L'eau vive risque de courir encore un petit moment. Guy Béart, mort le 16 septembre 2015 à l'âge de 85 ans, va avoir droit à un joli hommage familial. Même trois. Un double album s'apprête à voir le jour, De Béart à Béart(s), dans lequel une vingtaine d'artistes – des proches du chanteur, des petits nouveaux de la scène française – revisitent son répertoire. Suivront ensuite une intégrale prévue pour le mois de septembre et un documentaire destiné à la télévision. Mais malgré le redoutable travail d'archives effectué par ses deux filles, malgré les souvenirs qui ont refait surface, Emmanuelle et Eve peinent toujours à s'exprimer à propos de leur père.
C'est bien simple. Quand elle évoque l'artiste, Emmanuelle Béart le fait toujours en l'appelant par son nom. "Mon père", tout au mieux. Une douce retenue qu'elle a expliquée dans les colonnes du magazine Version Femina. "Ces diverses appellations sont une façon de mettre une distance pour pouvoir dire des choses intimes, précise-t-elle. Vous savez que je n'aime pas m'épancher sur les gens de ma famille, ce que je n'ai jamais fait, ni sur les hommes que j'ai aimés ni sur mes enfants... Donc, tout à coup, me dire que je dois être une sorte de livre ouvert sur la personne si pudique qu'était mon père m'amène à passer de Guy Béart à Guy et à papa. Évidemment, ça met aussi à distance mes émotions. Guy a fait sa grande valise en 2015 seulement. C'est encore récent."
Emmanuelle Béart se souvient d'un homme tendre, mais qui cultivait des liens très spéciaux avec les plus jeunes. Petite, quand elle était chez lui, elle côtoyait Aragon, Louise de Vilmorin, Mitterrand, Cabu, Plantu, Kolinski. Guy Béart, lui, préférait s'adresser à elle comme à une égale. "Ce n'était pas un homme à bébés ni à enfants, raconte-t-elle. Et je crois qu'il lui fallait une certaine maturité en face pour susciter de l'intérêt. Guy nous a toujours amenées vers un rapport adulte, même lorsque nous étions petites. Il avait besoin de nous parler comme à des grandes personnes." Voilà qu'aujourd'hui, en 2020, elles sont prêtes à prendre la relève...