Réactualisation : Des flous, des reflets, des ombres et des éblouissements, une silhouette évanescente, une voix forte : quelques jours après avoir proposé au public son convaincant premier single en tant que chanteuse, I.C.U., Lou Doillon en dévoilait il y a quelques heures le clip. Tout y est fait pour préserver l'atmosphère vaporeuse et intimiste nourrie de nostalgie de ce premier morceau, l'incertitude des contours et la brume qui envahit l'écran respectant bien la belle mélancolie dessinée par les amples phrases musicales. A l'oreille autant qu'au regard, un chic travail, sans esbroufe et touchant. L'EP I.C.U. sera disponible le 11 juin en digital, avant un album en septembre, réalisé et arrangé par Etienne Daho et mixé par Zdar.
Publié le 17 avril 2012 : Sa demi-soeur Charlotte Gainsbourg est passée à l'IRM (son avant-dernier album, en 2009), elle dégaine un single titré d'un acronyme presque aussi chirurgical, I.C.U. (prononcer et comprendre : "I see you"), cautionné par un entourage tout aussi pointu (la première avait Beck, la seconde a Etienne Daho et Zdar). Et la comparaison s'arrête là.
Lou Doillon chante d'une voix pleine, méconnaissable aussi, pour son entrée officielle dans le monde de la musique. Quelques années après avoir commencé à noircir des cahiers et des portées avec son ami Chris Brenner (musicien qui avait formé à la fin des années 1990 avec Milla Jovovich - amie de Lou, qui l'avait même fait poser pour sa collection chez Mango - l'éphémère groupe Plastic Has Memory), composant notamment une chanson (The Girl is Gone) diffusée par la revue arty Visionaire, la fille du cinéaste Jacques Doillon et de Jane Birkin dévoile avec I.C.U. une passion secrète qu'elle cultive depuis longtemps. La chanson annonce un EP éponyme à paraître le 11 juin 2012, point de passage pour un album qu'on découvrira en septembre.
Ballade downtempo hantée par un fantôme du passé, acteur et témoin d'un songwriting que Barclay annonce "fortement autobiographique", I.C.U. (en écoute dans notre player, avec la complicité de nos amis de PureCharts) débute dans un lent et ample piano-voix embrumé, à l'image de ces réveils émotionnellement difficiles décrits en préambule ("I wake up some mornings (...) slow and heavy, from dreams with you"), révélant une voix sans âge, marquante, pleine de caractère. A mesure que l'héroïne de la chanson se confronte à son manque ("After all this years, I miss you the same"), la partition enfle, épaissit, comme pour accompagner ce mouvement de l'âme : d'abord des pincées de batterie, puis une guitare acoustique, une basse à la première intervention du refrain, simple, puissant. Et... plus rien. Cinq secondes de blanc, de vide, de doute. Un fantôme. Puis le vague à l'âme reprend où il en était resté, et déferle, accompagné dans un final étourdissant de violons et de cuivres posés sur une guitare électrique en sourdine.
Vingt-trois ans après ses débuts dans Kung-Fu Master d'Agnès Varda, Lou Doillon, très en vue en 2011 dans le rôle-titre saisissant de Gigola et dans le feuilleton télé L'Epervier (Stéphane Clavier pour France 3), honore une certaine tradition familiale en élargissant son champ d'action : à ses activités publiques d'actrice, mannequin, créatrice et photographe, la maman d'un jeune Marlowe (9 ans) né de ses amours passées avec le musicien Thomas-John Mitchell, ajoute au grand jour celle de musicienne, comme sa mère Jane Birkin et sa demi-soeur Charlotte avant elle.
Pour cette nouvelle aventure, elle a réussi à s'attirer, à la faveur de ses premières compositions, le parrainage de bon augure d'Etienne Daho, mentor qui l'a encouragée à se lancer, mais aussi réalisateur et arrangeur de ce premier album, ainsi que celui du génial Philippe Zdar (Phoenix, The Rapture), commis au mixage. Le maestro de Cassius a même déjà émis une louange cosmique quant à ce projet : "Entre Etienne Daho, qui signe peut-être sa meilleure réalisation, et Lou Doillon, c'est comme s'il y avait eu un alignement de lunes."
De ce point de vue, I.C.U. est déjà une fulgurante mise sur orbite.
G.J.