C'est un décès qui a touché la France entière : pour la deuxième fois en trois ans, un terroriste a assassiné un professeur dans l'enceinte de son établissement. Après Samuel Paty, en octobre 2020 à Conflans Sainte Honorine, c'est, ce vendredi 13 octobre, Dominique Bernard, à Arras, qui a perdu la vie en essayant d'empêcher Mohammed Mogouchkov, un ancien élève de l'établissement, de tuer des dizaines de gens.
Ce jeudi 19 octobre, c'est également à Arras que se déroulaient ses obsèques, en présence d'Emmanuel et Brigitte Macron ainsi que d'autres membres du gouvernement (qui n'ont pas été filmés, comme le voulait la famille). Et c'est le discours de sa veuve, Isabelle, qui a ému l'assemblée. Elle-même professeur d'anglais, et seule, désormais, avec leurs trois filles Heloïse, Clélia et Mélisande, elle a tenu à rappeler certains de ses plus beaux souvenirs avec son mari en rappelant ce qu'il aimait et ce qu'il n'aimait pas.
"Il aimait Julien Gracq, Flaubert, Stendhal, Balzac, Proust, Céline", a-t-elle commencé, avant de citer une grande partie des auteurs préférés de cet amoureux de la littérature, devenu prof de français après un baccalauréat S. "Il aimait la poésie, René Char, Baudelaire, Rimbaud, Malarmé, Valéry [...]Il aimait la philosophie, il aimait le cinéma, Truffaut, Ford, Orson Welles. Il aimait le baroque, Ozu, Miyazaki, Kurozawa, Almodovar, Fellini, Visconti".
Amoureux d'art également, il semblait apprécier des peintres, des tableaux, des compositeurs. "Il aimait l'italien, la Toscane, le Titien, Véronèse, le Caravage, Shakespeare, Racine, Beckett, Van Gogh, Picasso, Vermeer, Matisse, Gauguin, Manet", a-t-elle résumé, citant également "Bach, Beethoven, Hayden". Mais il aimait également voyager, et découvrir, selon elle : "Le gothique, les cathédrales qu'on découvrait de ville en ville. Les glaciers préférés du routard. Il aimait la Provence, ses couleurs, ses senteurs. Les étangs, les rivières et les fleurs, les forêts. Il aimait la lumière rasante du soir".
"Il les avait en horreur"
Sa veuve est ensuite passée à ce que ce professeur, réputé comme étant un homme gentil, soucieux de ses élèves et discret, n'aimait pas. Voire même, "avait en horreur" selon elle. "Il n'aimait pas la foule, ni les honneurs, les cérémonies qu'il avait en horreur. Il n'aimait pas le bruit et la fureur du monde", a-t-elle résumé. Serait-ce la raison pour laquelle la famille a refusé que soient filmés les membres du gouvernement et le couple présidentiel ? En tout cas, la cérémonie a été suivie par des dizaines de personnes, qui, bravant la pluie, étaient venues lui rendre un dernier hommage.
Finissant son joli discours sur le fait que son mari "n'aimait pas l'informatique et les réseaux sociaux", ou encore "le téléphone" qu'il n'avait même pas, elle a conclu, la voix brisée par l'émotion : "Il aimait profondément ses filles, sa mère et sa soeur. Nous nous aimions". En larmes, elle est ensuite retournée s'asseoir pour laisser la place à ses filles. Un moment plein d'émotion...