Triste coïncidence, le soir-même de la tuerie de Toulouse - dont on ne doute pas qu'elle est de nature xénophobe - lundi 19 mars, la cérémonie Y'a Bon Awards, qui tend à combattre le racisme, s'est déroulée au Cabaret Sauvage à Paris.
La cérémonie est destinée à décerner avec humour des awards à ceux qui tiennent les propos les plus racistes et les plus dénués d'humour, pour épingler un système qui continue à diviser en alimentant les préjugés surfant sur les peurs racistes à des fins politiques. Et pour cette quatrième édition, les people étaient nombreux au rendez-vous.
Présidé par Gilles Sokoudjou, président de l'association Les Indivisibles, le jury 2012 comptait parmi ses membres la journaliste Florence Aubenas, le sociologue Jean Baubero, les journalistes Abdelkrim Branine, Frédéric Martel et Sébastien Fontenelle. A leurs côtés, se tenaient également l'ancien footballeur Bernard Lama, la romancière et réalisatrice Faïza Guene, la sociologue Nacira Guenif, l'historien Olivier Le Cour Grandmaison, le romancier Alain Mabanckou, la civilisationiste Maboula Soumahoro...
Quant aux acteurs et chanteurs qui peuplaient ce jury, c'est sur Jalil Lespert, le compagnon de la belle Sonia Rolland, la superbe Aïssa Maïga et les rappeurs Youssoupha et Mokobe (113) qu'il fallait compter.
Dans l'assistance, la chroniqueuse China Moses, du Grand Journal de Canal+, l'acteur haïtien Jimmy Jean-Louis, le brillant journaliste Raphäl Yem qui présentait la soirée, la journaliste et romancière Rokhaya Diallo, l'ex-championne du monde de boxe devenue écrivain Aya Cissoko, la femme politique Clémentine Autain, l'historien François Durpaire et le journaliste Frédéric Royer, enfin, ont pris part à la cérémonie.
C'est donc sous les rires du public qu'ont été dévoilés les résultats des votes. Dans la catégorie "50 Minutes Inside la tête d'un people qui aurait mieux fait de se taire.", c'est l'écrivain Richard Millet qui a reçu le Y'a bon Award pour ces propos tenus dans Ce soir ou jamais le 7 février dernier sur France 3 : "Je prends quotidiennement le RER, pour moi, la station Châtelet-Les Halles à 6h du soir, c'est le cauchemar absolu, surtout quand je suis le seul Blanc. Est-ce que j'ai le doit de dire ça ou pas ? [...] J'ai une douleur, je ne me reconnais plus. Je ne supporte pas les mosquées en France, je le dis, je ne peux pas voir ça en peinture."
Ensuite, c'est le prix "Enquête exclusive, en partenariat avec le journal Minute" qui a été remis à Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L'Express pour : "L'affaire du Quick halal vient après l'affaire de la burqa, après l'affaire des minarets. A chaque fois, c'est la même chose. La République laïque doit résister [...] Il faut dire non à tout cela" dans un édito du 18 février 2010.
Ex aequo avec Christophe Barbier pour ce prix, c'est Sylvie Pierre-Brossolette, rédactrice en chef au Point, qui s'est fait remarquer pour ses écrits à propos de l'affaire Dominique Strauss-Kahn : "Quelle image donnons-nous au monde quand les télévisions de la planète entière montrent un prestigieux Français pénétrer dans le tribunal de New York, piteux, mal rasé et toujours menotté, pas mieux traité que les malfrats de couleur déférés avant et après lui devant le juge ? C'est ravageur" (article publié le 19 mai 2011 sur le site du Point.fr).
Le prix "Les Experts Chronikers" a été décerné à Caroline Fourest, chroniqueuse au Monde et à France Culture, qui a dénoncé dans la Convention du PS sur l'égalité réelle, le 11 décembre 2010 : "Des associations qui demandent des gymnases pour organiser des tournois de basket réservés aux femmes, voilées, pour en plus lever des fonds pour le Hamas."
Le prix "L'opposition qui ne s'oppose pas vraiment, en fait..." a été attribué à Françoise Laborde, sénatrice du Parti radical de gauche. Auteur de la loi visant à interdire aux nounous de porter le voile (loi votée par le Sénat, donc le PS), elle s'explique après avoir entendu des réactions d'opposition des auditeurs de Radio Orient, le 19 janvier 2012 : "Et j'ai bien compris que j'inquiétais, que je perturbais et que j'étais une islamophobe. Bon ben voilà, et j'assume."
Pour finir, c'est un prix d'honneur qui a été remis à l'UMP pour son esprit d'équipe et cinq années de bons et loyaux efforts au service du racisme.
Bien évidemment, tous les lauréats furent invités à cette cérémonie, mais aucun n'a réagi et, surtout, aucun ne s'est déplacé...
N. Derrstroff