Après s'être exprimée dans Newsweek et dans une interview, parfois graphique, sur ABC, Nafissatou Diallo a été entendue par le procureur Cyrus Vance pendant près de huit heures mercredi. Pour la première fois elle est arrivée au vu et au su des photographes, devant le bureau du procureur, accompagnée de son avocat. En raison de ses interviews choc, la prochaine audience au tribunal de DSK a été reportée au 23 août et le procureur a déclaré maintenir, pour le moment, ses accusations. L'accusatrice de Dominique Strauss-Kahn, qui dit avoir été violée le samedi 14 mai dans la chambre 2806 du Sofitel, devait notamment s'expliquer sur un coup de fil à un détenu, passé le lendemain de l'agression. Début juillet, le New York Times révélait qu'elle aurait alors affirmé, en parlant de DSK : "Ce type a beaucoup d'argent, je sais ce que je fais".
C'est ce fameux coup de fil qui a jeté le discrédit sur le témoignage de cette Guinéenne de 32 ans, qui vit seule avec sa fille de 15 ans dans le Bronx, aboutissant à la libération sur parole de l'ancien patron du FMI, le 1er juillet. Problème, la conversation s'est tenue en langue peule, l'ethnie d'origine de Nafissatou Diallo, et sa longue traduction soumise à diverses interprétations.
Interrogée sur cette conversation téléphonique sur ABC, Nafissatou Diallo a déclaré qu'il s'agissait d'un malentendu, qu'elle aurait dit "je sais ce que je fais" en évoquant le fait de prendre un avocat. À la sortie du tribunal mercredi, son avocat Kenneth Thompson a établi sa version des faits : "Certaines choses ont été mélangées dans cette citation qui a été donnée au New York Times. Nous avons écouté cet enregistrement et il montre que la victime n'a jamais prononcé ces mots. Elle a dit à cette personne que 'quelqu'un a essayé de [la] violer et c'est quelqu'un qui a du pouvoir, un homme important'." C'est vrai que cela change la donne...
On se souvient que Nafissatou Diallo a raconté sa peur le lendemain de l'agression présumée, après avoir passé une partie de la nuit en compagnie de médecins et d'enquêteurs, en regardant la télévision et découvrant qui était DSK : "Je regardais Channel 7 et il disait qui était ce type - je ne savais pas - qu'il allait être le prochain président de France. Et j'ai pensé qu'ils allaient me tuer", confait-elle à Newsweek.
Son avocat a enfin ajouté, que "Melle Diallo a le droit d'engager sa propre action en justice", au civil donc, ce qui lui permettrait de demander des dommages et intérêts.
Pour certains observateurs et de spécialistes ce témoignage de Nafissatou Diallo dans les médias est à double tranchant. Elle chercherait ainsi à faire pression sur le procureur pour qu'il n'abandonne pas les charges retenues contre DSK en prenant à témoin l'opinion publique. Elle poursuit d'ailleurs de plus belle dans cette voie : la femme de chambre fera une déclaration publique jeudi à New York pour remercier ceux qui la soutiennent depuis le début de l'affaire. Son intervention, annoncée par une organisation communautaire africaine de New York, se tiendra à 18h (heure de Paris). Nafissatou Diallo ne répondra à aucune question des journalistes.