Jean Rochefort s'en est allé le 9 octobre à 87 ans, laissant derrière lui environ 130 prestations dans des films pour lesquels il a été récompensé aux César – Que la fête commence et Le Crabe-tambour – et qui ont brillé au box-office : on citera ainsi Le Placard, Le Château de ma mère, Cartouche ou plus récemment Ne le dis à personne. L'acteur a la fameuse moustache jouissait d'une immense popularité, nourrie par son talent, son élégance, sa bienveillance et son humour. Pour son fils Pierre, né de son couple avec Nicole Garcia, le comédien était aussi un homme complexe et multiple. En effet, la casquette d'acteur lui sied parfaitement, mais il possède aussi d'autres visages...
"Successivement cavalier, propriétaire, éleveur, dirigeant et commentateur à succès, Rochefort ne quitta plus le monde équestre, le cinéma devenant parfois seulement un moyen de financer sa passion. Il parlait alors de ses fameux films 'avoine', des nanars vite oubliés mais rémunérateurs", écrit Stéphane Kohler dans L'Équipe. Décrivant la passion de l'acteur pour ses chevaux, Céline Nony, journaliste dans le même journal, raconte qu'il est devenu en 2001 président d'honneur de la fédération française d'équitation. Un goût pour le sport équestre qui lui venait de son grand-père, cocher à Dinan. "L'animal me bouleversait par sa féminité, son élégance", disait-il à L'Équipe en 2003. Cette passion, il l'a transmise à sa fille Louise, dont la mère est sa veuve Françoise Vidal, et l'a partagée avec son grand ami Guillaume Canet.
Bien que dandy et gentleman, Jean Rochefort n'avait pas peur de dire ce qu'il pensait. Il avait ainsi pris position contre les corridas en soutenant les opposants à la tauromachie et en devenant membre du comité d'honneur de l'Alliance Anti-corrida. Il avait alors écrit : "Je tenais à vous dire que je partage votre combat et que je suis à 100% avec vous. La corrida n'est en rien un combat d'égal à égal : le taureau se bat contre le chiffon rouge pendant que le torero, lui, combat l'animal !"
Dans le show business, Jean Rochefort était loin également d'avoir un discours politiquement correct, taclant dans Le Progrès "l'ange gardien" de TF1, Mimie Mathy, "notre grande artiste populaire" : "Vous avez déjà regardé Joséphine, ange gardien ? Je m'en suis tapé un en entier. C'est pas possible, elle assassine nos contemporains". Plus tard dans Le Figaro Magazine, il s'était attaqué aux humoristes : "Il y a eu l'arrivée des acteurs de one-man show, qui sont destructeurs de situation. Ils jouent toujours en étant conscients que la caméra les filme."
Papa de cinq enfants, Jean Rochefort a tenu le rôle que les bambins des années 1980 ont tous gardé en mémoire : celui de présentateur des Aventures de Winnie l'Ourson du Disney Channel sur FR3 et sur des disques. Sa voix rassurante a bercé l'enfance de nombreux Français. À partir de 1987, il a été remplacé par Vincent Perrot. Plus récemment, il avait usé de son beau timbre pour Jack et la Mécanique du coeur, se glissant dans la peau de Georges Méliès.
Le "Boloss"
L'acteur au phrasé parfait, fin et drôlissime, s'était prêté à un exercice on-ne-peut-plus truculent pour Les Boloss des Belles Lettres. Tout commence par un Tumblr de Quentin Leclerc et Michel Pimpant qui réinventent les grands classiques de la littérature en utilisant l'argot des quartiers. Le tandem réussit à attirer l'attention de Jean Rochefort qui revisite Madame Bovary de Gustave Flaubert. Si si ! Et force est de reconnaître qu'il maîtrisait le flow comme personne.