A peine sortie d'un grand week-end de frénésie entre les César et la 85e Cérémonie des Oscars, Emmanuelle Riva a confié son ressenti à l'AFP lors d'une soirée donnée au Consulat français de Los Angeles. Fatiguée, l'actrice césarisée pour sa composition dans le film Amour de Michael Haneke avoue avoir eu du mal "à tenir le coup", tant les choses se sont enchaînés à une vitesse folle.
Vendredi soir, encore dans l'euphorie d'un premier César, Emmanuelle Riva quitte Paris pour traverser l'Atlantique, direction Los Angeles, où elle doit défendre une nomination à l'Oscar de la meilleure actrice. "On sortait des César et, comme un poisson volant, il a fallu s'infiltrer dans l'avion, on n'a pas dormi de la nuit. Quelle fatigue", concède-t-elle. Samedi matin, elle arrive donc à Los Angeles emmitouflée et calée dans un fauteuil roulant. L'actrice, qui fêtera par ailleurs son 86e anniversaire lors de la cérémonie, sait qu'elle doit se préserver. "Les gens oublient peut-être qu'à 86 ans, on est peut-être davantage fatigué que quand on est jeune", lâche celle qui défilera tout de même pimpante, sur le tapis rouge qui l'emmène au Dolby Theatre.
Vêtue d'une robe Lanvin, la "paysanne" Emmanuelle Riva découvre un univers qui n'est pas le sien et assure que "la vraie vie est ailleurs". Avouant qu'être "mise à la question est une chose terrible", Emmanuelle Riva se prête toutefois au jeu. C'est en français qu'elle assurera ses interviews, épaulée par une traductrice. Dans la cohue du tapis rouge qu'elle ne "voit pas parce qu'on est serrés comme des harengs", Riva se lance dans une conversation "à bâtons rompus" avec ses interlocuteurs. Elle atteindra même le paroxysme de cet incroyable tapis rouge lorsque, par hasard, le cheminement de la TV Line (qui regroupe les journalistes télévisés accrédités) lui fait croiser la petite Quvenzhané Wallis, juste devant les caméras de Canal+ et les commentaires excités de Laurent Weil et Didier Allouch. Regards incrédules, les deux nommées à l'Oscar ne semblent pas avoir conscience de l'engouement surjoué de l'événement.
"Les gens ont besoin de falbalas, de tralala, de grand bruit, d'idoles... Je suis assez anti-star-system, il faut bien le dire, je n'y peux rien", confiera-t-elle quelques heures plus tard, une fois le bruit retombé. Visiblement marqué par la soirée, l'actrice française évoquera un red carpet "bruyant au point qu'on n'arrive même pas à parler. On dirait que le bruit veut tout écraser. Ça fait bizarre. Je ne peux pas dire que j'aime ça". L'expérience semble être à mille lieues du tournage d'Amour sous la direction d'"un metteur qui maîtrise tout, visionnaire, sans aucune sentimentalité... On est hors de soi, je sentais le moment où je glissais dans l'autre. Je me suis risquée à dire que c'était presque voluptueux mais qu'il ne fallait pas en profiter".
Fière de sa nomination malgré la défaite face à Jennifer Lawrence sacrée pour Happiness Therapy à l'âge de 22 ans, Emmanuelle Riva avoue qu'une telle reconnaissance est "formidable". De son côté, Michael Haneke avouera également que son actrice méritait l'Oscar. Tout de même récompensé par la statuette du meilleur film en langue étrangère, le cinéaste autrichien s'avoue "déçu", même s'il relativise et assure que "naturellement, la Palme d'or, ça compte beaucoup plus qu'un Oscar".