L'hypothèse d'un procès en France se précise pour le Britannique Ian Bailey, soupçonné du meurtre de Sophie Toscan du Plantier en Irlande en 1996 : la justice française a confirmé le renvoi aux assises du journaliste par la procédure dite du défaut criminel, que Dublin a jusqu'à présent refusé d'extrader, annonce l'AFP. Une décision qui permet à Pierre-Louis Baudey-Vignaud, le fils de la victime, âgé de 36 ans et père de famille, de garder espoir. Il avait 15 ans lorsqu'il a perdu sa mère le 23 décembre 1996. Le Parisien s'est entretenu avec lui.
"On avance sur la voie de la vérité, certes lentement, mais on avance, réagit-il auprès du quotidien. Aujourd'hui, la justice française nous conforte dans l'idée que nous défendons depuis toujours, celle que les charges sont suffisantes pour le juger, même en son absence." Prêt à un probable pourvoi en cassation de l'accusé, qui retarderait encore la tenue de ce procès, il sait que la patience est son salut, espérant obtenir l'extradition de Bailey. "Ce que je souhaite, c'est qu'il réponde en personne, dans une enceinte de justice, de ses multiples contradictions. La vérité est nécessaire pour ma mère, pour les parents de ma mère, pour moi et mes enfants. Elle l'est aussi pour toutes les femmes assassinées en Irlande qui subissent l'injustice, car notre cas n'est pas isolé." Il ajoute : "J'ai 36 ans. J'ai encore beaucoup de temps et d'énergie devant moi."
Sophie Toscan du Plantier, née Bouniol, a été l'épouse du célèbre producteur de cinéma français Daniel Toscan du Plantier, décédé en 2003. Productrice d'émissions de télévision française, elle a été retrouvée assassinée à 39 ans, frappée à la tête à coups de parpaing il y a vingt-et-un ans à Toormore à quelques pas de sa résidence de vacances près de Schull en Irlande.
Le journaliste de 60 ans Ian Bailey, pigiste résidant à quelques kilomètres de là, avait rapidement fait figure de suspect. Interpellé à plusieurs reprises par la police irlandaise, il n'a toutefois jamais été inculpé en Irlande et a toujours contesté être l'auteur du crime. Il avait été renvoyé le 27 juillet 2016 devant la cour d'assises de Paris pour ce meurtre et avait fait appel.
"C'est un soulagement pour les proches de Sophie Toscan du Plantier, même s'ils savent que le procès n'est pas pour tout de suite et qu'il se fera vraisemblablement en l'absence du suspect", a réagi l'un des avocats de la famille, Laurent Pettiti. La justice irlandaise a en effet jusqu'à présent refusé la remise de Bailey aux autorités françaises – qui ont délivré deux mandats d'arrêt à son encontre en 2010 et 2016 –, invoquant l'absence de réciprocité entre les deux pays en matière d'extradition.
Les enquêteurs irlandais, qui ont consacré des moyens colossaux à cette affaire
On peut s'interroger sur le rôle de la justice irlandaise dans cette affaire. "L'Irlande n'est pas une république bananière dont les décisions ne doivent pas être prises en compte", a réagi Me Tricaud. "Les enquêteurs irlandais, qui ont consacré des moyens colossaux à cette affaire, ont estimé qu'il n'y avait pas assez d'éléments pour le renvoyer devant une juridiction de jugement", a-t-il ajouté, soulignant qu'"aucune preuve scientifique" ne rattachait son client à la scène de crime. L'état du corps de Sophie Toscan du Plantier, resté dehors recouvert d'une simple bâche pendant 36 heures avant l'arrivée du médecin légiste, n'avait en effet pas permis de relever un éventuel ADN étranger.
Mais pour le parquet général, "bien qu'aucune preuve matérielle ne puisse être avancée (...), le faisceau d'indices entourant Ian Bailey constitue des charges suffisantes", justifiant son renvoi aux assises. Un nouveau chapitre est ouvert.