Gérard Depardieu est un monstre sacré du cinéma, aussi admiré que critiqué. Acteur au talent que personne n'oserait remettre en question, il est devenu une légende de son vivant, ici comme à l'étranger. De retour de Cannes où il était venu défendre avec fougue le film Valley of Love de Guillaume Nicloux avec également Isabelle Huppert, il défend dans L'Obs cette oeuvre qui lui tient manifestement beaucoup à coeur mais parle aussi du palmarès du Festival de Cannes, de son fils Guillaume Depardieu et de son image.
"Je m'en fous, moi, de Cannes"
Dheepan de Jacques Audiard Palme d'or, Vincent Lindon (La Loi du marché) et Emmanuelle Bercot (Mon Roi de Maïwenn) prix d'interprétation : comment Gérard Depardieu réagit-il à ce palmarès ? "Je m'en fous, moi, de Cannes, mais puisqu'on y est allés, j'aurais bien aimé que l'on donne le prix du scénario à Guillaume Nicloux, il le méritait. Le palmarès ressemble à ce qu'est devenu Cannes, il est franco-bourgeois. Ce qui ne m'empêche pas d'être profondément heureux pour Vincent Lindon, qui est un garçon merveilleux et qui contribue grandement à la résurrection d'un cinéma français que nous n'avons plus et qui nous est essentiel. Vincent a en lui cette force qui inspire le désir et qu'il communique au spectateur."
L'acteur choisit de ne pas s'apesantir sur le tandem de Mon roi : "Pour ce qui est de Maïwenn et Emmanuelle Bercot, en revanche, passons..." Il ne s'étend pas, on ne connaîtra donc pas en détail ce qui lui a déplu dans le drame romantique de la réalisatrice de Polisse. Cette dernière, qui est également connue pour sa franchise, réagira peut-être à ses propos. Si Gérard Depardieu se montre certes parfois sévère envers ses collègues, Maïwenn peut se réjouir de ne pas avoir été attaquée de front comme Juliette Binoche, dont le monstre sacré, en 2010, avait dit qu'elle n'était "rien" !
Quant à la Palme d'or revenue à Dheepan, Gérard Depardieu, comme d'autres festivaliers, estime qu'il ne s'agit pas du meilleur film de Jacques Audiard, il lui préfère largement Un prophète : "Mais je suis heureux pour lui. Surtout, il a parlé de son père, je me demande même si ce n'est pas la première fois. (...) Quand, sur scène, Jacques a parlé de Michel, les étoiles brillaient dans ses yeux. On peut avoir confiance, allez, peut-être qu'il va guérir !" Guérir de quel mal ? Nous n'en saurons pas davantage.
"L'ascèse, je connais aussi"
Père lui aussi, Gérard Depardieu évoque son fils, décédé en 2008. Dans Valley of Love, il incarne d'ailleurs un père qui a rendez-vous avec son ex-femme dans la Vallée de la mort, une requête formulée par leur fils six mois plus tôt dans sa lettre de suicide. De quoi faire écho à son propre vécu avec Guillaume : "Ça n'a pas été facile à vivre... De tout le tournage, je n'ai pas bu un goutte d'alcool. L'ascèse, je connais aussi, mais jamais à ce point-là et c'était sans le faire exprès. Comme si j'avais vraiment rendez-vous avec lui."
Constamment à coeur ouvert et à fleur de peau, Gérard Depardieu livre ses réflexions sur son statut d'icône controversée : "Moi, si à l'étranger, on m'aime encore bien, ce n'est pas parce que j'ai fait des films, c'est parce que j'ai pissé dans un avion et parce que j'ai maintenant un passeport russe ! Peut-être aussi que les gens voient bien que je suis libre." On le retrouvera prochainement dans Saint-Amour avec Benoît Poelvoorde mais aussi dans la peau de Staline devant la caméra de son amie Fanny Ardant. D'elle, il dit d'ailleurs : "Elle fait partie des êtres d'exception."
Valley of Love, en salles le 17 juin.
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans le magazine L'Obs du 11 juin