En décidant de parler à visage découvert en couverture de Libération en novembre 2021, Hélène Devynck a permis, avec d'autres femmes courageuses, de porter un autre regard sur l'affaire PPDA. L'ex-star du JT de TF1 était dénoncé ouvertement comme un terrible prédateur sexuel par plusieurs personnes venues de milieux différents, relayant la parole de l'écrivaine Florence Porcel qui a été la première à porter plainte contre lui. Mais en choisissant de s'exprimer, elles ont aussi reçu un flot d'attaques. Hélène Devynck, ancienne journaliste, a signé un livre-enquête Impunité dont elle parle dans les colonnes du Parisien. Un ouvrage qu'elle a rédigé en recevant un flot d'attaques.
Le Parisien a rencontré cette femme qui a osé s'en prendre, avec d'autres "soeurs de misère", à l'homme le plus influent du PAF. Patrick Poivre d'Arvor était, il y a quelques mois seulement, une icône française, que tout le monde a regardé quotidiennement dans son salon durant des années. Alors quand elle a expliqué faire partie, comme Florence Porcel, des victimes de cet influent journaliste et présentateur, elle sera accusée d'être "semi-consentante". Les qualificatifs qu'elle reçoit en disent long sur la difficulté à faire changer le regard : "pas une oie blanche", "star-fuckeuse" ou "écervelée"... Être féminine a suffi à discréditer sa parole.
L'ouvrage d'Hélène Devynck révèle un système où "la violence misogyne était servie par une organisation fondée sur l'abus de pouvoir et l'intimidation". Patrick Poivre d'Arvor aurait pu mettre en place sa stratégie d'agression régulière avec un entourage professionnel qui ne voit rien, ou ne veut rien voir, comme a pu aussi le raconter l'autrice Bénédicte Martin.
Face à ces murs auxquelles les accusatrices font face, il reste la force et le choc des mots. Dans son livre, les descriptions glauques et sordides hantent et marquent. L'autrice décrit un "pénis très étroit", raconte son propre viol et cite les "quelques allers-retours" du violeur en action. Le Parisien résume ainsi : "C'est sale, comme cet homme sans un mot, sans un regret, sans gêne." La chute de la légende cathodique est en cours, mais elle a un prix auprès de ces femmes qui doivent tout dévoiler sans fard et se mettre dans une position aussi fragile pour qu'on les croit.
"Le classement sans suite a démontré la banalité de l'impunité", a estimé Hélène Devynck auprès de l'AFP. "On a eu l'impression qu'on nous mettait à la poubelle, comme si on n'avait pas parlé, comme si on n'avait rien fait. J'ai voulu raconter cette histoire", explique-t-elle. A ses yeux, l'affaire PPDA ne peut se résumer à "un homme" : l'autrice questionne la responsabilité de TF1, et un "système criminel" entretenu par une culture du silence, teintée de complaisance ou d'indifférence.
L'homme de 74 ans et père de 7 enfants a lui porté plainte en retour pour dénonciation calomnieuse. Au mois de juillet dernier, l'enquête visant l'ex-animateur star de TF1 a changé d'approche, les juges analysant désormais les accusations de viol qui lui sont reprochées dans leur ensemble pour déterminer leur éventuel caractère sériel, qui permettrait de contourner leur prescription. L'affaire PPDA est donc loin d'être terminée.
Patrick Poivre d'Arvor est présumé innocent des faits qui lui sont reprochés jusqu'à la clôture définitive du dossier.
Impunité, d'Hélène Devynck, éditions du Seuil.