Mardi soir, l'équipe de France de natation s'inclinait lourdement dans une de leurs catégories favorites, le relais 4x200 m libre. Emmené par Jordan Pothain, Grégory Mallet, Lorys Bourelly et Damien Joly – un nageur de 1500 m libre qui a remplacé Yannick Agnel au pied levé à la demande de la DTN –, le quatuor avait été éliminé dès les séries avec le 14e temps sur 16, alors que leurs prédécesseurs avaient été vice-champions olympiques à Londres en 2012.
Après la course, les langues se sont déliées, notamment pour Jordan Pothain, qui n'a pas mâché ses mots, s'en prenant directement à Yannick Agnel. "Yannick nous a abandonnés en disant qu'il était malade il y a deux jours (dimanche, après son élimination en séries du 200 m). Ça a été une grosse claque pour nous. Puis il est revenu, puis finalement il nous redit qu'il ne pourra pas nager, raconte le nageur français à L'Équipe. On met en place une stratégie pour combler le vide comme on peut. On avait essayé de se remobiliser en se disant qu'on pouvait aller chercher quelque chose. Ça a été une fierté de partager ce relais avec Greg, qui va sans doute arrêter là-dessus, et Lorys qui est, comme moi, fort investi dans ce relais."
Le champion, qui était en froid avec Agnel depuis un imbroglio sur un chrono aux championnats de France (Pothain avait terminé deuxième devant Agnel, mais un problème de chrono avait créé un imbroglio et la Fédération a ensuite repêché Agnel pour une place en individuel), n'hésite pas à parler d'un "tissu de mensonges". "Je ne sais pas s'il est vraiment malade, je ne saurai pas vous le dire, mais j'ai été malade à Londres (en mai) et pas une demi-seconde je n'ai pensé à abandonner le relais, alors que ce sont des Championnats d'Europe. Là on est sur l'événement sportif majeur d'une carrière, ou même d'une fin de carrière, et on se fait lâcher à quelques heures de cette course", clame Pothain, pointant du doigt "beaucoup de malhonnêteté et peu de franchise" de la part d'Agnel envers ses coéquipiers et lui-même. "On a été bernés", conclut-il, entre tristesse et colère.
On a eu une explication derrière...
Évidemment interrogé sur cet abandon, Yannick Agnel (qui a pris sa retraite internationale à 24 ans, après son humiliation) a expliqué mardi à la presse que ce n'était pas lui qui avait pris la décision de ne pas nager le relais. "C'est la DTN qui a fait le choix de mettre Damien Joly à ma place. Souffrant ou pas, je voulais nager. Même à 40 de fièvre, je me serais défoncé, argue Agnel. Ceux qui me connaissent savent que je n'ai jamais lâché personne, ni abandonné personne, et encore moins mon équipe."
Champion olympique 2012 du 200 m libre, Agnel souffrait d'une sinusite depuis deux jours. Mais loin de parler avec aigreur, le nageur nîmois croit savoir que "Jordan a parlé sous le coup de l'émotion et de la déception", ce qu'il peut "comprendre mais ce ne sont pas des paroles à prendre à la lettre". "On a eu une explication derrière, ses mots ont dépassé sa pensée", a-t-il tempéré, regrettant surtout le manque de communication avec la DTN : "Je me suis réveillé, ils étaient tous dans la chambre avec le regard noir. La décision a été prise sans moi, sans me consulter. Tout le monde est un peu fautif. On s'est tous vu cet après-midi (mardi), on a crevé l'abcès, on a mis les choses à plat", a-t-il conclu, surenchérissant sur Twitter : "Que les choses soient claires. Je n'ai jamais lâché mon équipe. La DTN a pris la décision de ne pas m'engager, je voulais nager. Point."