En 2008, Isabelle Adjani jouait dans le drame La Journée de la jupe et décrochait son cinquième César. Huit ans plus tard, elle explore de nouveau l'univers douloureux de la violence sociale avec Carole Matthieu, présenté au Festival d'Angoulême. Une oeuvre de Louis-Julien Petit (Discount) adaptée du livre Les Visages écrasés de Marin Ledun, un roman lui-même inspiré de l'affaire des suicides à France Télécom. Son personnage est dévoué à sa mission de médecin de travail et c'est avec le même regard implacable que l'actrice observe le monde contemporain. Son interview pour Le Journal du dimanche regorge ainsi de réflexions aussi franches que lucides.
La dictature invisible du numérique
Isabelle Adjani le clame haut et fort : "Je n'ai aucun profil Facebook, Twitter ou Instagram. Je n'ai pas envie de devenir dingue, ni d'être référencée ; ça va, en tant que célébrité." Elle vient de lire L'Homme nu, de Marc Dugain, "sur la dictature invisible du numérique". Pour elle, les enfants notamment en montrent trop : "Je suis si triste quand je vois les enfants se livrer en pâture sur les réseaux sociaux, s'exposer à l'humiliation pour une reconnaissance virtuelle." On imagine qu'elle a souvent dû aborder ce sujet avec son plus jeune fils, Gabriel-Kane, 21 ans, né de sa relation avec Daniel Day-Lewis. Le jeune homme, en effet, est très actif sur les réseaux sociaux...
La quête de la célébrité ? Isabelle Adjani est déjà est une icône et ne cherche pas à se mettre plus à nu : "Franchement, moi, j'ai quoi à conquérir ? Le marché des Kardashian ? Ha, Ha, Ha ! Quelle horreur !"
Tu vas salir le miroir
D'origine allemande par sa mère et kabyle par son père, Isabelle Adjani a elle été élevée dans la "discrétion, l'introversion, l'effacement" : "À la maison, le mot d'ordre était : 'Ne t'expose pas, pas de vague...' Si j'avais le malheur de me regarder dans une glace, mon père disait : 'Sors, tu vas salir le miroir.' J'ai vécu avec une immense pudeur imposée. Le plus douloureux fut sans doute de ne pas avoir pu sauver mon père de lui-même, de son mal-être."
Ridicule et dangereuse
Enfant, elle se voyait travailler dans l'humanitaire. À 12 ans, elle avait même organisé une collecte en pleine guerre du Biafra : "Résultat, j'ai redoublé ma 6e." Le monde qui l'entoure la bouleverse toujours autant et sur le sujet polémique de l'été, le burkini, elle répond sans détour : "J'ai trouvé la polémique ridicule et dangereuse. Je suis toujours mal à l'aise quand on veut imposer la liberté à coups d'interdits. On ne peut refuser à des femmes d'aller à la plage à cause d'une tenue, même si celle-ci relève d'un néofondamentalisme archaïque, et peut, à juste titre, choquer."
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans Le Journal du dimanche du 21 août