Il ne faut pas être plus royaliste que le roi, mais de là à se contenter d'un couronnement a minima... Malgré l'austérité qui la frappe, l'Espagne (du moins, sa portion favorable à la monarchie) ne semble pas prête à ce que la crise contamine la passation de pouvoir, qui s'annonce des plus sobres, entre le roi Juan Carlos Ier, qui abdiquera le 18 juin, et son héritier le prince Felipe, qui prêtera serment le lendemain.
Le minimum... mais le maximum
De nouveaux détails sur le déroulement de l'avènement du prince des Asturies en tant que roi Felipe VI ont été révélés, à moins d'une semaine de l'impulsion de cet "élan de renouveau" que le monarque déclinant a souhaité pour sa nation, lors de l'annonce le 2 juin dernier de sa décision d'abdiquer, après 39 ans de règne. Des détails certes, mais pas anecdotiques : si on savait déjà que l'intronisation du prince héritier ferait l'économie d'une cérémonie religieuse et d'un grand raout de têtes couronnées internationales, on apprend que sa prestation de serment, le 19 juin à partir de 10h30 devant députés et sénateurs réunis au Congrès, à Madrid, se fera sans le roi Juan Carlos. Une absence toute symbolique, dans le but avoué de "donner au maximum le rôle principal au nouveau roi". Il aura toutefois mené auparavant, au palais de la Zarzuela, une cérémonie au cours de laquelle il aura remis à son héritier l'écharpe de chef suprême des armées.
L'autre absence notable lors de cet acte solennel était plus que prévisible : l'infante Cristina, mise en examen ainsi que son mari dans une affaire de détournement de fonds (le scandale Noos) et résidant désormais à Genève, est persona non grata, écartée depuis deux ans des activités officielles de la famille royale. En revanche, la reine Sofia, la princesse Letizia, la princesse Leonor - qui deviendra à cette occasion, à 8 ans, la nouvelle princesse héritière (la plus jeune d'Europe) - et sa petite soeur la princesse Sofia, l'infante Elena, ainsi que les infantes Pilar et Margarita, soeurs de Juan Carlos et tantes du nouveau souverain, seront au premier rang de l'assistance lorsque Felipe VI sera proclamé et prêtera serment, puis fera le discours fondateur de son règne, après qu'aura retenti l'hymne national.
Toutefois, le souverain bientôt à la retraite accompagnera ensuite le nouveau couple royal, le roi Felipe VI et la reine Letizia, lorsqu'ils apparaîtront au balcon du palais d'Orient, au terme d'une procession en voiture à travers les principales rues de la ville depuis le Parlement, afin de saluer les Madrilènes pour leur prise de fonction. Un défilé militaire aura alors lieu, avant une réception donnée au palais par le roi Juan Carlos Ier et la reine Sofia. Voilà qui devrait satisfaire les royalistes en manque de fastes.
Vers la fin...
Le Conseil des ministres réuni autour du chef du gouvernement Mariano Rajoy vient d'approuver le décret royal concernant le traitement des titres et des honneurs suite à l'avènement du nouveau monarque. Notablement, Juan Carlos et Sofia resteront titrés roi et reine, et la princesse Leonor sera titrée princesse des Asturies (elle recevra également les autres titres octroyés à l'héritier de la Couronne).
Le règne de Juan Carlos Ier, plombé depuis trois ans par les soucis de santé et les affaires, s'achève dans l'émotion. Jeudi, pour l'une de ses dernières audiences, il recevait Adolfo Suárez Illana, fils de son grand ami et allié dans la transition démocratique du pays après la dictature franquiste, Adolfo Suarez, dont la mort au mois de mars l'a bouleversé. Le fils de celui qui fut le grand artisan de la démocratie espagnole venait au palais de la Zarzuela rendre la Toison d'or qui avait été donnée à son paternel (une prestigieuse distinction rétrocédée au décès de son possesseur). Les deux hommes se sont tombés dans les bras avec effusion, d'autant plus qu'Adolfo Suarez Illana se remet progressivement après avoir été opéré avec succès d'un cancer - une mauvaise nouvelle tombée juste après la disparition de son père.