Après des hauts très hauts, les chanteurs qui ont été révélés dans les années 80 ont souvent connus des bas... très bas. Contrairement à certaines des étoiles filantes de ces années-là, tombées dans l'oubli après un seul tube, la carrière de François Valéry, qui fête ce 4 août ses 70 ans, s'étend sur plusieurs décennies, lui qui entend célébrer ses 50 ans de scène cette année. Il n'en est pas moins passé par des périodes très compliquées.
Jean-Louis Mougeot, de son vrai nom, se lance dans la chanson à la fin des années 70. C'est d'ailleurs en référence à Valéry Giscard d'Estaing, le président qui dirige alors la France qu'il choisit son pseudo. Ces premiers tubes s'inscrivent largement dans ces années où la disco est reine. Coupe au bol, costumes brillants pantalons pattes d'eph : en 1980, deux ans après la mort de Claude François, les Français peuvent croire à la résurrection du chanteur d'Alexandrie Alexandra lorsqu'ils aperçoivent sur leur téléviseur ce jeune chanteur blond nommé François Valéry interpréter son dernier morceau : Emmanuelle. A défaut de révolutionner le genre, le chanteur rencontre un franc succès, conforté l'année suivante par son duo intitulé Dream in blue avec celle qui est déjà la petite fiancée des Français : Sophie Marceau.
"Le projet est né à l'occasion d'un reportage photo pour Match, expliquait François Valéry en 2014 à Gala. On nous avait demandé de poser ensemble. À l'époque, Sophie et moi faisions régulièrement la couverture des magazines pour jeunes. Elle comme actrice débutante et moi comme artiste populaire. Je lui ai proposé le titre sur le ton de la plaisanterie, du style : "Tiens, ça te dirait qu'on l'enregistre ensemble ?" Il n'y avait pas la moindre idée marketing derrière tout ça. J'ai trouvé qu'elle se débrouillait très bien, qu'elle avait un joli brin de voix. Je n'aurais jamais pu imaginer que cela devienne un tel hit !"
Ni que cela suscite autant de rumeurs ? Derrière ce duo artistique de charme, beaucoup imaginent une histoire sentimentale. Mais de l'aveu du chanteur, ll n'en aurait rien été. "Je n'ai pas le souvenir qu'il y ait eu amourette, mais en tout cas on est crédible", affirmait-il sur le plateau de Chez Jordan ce mardi 7 mai 2024. Une certitude demeure, les deux artistes semblent être restés très bons amis...
À la fin des années 80, changement de style. Les synthés s'en donnent à coeur joie dans le nouveau morceau de l'artiste : Aimons-nous vivant. Ce titre lui vient en tête lors des funérailles d'un ami. Alors que les discours en hommage au défunt se succèdent, il se dit que ces déclarations d'amour convenues méritent d'être faites tant que les gens sont vivants. Le tube restera 25 semaines classé au Top 50, sera vendu à 200 000 exemplaires et obtiendra un disque d'argent... De quoi envisager l'avenir sous les meilleurs auspices pour l'artiste.
Il va d'ailleurs prendre son temps ou travailler pour d'autres, comme lorsqu'il écrit Mama Corsica, pour Patrick Fiori au milieu des années 90, qui terminera 4ème à l'Eurovision. Durant ces années, les comédies musicales sont à la mode. La chanteur décide donc de se lancer dans l'aventure. Hélas, cette fois, il va devoir déchanter.
Tout commence en 1998. François Valéry parvient à convaincre M6, Chérie FM et Sony Music de participer à son projet de spectacle baptisée L'ombre d'un géant. Il crée une société, Rubi Prod. La banque Baecque Beau, accepte de le financer à hauteur de 460 000 euros pour 42 représentations entre le 12 février et le 24 mars 2002. Selon l'artiste, l'établissement financier lui aurait aussi octroyé une autorisation de découvert d'un montant similaire. Un argument que contestera plus tard la banque. En février, les représentations débutent au théâtre Mogador à Paris mais au milieu de la série de spectacle, la banque refuse à l'artiste un chèque de 108 000 euros pour défaut de provision. Les shows s'arrêtent. La société de François Valéry est liquidée. Le géant s'écroule.
"Je me prends une claque dans la gueule. Je découvre que les caisses sont vides. Dans l'urgence, je procède à une liquidation judiciaire. Humainement, c'est terrible, 50 personnes se retrouvent sans rien, du jour au lendemain", évoque-t-il en 2008 dans Paris Match. Et lorsque nos confrères lui demandent comment cela a pu se produire, il répond : "Si j'étais un homme d'affaires, cela se saurait. J'étais concentré sur mon bébé, je ne me souciais pas du reste. (...) Les recettes n'étaient pas suffisantes. Le budget était de 7 millions d'euros. J'avais mis 2 millions d'euros dans le projet, mes droits d'auteur servaient de caution. Mais je n'ai vraiment pas compris, je voyais la salle pleine tous les soirs."
Un malheur n'arrivant jamais seul, après avoir été lâché par sa banque, l'artiste voit la maison de disque Sony BMG se retourner contre lui en invoquant "un faux" qu'aurait réalisé François Valéry et en l'attaquant en justice. Il est mis en examen à l'automne 2002 "J'étais anéanti. Ils m'ont sali et humilié. Je me suis soûlé de désespoir. Le suicide était un luxe que je ne pouvais pas m'offrir, pour mes enfants. Moi pour qui tout avait bien marché depuis l'âge de 18 ans, je ne voyais pas le bout du tunnel", résume-t-il dans Paris Match.
"Aujourd'hui, plus aucune major compagnie ne veut produire d'oeuvre nouvelle avec lui", indique son avocat en 2004 dans le cadre du procès que le compositeur-interprète intente à sa banque. D'un point de vue personnel, l'artiste invoque "un état dépressif", et note qu'il n'a plus de moyen de subsistance. "On a ruiné l'homme et l'artiste", achève son défenseur Me Brognier lors d'une plaidoirie au terme de laquelle François Valery demande 24,5 millions d'euros à la société Baecque Beau. Il n'en obtiendra que 50 000 mais pourra se targuer d'avoir gagné ce premier combat, à défaut d'avoir gagné en appel un an plus tard...
En 2008, en revanche, l'ancien mari de Nicole Calfan avec qui il a eu ces deux enfants, Jérémy et Michaël qui se sont à leur tour lancés dans des carrières artistiques, et pour qui il a souhaité jadis rester en vie, pourra crier victoire face à Sony. Dans un arrêt du 20 mars de cette année-là, la Cour d'appel de Versailles a estimé que la major avait fait preuve d'une "légèreté blâmable, constitutive d'une faute à l'égard du chanteur en déposant une plainte". La maison de disque, conclut la justice, a causé "directement un préjudice" à François Valéry "tenant à l'arrêt définitif de l'exploitation de sa comédie musicale." La cour mandate alors un expert afin d'évaluer le montant des préjudices financiers de l'artiste pour sa "perte de chance" de toucher des royalties du show, dont il est l'auteur-compositeur.
Le montant de cette indemnisation n'a jamais été révélé. En revanche, une chose est sûre, François Valéry n'a pas fini sa vie ruiné, loin de là... Après un come-back surprenant, il y a quelques mois, sur le plateau de chez Jordan, il a même fait cette révélation étonnante en affirmant toucher actuellement "une blinde" !
"J'ai une retraite d'auteur, de compositeur, d'éditeur, de co-auteur (...) Je suis propriétaire de mon catalogue discographique, que j'ai racheté en 1989", a-t-il avancé en expliquant qu'il gagnait bien plus que 5000 euros par mois. Lors de cette même émission, il s'était targué d'avoir en 1984, signé "le plus gros contrat de la profession à un milliard et demi de centimes pour cinq ans". (1,5 millions d'euros actuel) Une somme qui aura sans doute permis au chanteur qui a refait sa vie d'amortir ses déconvenues des années 2000 et d'être aujourd'hui un homme heureux, même s'il a entre-temps "morflé", comme il le dit, en raison de graves problèmes de santé...