ne l'a pas oubliée, lui a proposé de traduire ses conférences. "Il sait que jamais je ne trahirai son message", explique-t-elle, dévouée et en grande professionnelle. Et même si elle assure ne pas avoir de parti pris politique, elle pourrait donc peut-être retrouver Nicolas Sarkozy, qui préparerait son grand retour, et pourquoi pas l'Elysée en 2017...