Jusqu'où s'écrira l'histoire d'amour et de gros sous entre les sportifs adulés et la publicité ? Difficile de croire que cette love story lucrative puisse avoir des barrières : car si les athlètes cultivent l'art très médiatique de les franchir, les valeurs qu'ils portent (performance, dépassement de soi, technicité, solidarité, etc.) et leur visibilité naturelle représentent un filon quasi intarissable pour les annonceurs, qui n'hésitent plus à miser des sommes colossales pour un retour sur investissement communicationnel fort (qualitatif et quantitatif).
Pourtant, le CSA vient de mettre un coup d'épée dans l'eau de cette jolie mare : ce sont les sites de jeux en ligne qui en sont troublés. Le magazine spécialisé CB News, dans son édition courante, se fait en effet l'écho, dans un article intitulé Jeux en ligne, le péril jeune, des délibérations du CSA concernant la réglementation de la publicité (TV et radio, mais pas Internet, sans organisme de contrôle) de ces nouveaux acteurs du marché cybernétique, désormais licites en France et autorisés à faire de la publicité sur les médias audiovisuels depuis quelques semaines.
Au coeur du dispositif de "liberté surveillée" décidé par les sages du CSA, dans une version allégée de ce qui avait été envisagé au mois d'avril, l'interdiction d'envahir les espaces publicitaires de supports en vogue auprès des mineurs - des joueurs et des parieurs en herbe. Clairement, le texte entériné prévoit que "l'un des sites qui aura obtenu l'agrément de l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) ne pourra acheter de l'espace publicitaire sur l'une des chaînes au positionnement jeunesse clairement énoncé dans les conventions passées avec le CSA. Et ses spots ne pourront figurer que dans les écrans encadrant, jusqu'à 30 minutes avant et 30 minutes après - ou coupant les cases jeunesse des autres chaînes."
"C'est aux éditeurs de dire quels sont les programmes concernés, mais nous pourrons les requalifier en fonction de nos critères", fait remarquer Françoise Laborde, membre du Conseil, insistant sur la vigilance dont souhaitent faire preuve les sages.
Mais l'encadrement va plus loin : bien avant ce sujet de CB News en page 25, la revue mettait en exergue dès la page 8 que les opérateurs de jeux en ligne, dans leurs spots TV et radio, ne pourront "mettre en scène des personnalités, des personnages ou des héros appartenant à l'univers des enfants ou des adolescents, ou disposant d'une notoriété particulièrement forte auprès de ces publics". Un élément qui répond pour CB News à la question : "Pourquoi les sportifs en vogue ne s'enrichiront pas avec la pub pour les jeux en ligne ?"
Et effectivement, les "héros" footballeurs, tels Thierry Henry, Djibril Cissé, Franck Ribéry, Yoann Gourcuff ou encore Nicolas Anelka, figurent parmi les idoles par excellence de la jeunesse, qui en collectionne les vignettes à leur effigie et consomme les mêmes Kinder que l'équipe de France.
Si, comme le fait remarquer CB News, Dora l'exploratrice ou Laetitia Milot (Plus Belle la Vie), ne pourront donc être embauchées, les Bleus non plus.
Ce qui pose, cela étant, une autre question : comment fixer la frontière et évaluer le degré de notoriété auprès des jeunes de tel ou tel athlète ? On se doute bien que Marcel Desailly, ambassadeur notoire et pionnier d'un site de jeux en ligne, n'a pas ce type d'aura sur les minots. Sera-ce du cas par cas ? Un travail qui s'annonce musclé...
Enfin, si vous craignez que nos super sportifs en souffrent dans leurs activités commerciales, vous n'avez qu'à allumer votre poste pour constater que leur business a de beaux jours devant lui : Crédit Agricole, SFR, Nike...
G.J.