Jusqu'au 18 février, Gérard Depardieu chante Barbara au théâtre des Bouffes du Nord. Quatorze morceaux – qui font désormais l'objet d'un album – interprété par la sensibilité à fleur de peau, brute et entière d'une légende du septième art, accompagnée au piano par Gérard Daguerre, proche collaborateur de la chanteuse dont on fêtera en novembre prochain les 20 ans de sa disparition.
Loin des écrans de cinéma, sur les planches où il interprète à sa manière les titres les plus emblématiques du répertoire de Barbara, Gérard Depardieu raconte la chanteuse à travers ses chansons. "J'essaie d'apporter de l'émotion aux mots", assure le comédien à L'Express. Des chansons telles que L'Aigle noir prennent ainsi un autre relief avec l'ogre Depardieu. Dans Télérama (édition du 1er février), notre Gégé national dépeint la secrète Barbara, évoque sa relation avec elle et n'hésite pas à apporter les sujets sensibles, comme l'inceste dont elle a été victime.
Dans ses mémoires interrompues par sa mort, Barbara commençait enfin à lever le voile sur ce qu'elle avait subi pendant son enfance. De 1940 à 1949, de 10 ans à 19 ans, son père abuse d'elle, la viole. Mais Barbara n'en parle jamais en ces termes. Elle tente bien de s'adresser à une gendarmerie, au soir d'une fugue en Bretagne. Mais son père fait croire qu'elle fabule. Dans ses mémoires, Barbara refuse d'employer les mots "viol" et "inceste". Gérard Depardieu, lui, n'hésite pas. L'acteur, qui avait partagé l'affiche de Lily Passion avec elle, évoque "la marque de l'inceste", décryptant L'Aigle noir. "Lorsqu'elle chante 'dans ma main, il a glissé son cou', on peut très bien imaginer une bite, avance Gérard Depardieu avec son franc-parler habituel. L'Aigle noir parle de l'inceste."
Il poursuit en racontant les souffrances de son amie. "L'inceste a glissé sur elle dès qu'elle a commencé à chanter. Elle s'en est échappée", assure Depardieu qui dit n'avoir "jamais ressenti chez elle une douleur d'inceste". "Je n'ai appris son histoire que bien plus tard, lorsqu'elle s'est mise à écrire son livre, poursuit-il. Tant de gens ont subi des agressions sexuelles ; certains ne s'en remettent pas – je pense à Patrick Dewaere – d'autres survivent très bien." Barbara, une femme dotée d'une "force de vie formidable", était de ceux-là. "Elle ne se lamentait jamais sur son propre vécu", assure Depardieu qui va même plus loin : "Avec Nantes, elle montre qu'elle a pardonné."