Réactualisation du 27 octobre, 15h : Alors que le dossier complet de Liliane Bettencourt va changer (enfin !) de tribunal - et que la nomination "obligatoire" d'un juge d'instruction (dès l'ouverture d'une information judiciaire) pour ces 4 enquêtes préliminaires ouvertes par le procureur de Nanterre Philippe Courroye pourrait être éphémère ou de très courte durée -, on attend la décision de la cour de cassation qui devrait statuer rapidement (au moins 10 jours de délai seront nécessaires) - et devrait dépayser la totalité de l'affaire, c'est de plus en plus compliqué ! De plus, il paraît fort probable que la juge Isabelle Prévost-Desprez perde définitivement la gestion du complément d'informations ouvert dans le procès contre François-Marie Banier pour "abus de faiblesse". Voire... plus ? En effet, une information judiciaire contre X a été ouverte hier par le procureur de la République de Versailles, Philippe Ingall-Montagnier, pour violation du secret professionnel ! Aïe... Un juge d'instruction va donc être nommé à Versailles pour enquêter sur cette violation du secret de l'enquête entre - bien qu'ils soient tous présumés innocents - les possibles protagonistes que sont Isabelle Prévost-Desprez et deux journalistes du Monde, dont Gérard Davet. C'est suite à une plainte de Maître Kiejman qui ne comprenait pas (ou trop bien ?) que la perquisition secrète chez Liliane Bettencourt, le 1er septembre au petit matin, se retrouve dès 13 heures dans les colonnes du Monde ! Philippe Courroye a également délenché une enquête qui a permis d'obtenir (légalement ou pas ?) les relevés téléphoniques des deux journalistes du Monde... Relevés dans lesquelles Isabelle Prévost-Desprez serait très souvent présente...
Depuis, on a appris que ce journaliste du Monde, Gérard Davet, s'était fait voler son ordinateur portable à son domicile, samedi 23 octobre, ainsi que son GPS (sur lequel sont enregistrés tous ses déplacements...), et que, le même jour, dans les locaux du Point cette fois, l'excellent journaliste Hervé Gattegno s'est fait voler son ordinateur de bureau qui était relié à une chaîne de sécurité, qui a été sectionnée par une pince coupante. Ce matin, révélation du site d'investigation Médiapart : eux aussi ont été victimes d'un vol, mais une semaine plus tôt, dans la nuit du 7 au 8 octobre. Ce sont deux ordinateurs portables et un disque dur externe (qui contenait, entre autres, des données confidentielles et surtout deux cédéroms regroupant les fameux enregistrements réalisés chez Liliane Bettencourt par son maître d'hôtel), qui ont été dérobés. En l'occurrence, des enregistrements dont la publication par Médiapart et Le Point (tiens donc !) ont fait rebondir ce dossier et donné une conotation politique à l'affaire déjà bien glauque...
A qui profitent les "crimes" ? On ne voit quand même pas des policiers devenir des voleurs d'ordinateurs en coupant à la cisaille la chaîne de sécurité ! Et puis les séries américaines comme Les Experts et autres nous ont appris qu'il suffit de deux secondes pour copier les données d'un ordinateur, faut pas nous prendre pour des jambons, hein, on regarde la télé, nous ! Alors c'est qui les pieds nickelés qui s'amusent à faire ces vols ? Vous pensez bien que toutes les copies et les sauvegardes sont faites ; donc une nouvelle diversion ? Mais de qui ?
A suivre... ce feuilleton passionnant !
Publié le 26 octobre, à 21 h : L'affaire mettant sous les feux de la médiatisation l'héritière du groupe L'Oréal, Liliane Bettencourt, pouvait-elle se compliquer davantage ? Il semble bien que oui en raison de la querelle de magistrats qui fait rage au tribunal de Nanterre !
Rappel des faits
Tout commence dès le mois de décembre 2008 : Françoise Bettencourt-Meyers, fille de Liliane Bettencourt - dont le mari vient de mourir -, remet en cause les donations que sa mère a faites au photographe François-Marie Banier, représentant la coquette somme de près d'un milliard d'euros. Elle a depuis tenté plusieurs fois de la mettre sous tutelle afin de prouver que sa mère a été victime d'abus de faiblesse, mais a été, jusque là, déboutée. Cette querelle familiale a ensuite pris une dimension politique qui la rend encore plus délicate.
En effet, François-Marie Banier a été visé par Françoise Bettencourt-Meyers pour abus de faiblesse. Cette plainte a été déposée directement auprès du Tribunal des Hauts de Seine et c'est la présidente de la 15e chambre correctionnelle de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez qui en a eu la charge. Coup de théâtre : des écoutes illégales de Liliane Bettencourt et certains de ses proches sortent dans la presse, notamment dans Mediapart et Le Point. L'affaire devient alors politique puisque le nom d'un ministre, Eric Woerth, et l'UMP, sont mis en avant.
Philippe Courroye, procureur de la République au Tribunal de grande instance de Nanterre, se saisit alors de ce dossier et ouvre au fur et à mesure des révélations et des investigations pas moins de quatre enquêtes préliminaires. La première porte sur l'atteinte à la vie privée comprenant un volet pour subordination de témoins à cause des enregistrements clandestins. La seconde s'attarde sur le financement politique illégal en raison des déclarations de l'ex-comptable de Liliane Bettencourt impliquant Eric Woerth. Celui-ci a entre-temps démissionné de son poste de trésorier de l'UMP. Troisième enquête, celle sur un soupçon de blanchiment dont également un volet ouvert sur un trafic d'influence (cela concerne la légion d'honneur remise à Patrice de Maistre, gestionnaire de la fortune de l'héritière de L'Oréal) mettant aussi en cause Eric Woerth. Enfin, la quatrième enquête porte sur une escroquerie et un abus de confiance sur le montage financier de l'acquisition par la famille Bettencourt de l'île d'Arros aux Seychelles.
La magistrate Isabelle Prévost-Desprez se saisit quand à elle du dossier dans le même temps (qui aurait dû être plaidé le 1er juillet) et obtient un supplément d'informations sur l'abus de faiblesse et fait des investigations de son côté, en raison de ces fameuses écoutes téléphoniques. Cependant, les investigations de Prévost-Desprez se télescopent avec les enquêtes préliminaires du tribunal de Nanterre, provoquant une nouvelle guerre entre Prévost-Desprez et Courroye, eux qui avaient pourtant travaillé ensemble par le passé, main dans la main. Aujourd'hui leur haine réciproque est terrible.
Querelle de magistrats
Un troisième protagoniste arrive : le procureur de la république de Versailles, Philippe Ingall-Montagnier. Le 22 octobre, il a pris des mesures pour que cessent tous ces conflits et que la justice puisse enfin s'appliquer sereinement. En effet, une nouvelle affaire s'est ajoutée : celle d'une possible violation du secret professionnel par Isabelle Prévost-Desprez qui aurait communiqué des informations à un journaliste du Monde (lequel ?) la veille et le jour même d'une perquisition surprise chez Liliane Bettencourt.
Le procureur Philippe Courroye a donc déclenché une enquête de police sur les fuites dans la presse, susceptible de conduire au dessaisissement de l'affaire de la magistrate Isabelle Prévost-Desprez. Le procureur Courroye a fait examiner les relevés détaillés de communications téléphoniques de deux journalistes du Monde pour porter une accusation de "violation du secret de l'enquête" contre Isabelle Prévost-Desprez. Ambiance !! Il est aidé dans son action d'une plainte de maître Kiejman, l'avocat de Liliane Bettencourt qui porte aussi sur la violation de secret de l'enquête.
Le procureur Philippe Ingall-Montagnier a pris alors trois décisions : il a demandé au procureur Philippe Courroye dont il est le supérieur hiérarchique d'ouvrir immédiatement une information judiciaire sur l'ensemble des enquêtes préliminaires. Philippe Courroye a pour obligation alors de nommer un juge d'instruction de Nanterre à qui il doit confier ses quatres enquêtes préliminaires et celles-ci vont alors lui échapper. Les avocats maîtres Kiejman et Metzner, respectivement ceux de Liliane Bettencourt et de sa fille, ont aidé Philippe Inglal-Montagnier dans cette mission afin de calmer le jeu et que la sérénité de la justice revienne dans cette affaire tentaculaire.
Deuxième décision : ce même procureur de la République de Versailles a demandé à la Cour de Cassation de bien vouloir dépayser les dossiers Bettencourt qu'il estime ne plus être lisibles, c'est-à-dire de les faire quitter le tribunal de Nanterre. Cela a pour conséquence dans un premier temps de retirer à Isabelle Prévost-Desprez les dossiers dont elle était en charge.
Ce n'est pas tout. Le procureur général de Versailles a également ouvert une information judiciaire contre X pour violation du secret professionnel. Un juge d'instruction va donc être nommé à Versailles pour enquêter sur cette violation du secret de l'enquête entre - bien qu'ils soient présumés tous innocents - les possibles protagonistes que sont Isabelle Prévost-Desprez et un journaliste du Monde. Il semble certain qu'elle ne récupèrera pas le dossier et cela pourrait aussi lui faire encourir des problèmes avec la justice. Le procureur Courroye reste lui au plus près du dossier même si le juge d'instruction qui sera en charge des enquêtes préliminaires est tout à fait libre de ses décisions. Mais le dépaysement demandé à la Cour de Cassation peut aussi toucher l'ensemble du dossier, qui pourrait donc ne pas rester entre les mains d'un juge d'instruction de Nanterre... Vous suivez ?
Pendant ce temps-là, Françoise Bettencourt-Meyers a actuellement déposé une troisième demande de mise sous tutelle de sa mère tandis que Liliane Bettencourt, excédée par cette situation, a porté plainte à son encontre pour violences morales.