Après le coup de gueule et la menace, le satisfecit euphorique et les promesses. Précédemment dans une impasse fiscale pour le tournage en France de son prochain film Valerian, superproduction dotée d'un budget de 170 millions d'euros qui semblait condamnée à la délocalisation faute de crédit d'impôt possible selon les critères en vigueur, Luc Besson a été entendu par le gouvernement et a pu s'extraire du "trou juridique", qu'il dénonçait au micro de Marc-Olivier Fogiel sur RTL. Et son bonheur semble à l'aune du message qu'il a publié ce samedi 3 octobre 2015 sur sa page Facebook : immense.
A plusieurs reprises, comme ce jour-là sur RTL, Luc Besson avait exprimé sa colère et résumé clairement la situation, ubuesque : "J'ai prévenu les autorités parce que j'aimerais vraiment le faire en France. Il y a un tout petit problème : les crédits d'impôt. En France, ils sont pour les films français de 20% et de 30% pour les étrangers. Mais je suis un film français en langue anglaise, donc j'ai droit à 0% en tant que film français. En tant que film étranger, j'ai droit à 0% car le producteur est français." Face au désarroi du géant français de la production cinématographique et à la crainte que son prochain chantier colossal, synonyme de nombreux emplois, s'exile, la ministre de la Culture Fleur Pellerin était intervenue pour trouver une issue favorable. Mercredi dernier, elle confirmait ainsi, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, la généralisation du taux de 30% de crédit d'impôt pour le cinéma, un taux jusqu'ici réservé aux films de moins de 4 millions d'euros, qui sera même appliqué à certains films tournés en langue étrangère, comme Valerian.
Sur Facebook, Luc Besson a copieusement partagé ce samedi son soulagement et son bonheur : "Un nouveau texte de loi s'apprête à être voté à l'Assemblée Nationale. Grâce à ce nouveau texte, Valerian pourra se tourner en France. C'est une formidable nouvelle pour l'économie française car le film va générer un millier d'emplois et dépenser sur le territoire plusieurs dizaines de millions d'euros", se réjouit-il d'emblée. Un préambule, du cas particulier de Valerian, qui introduit une longue, très longue réflexion sur la révolution que "ce jour historique" espéré dans quelques semaines à l'Assemblée nationale va mettre en branle : "Pourtant ce n'est pas la meilleure nouvelle de ce texte de loi. La meilleure nouvelle, c'est que les films français vont bénéficier d'un crédit d'impôts de 30%, au lieu de 20% initialement. Cette différence paraît minime pourtant elle change tout !, poursuit-il. A cause de ces 10% de différence, 35 films français se sont délocalisés en 2014 et dans les six premiers mois de 2015, ce sont 39 films qui sont partis se tourner à l'étranger. Évidemment, les films à gros budget. Des dizaines de sociétés audiovisuelles s'approchaient du dépôt de bilan. On était pas loin du K.O et rien ne semblait pouvoir arrêter l'hémorragie. Cela fait cinq ans que l'on voyait la catastrophe arriver et malgré les alertes, lancées par nous tous, rien ne semblait bouger."
Rendant grâce à la ministre de la Culture d'avoir "consulté sur le terrain et compris la gravité de la situation", Luc Besson pousse d'avance un grand cocorico. Plus encore que l'attractivité de la France pour les investissements éventuels de productions étrangères, ce Français fier de l'être se félicite de savoir qu'il n'y aura "plus aucun prétexte pour se délocaliser" et que "[son] pays sera gagnant" : "Ce sera un très grand jour pour le cinéma français. Un jour historique !!! On pourra enfin tourner des films français en France!!! Les producteurs français n'auront plus aucun prétexte pour se délocaliser. Fini" les-visiteurs-en -Hongrie " ou "la-belle-et-la-bête-en-Allemagne! Pire encore: "La French" (sur le milieu marseillais) tourné en Belgique! Mais je l'avoue, cette année, faute de financement ,chez Europacorp, nous avons aussi craqué. Après plus de 50 films tournés en France (Lucy,Taken,Transporter etc...) deux films à nous se sont tournés à l'étranger. Et ça fait mal au ventre... Au passage, la loi va permettre à certains films français en langue anglaise (c'est le cas de Valerian) de bénéficier aussi des 30% de crédits d'impôts comme les autres. (Contre 0% auparavant ). J'en suis ravi, pour tous ceux qui vont maintenant pouvoir travailler sur ce film et pour mon pays qui va lui aussi être gagnant. Il y a quelques mois, je suis monté au créneau "comme on dit" et personne ne donnait chère de ma peau. Ma démarche était perdue d'avance me prédisait-on. La politique n'est pas mon truc mais je me suis lancé, avec comme seules armes, ma bonne foi et mon envie d'aider mon pays."
Dans l'euphorie, le producteur de 56 ans réserve un couple laudatif au monde politique français : "A toutes les étapes (...) j'ai bénéficié d'une véritable écoute, constaté une rapidité à comprendre la situation catastrophique et surtout une véritable envie de résoudre le problème. J'ai eu le sentiment de voir la politique telle qu'on la rêve, à travers des hommes et des femmes qui, quand ils sont loin du cirque médiatique, sont concernés et s'efforcent de servir les intérêts de la France. Pour cela, je les salue et les remercie tous."
Et de conclure, prêt à se remettre au travail : "Le cinéma français est reconnu dans les plus grands festivals et nos artistes et techniciens font partie des meilleurs au monde. Nous avons maintenant un peu d'oxygène pour continuer. A nous de prouver que nous méritions tous ces efforts."