À 83 ans, Jean-Paul Belmondo se raconte dans Mille vies valent mieux qu'une. Il est bien placé pour savoir, lui qui a eu au moins mille vies au cinéma comme en dehors de l'écran. Acteur aux quelque 80 longs métrages et dont bon nombre sont devenus cultes, Bébel a vécu une foultitude d'aventures. Pourtant, la plus récente, aurait pu virer à la tragédie : un AVC en 2001, dont il s'est quasiment remis aujourd'hui. Dans une longue et belle interview accordée au Journal du dimanche (édition du 6 novembre), il évoque ce défi et sa victoire contre les médecins, mais aussi contre le destin.
"La rééducation a été très longue, confie-t-il après s'être félicité d'avoir fait mentir les médecins qui prédisaient notamment qu'il ne retrouverait jamais la parole. Il a fallu beaucoup de volonté, j'avais tellement envie de m'en sortir. Après cet accident horrible, je n'ai pas pu parler pendant deux ans." Et d'ajouter : "Aujourd'hui, je voudrais dire à ceux qui ont subi un AVC de garder espoir, de ne pas se laisser abattre."
Pourtant, s'il a retrouvé la parole et marche presque bien, Jean-Paul Belmondo traîne encore son accident cardiaque comme un boulet. "Le théâtre me manque, déplore-t-il. Remonter sur scène est un fantasme, ma jambe, que je bouge difficilement, me l'interdit. " Si Bébel n'est plus sur les planches ou les écrans du cinéma – excepté le documentaire de son fils Paul, Belmondo par Belmondo, qui retraçait sa carrière avec des morceaux choisis – il n'en reste pas moins occupé, entre des déjeuners, des sorties culturelles et ses amis. "On se voit, on se téléphone, on se parle tous les jours. Il faut savoir prendre les bons côtés de l'existence", souligne-t-il à propos de Marielle, Rochefort, Bedos, ses grands amis qui sont encore vivants. Alain Delon est également de ceux-là, mais avec lui, c'est forcément particulier. En cause, non pas l'embrouille judiciaire autour de Borsalino, mais des raisons politiques. "Je ne parle jamais de politique avec Alain. Nous évitons", assure Belmondo avec qui il échange sur bien d'autres sujets.
Pêle-mêle, "Le Magnifique" passe d'un sujet à un autre, invité par Danielle Attali à s'exprimer sur tout et n'importe quoi. Il avoue par exemple ne pas avoir vu Brice 3 (et confie bien aimer Jean Dujardin, "un héritier" à ses yeux), raconte comment il a failli se briser et perdre la jambe dans Le Magnifique, fait part de ses inquiétudes pour la France, narre sa rencontre avec Godard ou se remémore l'accueil glacial de L'As des As. "J'en rigole aujourd'hui, mais c'était terrible, se souvient-il. On nous a accusés de voler les entrées à Une chambre en ville de Jacques Demy. C'était tellement injuste ! Ça n'avait aucun sens. Le public m'a suivi, son affection me touche, c'est ce qui comptait et qui compte toujours." Dans la même veine, il revient sur ses déboires cannois et notamment la projection de Stavisky, film d'Alain Resnais, en 1974. "Nous avons monté les marches avec Laura Antonelli sous les flashs des photographes, et nous les avons redescendues sous les sifflets et les huées", se rappelle le vétéran du cinéma français.
Interview à retrouver en intégralité dans Le Journal du dimanche du 6 novembre 2016.