Emmanuelle Seigner affiche une nouvelle fois son soutien indéfectible à son mari, Roman Polanski. Dans une lettre parue dimanche 8 juillet 2018 dans le JDD, l'actrice de 52 ans rejette vivement l'invitation à rejoindre l'Académie des Oscars pour devenir votante. Invitée à devenir membre au côté de plusieurs autres personnalités internationales, la star française a choisi de dire "non merci !" afin de protester contre l'exclusion de son époux, mis à la porte de l'Académie le 3 mai dernier.
"L'Académie américaine des arts et des sciences du cinéma me propose de la rejoindre, en compagnie d'autres actrices, au nom d'une féminisation par ailleurs nécessaire. (...) Féministe, je le suis depuis toujours, mais comment puis-je faire semblant d'ignorer que l'Académie, il y a quelques semaines, a mis à la porte mon mari, Roman Polanski, pour satisfaire l'air du temps. La même Académie l'avait récompensé de l'Oscar du meilleur réalisateur pour Le Pianiste en 2003. Curieuse amnésie !", commence Emmanuelle Seigner.
Entre le prestige professionnel et l'amour, la comédienne a évidemment fait son choix. Mariée depuis 1989 à Roman Polanski, le père de ses deux enfants (Morgane, 25 ans et Elvis, 20 ans), Emmanuelle Seigner décrit une "proposition injurieuse" et "une insupportable hypocrisie". "C'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase de ma relative discrétion. Vous m'offensez alors que vous prétendez vouloir protéger les femmes", poursuit-elle, avant d'évoquer l'épisode de Zurich lorsque son mari avait été arrêté.
On voudrait aujourd'hui que je me désolidarise de lui ?
Roman Polanski est accusé d'avoir drogué puis violé une adolescente de 13 ans, Samantha Geimer, en 1977. A l'époque, il avait admis une relation sexuelle, après que les deux autres chefs d'accusation plus graves ont été abandonnés, puis avait été emprisonné un peu plus d'un mois en Californie. En 2009, il avait passé deux mois de détention en Suisse sur la base d'un mandat d'arrêt international lancé par la justice américaine qui le considère comme un fugitif depuis son départ pour la France en 1978. Entre 2010 et 2017, il a été accusé d'agressions sexuelles par plusieurs femmes, des faits qu'il conteste.
"On le décrit depuis son emprisonnement en Suisse comme le pervers qu'il n'a jamais été. Je suis la seule à pouvoir témoigner à quel point il regrette ce qui s'est passé il y a quarante ans. Et pourtant, je suis démunie lorsque la presse publie à son sujet des infamies, des témoignages mensongers, parle de femmes qui auraient été violées mais ne portent jamais plainte. (...) Samantha Geimer, sa seule et unique victime, demande depuis des années le classement de l'affaire, mais les juges et les médias refusent obstinément de l'entendre. Elle a accueilli avec indignation l'exclusion de Roman de l'Académie des Oscars", poursuit Emmanuelle Seigner.
L'actrice continue sa lettre en citant les "personnages féminins inoubliables" qui ont été créés par Roman Polanski au cinéma et interprétés par de nombreuses actrices, de Sharon Tate à Catherine Deneuve, en passant par Mia Farrow et Sigourney Weaver. "Et l'Académie des Oscars voudrait que je me désolidarise de cet homme ? Les artistes n'échappent pas à la justice ordinaire, bien sûr. A condition qu'elle ne devienne pas une justice d'exception, qu'elle ne viole pas sa parole et ses propres principes. Ce qui a été le cas à Los Angeles en 1977 après un premier séjour en prison qui devait être sa peine. Aujourd'hui, Roman a purgé plus que le maximum de la peine encourue pour la faute commise", écrit-elle.
Elle conclut : "Je comprends qu'il y ait un sérieux doute sur la justice des hommes. (...) Parfois, je croise son regard blessé. Parfois, il me stupéfie par sa douce fureur de vivre. Il n'y a que la vérité et ces mots que je viens d'écrire qui puissent apaiser ma douleur. Quant aux membres de l'Académie des Oscars, je n'ai qu'une chose à leur dire : vous n'aurez pas la femme que je suis."