Un adolescent moqué, frappé, crucifié puis tué par balles dans l'indifférence... Pour illustrer College Boy, son nouveau single, Indochine appuie là où ça fait mal. Présentée en avant-première par Le Parisien, jeudi 2 février, cette vidéo choc met en scène le harcèlement à l'école et dénonce crûment une forme d'intolérance aujourd'hui trop souvent banalisée. S'il devrait faire couler beaucoup d'encre, le clip ultraréaliste se veut avant tout "éducatif", comme l'expliquent le réalisateur québécois Xavier Dolan et Nicola Sirkis dans les colonnes du journal.
Loin de ressembler à un coup marketing, le clip de College Boy, extrait de l'album Black City Parade, permet à Indochine de renouer avec sa facette la plus engagée, à l'heure où le débat sur le mariage pour tous a fait resurgir une homophobie depuis toujours combattue par le groupe. Nicola Sirkis explique ainsi avoir voulu pointer du doigt un certain malaise dans la société actuelle et non montrer une violence "gratuite". "Pour moi, c'est la même démarche que lorsque la sécurité routière réalise un clip choc pour sensibiliser aux accidents de la route. C'est plus éducatif qu'autre chose. (...) Certains gamins se suicident parce qu'ils sont harcelés par d'autres élèves", assure-t-il.
Le chanteur d'Indochine, qui se défend de "chercher le scandale", reste tout de même conscient que le clip, aux images sombres et violentes, pourrait ne pas être diffusé à des heures de grande écoute à la télévision. "Je comprendrais très bien (...) Je ne crierai pas à la censure. Et malheureusement, je pense que les ados voient des choses bien plus horribles que ça", regrette le leader du groupe, qui précise que, sur Internet, la vidéo est accompagnée d'un avertissement.
Comme prévu, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a d'ailleurs pas tardé à réagir, par la voix de Françoise Laborde. Au micro du Grand Direct des Médias sur Europe 1, la Sage a évoqué le clip du groupe français, qui pourrait faire l'objet d'une interdiction aux moins de 18 ans. "Au nom d'un certain esthétisme, on montre des images d'une violence insoutenable. (...) Ça n'a pas sa place en journée sur les chaînes de musique", regrette-t-elle, même si aucune décision n'a encore été prise.
Une réaction que ne devrait toutefois pas apprécier Xavier Dolan, le talentueux réalisateur de la vidéo polémique. "Ça m'embête. (...) Sur ce genre de chaînes, on voit tellement de scénarios racistes, violents, dégradants, notamment pour les femmes. Cela me paraît absurde que ce clip soit censuré", déplore l'auteur de l'excellent Laurence Anyways, sorti l'année dernière. Que l'on cautionne ou non la démarche, le clip aura au moins déjà rempli sa mission première : interpeller.