Avant son retour à Paris pour promouvoir l'album Rester vivant et donner les concerts des Vieilles Canailles, Johnny Hallyday a reçu chez lui à Los Angeles le magazine Télérama. Deux jours durant, celui que nos confrères appellent "le rockeur originel français" s'est confié avec sincérité. De l'absence du père à cette enfance trimballée entre Londres, Genève ou l'Espagne, Johnny évoque tous les sujets avec pudeur. Y compris celui de son coma en décembre 2009.
Depuis qu'il a frôlé la mort, Johnny Hallyday est remonté sur scène dès qu'il en avait l'occasion. Il a surtout sorti trois albums très rock, très ancrés dans le blues : le mal-aimé Jamais seul, l'acclamé L'attente qui a fait l'unanimité et, le 17 novembre, Rester vivant dont les premiers retours sont excellents. Sur ce disque, produit par Don Was, Johnny "chante remarquablement, comme apaisé, se faisant du coup plus émouvant", selon Télérama qui lui décerne trois étoiles. Les ennuis de santé de Johnny ne sont pas étrangers à ce retour aux sources : "Ma vie a été un tunnel de souffrance où je ne me sentais pas toujours en accord avec moi-même, vivant au jour le jour, tenaillé par la peur du lendemain. Longtemps, surtout chez Universal, j'ai été poussé à faire des disques dont la seule finalité était le potentiel commercial. Ça m'a moralement anéanti, révèle le chanteur. Je ne veux pas être catalogué chanteur de variétés. C'est tout ce que je ne suis pas. À mon âge, j'ai décidé de revenir à ce que j'aime depuis toujours : le rock. Fini les compromis. C'est le seul moyen d'être heureux. Rien de cela n'était clair dans ma tête jusqu'à mon accident, il y a cinq ans. J'ai passé trois semaines dans le coma. À mon réveil, quelque chose a basculé."
Si Johnny Hallyday n'a pas toujours fait du rock'n'roll, on peut dire que sa vie, elle, l'a toujours été. Johnny a côtoyé toutes les idoles, de Jimmy Hendrix à Jim Morrison. Il en a même épousé une, Sylvie Vartan, qui lui a donné David. Dans Télérama, le rockeur raconte des anecdotes savoureuses sur ses pairs. "Dans les années 1960, je traînais pas mal avec Keith Richards et Anita Pallenberg, dont j'étais proche. On sortait presque tous les soirs ensemble, chez Castel, jusqu'au bout de la nuit... On finissait en prenant le petit-déjeuner dans ma Rolls." Johnny a aussi accueilli chez lui Bob Dylan qui fuyait la foule qui l'attendait à son hôtel. "Drôle de gars. Un artiste et un poète génial, mais bizarre", se souvient Johnny qui ne comprend toujours pas pourquoi Dylan passait son temps à "écouter ses propres disques".
Avec Jacques Brel dans les années 1970, Johnny a également beaucoup guinché... dans les bordels. "Il ne touchait jamais aux filles, mais, dans tous les bordels de France, les filles connaissaient Jacques. Il leur offrait le champagne, buvait avec elles." Brel venait chercher l'idole des jeunes avec son petit avion, l'emmenait prendre le petit-déjeuner, faire la bringue, le ramenait à temps pour le concert du soir avant de l'embarquer de nouveau. "Au bout d'une semaine, se souvient Johnny, j'étais lessivé. Mais lui tenait le coup. Et je ne vous parle pas de Depardieu. Un cheval, un buffle... Personne ne peut suivre."
Télérama, en kiosques le 29 octobre 2014.