Derrière les pelouses verdoyantes et les pavillons dorés de la banlieue américaine, Wes Bentley représentait l'une des facettes de cette American Beauty (1999) scrutée par Sam Mendes et écrite par Alan Ball (Six Feet Under).
Caméra au poing et regard de fauve, cet adolescent désaxé était l'une des seules lumières qui émergeait d'un paysage de douce désolation où la vision d'un sac plastique en apesanteur sonnait comme un instant de poésie crépusculaire. Derrière ces yeux de chien battu, l'étrange Wes Bentley entrait dans la cour hollywoodienne par la porte oscarisée, aux côtés de la non moins envoûtante Thora Birch.
Treize ans plus tard, les deux amants adolescents sont passés sous les radars du septième art. Tandis que l'actrice cumule les films de seconde zone depuis Ghost World (2001), Wes Bentley ressort d'une décennie bancale avec un rôle dans Hunger Games, un film-phénomène d'ores et déjà condamné à combler le vide laissé par la fin de Twilight dans le coeur des adolescents. Aux côtés du président d'une Amérique totalitaire et tordue, il incarne un people du futur, "un technicien fou, producteur de TV réalité, playboy du Capitol et célébrité".
À 33 ans, Wes Bentley est le premier à parler de comeback. Dans Flaunt, il explique avoir traversé une période noire après le succès d'American Beauty, plombé par la drogue et l'alcool. Emporté par Hollywood, l'acteur tourne Frères du désert (2002), une superproduction avec Heath Ledger et Kate Hudson, soldée par un échec cuisant - 29 millions de recettes pour 35 de budget.
Disparu pendant quelques années, il revient dans Ghost Rider (2007) avec Nicolas Cage, un film d'action entré au panthéon des blockbusters kitsch. Partagé entre les studios et le cinéma indépendant, il s'illustre en psychopathe dans 2ème sous-sol (2007) et dans le méconnu The Last Word (2008), où il est payé pour écrire les derniers mots des suicidés et tombe amoureux de Winona Ryder - une autre actrice boudée par Hollywood.
Malchanceux ou très mauvais joueur, il est victime du casse Jonah Hex (2010), le western avec Josh Brolin et Megan Fox encore inédit en France, et de la série Tilda (2011) avec Diane Keaton et Ellen Page, annulée prématurément après de nombreux désaccords entre la créatrice et la chaîne. There Be Dragons (2011), le film de guerre de Roland Joffé, est de son côté encore perdu dans les limbes des distributeurs.
Mais le vent semble avoir tourné. Après une apparition éclair dans Underworld : Nouvelle ère (2012), Wes Bentley devrait redorer son blason avec Hunger Games, premier volet d'une trilogie annoncée. Dans les prochains mois, il croisera Amanda Seyfried dans le thriller Gone et le biopic sulfureux de Lovelace.
Longtemps oublié, le comédien a retrouvé sa force : "Je me sens véritablement bien et il y avait une raison pour que je ne ressente pas cela quand j'étais plus jeune (...) Je suis content de pouvoir réaliser ça après ces années de désordre. J'attendais le bon moment, et il est arrivé".
Hunger Games, en salles le 21 mars.
Geoffrey Crété