Catherine Deneuve est une actrice à part, fascinante, déroutante, surprenante. À 69 ans, la grande Dame (un mot "affreux" pour elle) du cinéma français n'a pas encore poussé la porte de la retraite. À une filmographie déjà fantastique et immense, Catherine Deneuve ne cesse d'ajouter oeuvre sur oeuvre. La dernière en date, Elle s'en va, d'Emmanuelle Bercot où elle joue une sexagénaire qui plaque tout sur un coup de tête, a permis à Première de rencontrer l'actrice... pour une interview déjà mythique.
Au fil des questions, c'est une Catherine Deneuve au naturel que l'on découvre. Taquine, vanneuse, directe, sans concession, Catherine Deneuve n'y va pas par quatre chemins. Les interviews ? "C'est un exercice très ingrat [...] et puis je trouve qu'on parle peu de cinéma en général, donc oui, ça me fatigue", sauf que là, "il faut quand même assurer le service après-vente" pour Elle s'en va. Son statut de grande Dame ? "C'est affreux. C'est comme si on n'attendait plus rien de vous, comme si vous aviez déjà donné le meilleur de vous-même." Lassée ? Assurément. Mais attention, rien à voir avec la nonchalance de Bruce Willis, Catherine Deneuve attend la personne qui débutera une discussion, pas un échange formel.
Et en ce sens, le journaliste de Première ne va pas faillir. Les vannes sont ouvertes, Catherine Deneuve peut y lâcher ses piques. Tout le monde y passe. Alain Delon, par exemple, qui "se croit détenteur de la vérité", qui "trahit un regard très désabusé sur le cinéma", ou encore la jeune génération et les deux amis Gilles Lellouche et Jean Dujardin qui passent à la mise en scène, un acte "complètement aberrant" pour celle qui assure que "réaliser, c'est bien plus que savoir faire un champ-contrechamp".
Après, à elle de s'étonner de "cette image de femme sophistiquée, glaciale". "C'est une telle erreur, c'est tellement mal me connaître", poursuit celle qui trouve "infernal d'être jugé sur son physique et sur son apparence". Durant toute sa carrière, Catherine Deneuve et son physique – passé de celui de femme fatale, ténébreuse ou érotique à dame sophistiquée et froide – en auront vu de toutes les couleurs, notamment au cinéma. Du haut de ses expériences, Catherine Deneuve conserve un sens aigu de l'observation et n'hésite pas à juger le cinéma d'aujourd'hui, et notamment cette manière de filmer les actrices, d'utiliser la photographie : "Avant, c'était une priorité de bien filmer ses stars. Il fallait que ce soit beau à voir. De nos jours, c'est une expression qui n'a plus aucun sens sur un plateau. [...] Le vocable a changé. On cherche des 'gueules', des 'visages émouvants', des 'corps singuliers'. La beauté appartient au passé."
Enfin, si elle assure ne pas aimer "critiquer publiquement les films ou les gens", elle n'en dézingue pas moins à tout-va, de son pire film (Mes stars et moi, de Laetitia Colombani en 2008) à ses expériences internationales. En ligne de mire, Il était une fois La Légion (Dick Richards, 1978), où elle croise le chemin du futur grand producteur Jerry Bruckheimer, mentor de Tony Scott. Elle se souvient d'un réalisateur "qui nous a beaucoup roulés dans la farine" mais également d'une production "intimidante et complètement déshumanisée". Derrière, c'est Gene Hackman, l'acteur principal du film, qui en prend pour son grade, Deneuve évoquant un "acteur américain très désagréable", doté d'un "caractère de cochon".
Ce qui ressort de cet entretien venu de nulle part et où le film Elle s'en va n'a finalement été évoqué que dans une seule question, c'est que la fascinante Catherine Deneuve a beaucoup à dire, telle une source intarissable, habitée par l'amour du cinéma et la franchise.
Interview à retrouver en intégralité dans le Première de septembre.