En 2008, alors en pleine promotion pour le dyptique Mesrine dont il tenait la vedette, Vincent Cassel se présentait logiquement sur le plateau du Grand Journal de Canal+. Un passage obligé qui réservait malgré tout une surprise de taille : la présence d'un invité spécial, presque plus reconnaissable à sa dégaine encapuchée qu'à son visage - son frère cadet, Matthias.
Connu des rapomanes purs et durs pour son action fondatrice (tout autant que NTM ou IAM, malgré une notoriété moindre, imposée par un positionnement médiatique et artistique radical) au sein du quatuor Assassin, Matthias Cassel, alias Rockin' Squat, avait accepté cette rare exposition, lui qui venait de co-signer, avec une pléiade de ténors du rap, la bande originale de Mesrine. Mais il avait bien une idée indomptable derrière la tête : et, plutôt que de chanter, comme il était prévu, le titre autobiographique Enfant de la balle, c'est France à fric, nettement moins consensuel, qu'il balança comme une roquette (un moment à revoir ci-dessus), déclenchant la fierté de son aîné - qu'on a récemment découvert avec bonheur, 10 ans après sa participation à Touche d'espoir d'Assassin, dans le nouveau clip d'Oxmo Puccino (Quitte moi, réalisé par Kim Chapiron). Fait amusant, ce track était extrait d'un maxi intitulé... Too hot for TV (Trop chaud pour la télé) ! CQFD.
"Le lendemain, les gens de Canal m'ont appelé, paniqués, se remémore Vincent, selon des propos rapportés par Libération dans le portrait consacré à Rockin' Squat en der de l'édition du 18 mars 2010 : "Mais vous avez pris l'antenne d'assaut !" Là, je me suis rendu compte que mon frère était plus subversif que les rappeurs qui se prennent les couilles ou qui portent des flingues. Ça m'a fait très plaisir".
A quelques mois de la sortie (annoncée pour septembre 2010) du troisième volume de ses Confessions d'un enfant du siècle entamées en solo en 2007 (d'ici-là, un nouveau clip extrait du Volume 2, Le Pouvoir Secret, est attendu aux alentours du 15 avril), Rockin' Squat a accepté - suffisamment exceptionnel pour être signalé - de rencontrer Libé, alors que paraissait le DVD Assassin/Rockin' Squat : Olympia 2009, issu de la tournée mondiale 2008-2009 du groupe dont les productions sont désormais sous étiquette Label Livin' Astro, qui a pris le relais de feu Assassin Production. Accepté, mais à ses conditions : "Argh, la tête à claques ! 38 ans au compteur, le rappeur est toujours aussi pénible", fustige le journaliste de Libé quand Matthias, débarqué en retard, cherche déjà à raccourcir la durée de l'entretien. Avant de se raviser : "Finalement, il restera plus d'une heure devant le dictaphone, dépassant l'horaire de l'alarme qu'il avait programmée sur son portable. Car malgré tout, Matthias Cassel est un bon bougre, essentiel pour comprendre l'histoire de la culture hip-hop dans l'Hexagone".
Suffisant pour évoquer la vie du bonhomme, qui se partage désormais entre la France et le Brésil (une autre passion qu'il a en commun avec son illustre frère), où, écolo (il l'était avant l'heure), il cultive la terre avec sa femme brésilienne.
Suffisant encore pour évoquer les années intermédiaires de l'Enfant de la balle "ballotté" et "exclu" (en pension) dans son enfance, qui écuma les block parties avec son frère, puis seul lorsque ce dernier s'engagea sur la voie de la comédie défrichée par leur père Jean-Pierre Cassel.
Suffisant enfin pour esquisser l'élevation autodidacte de cet irréductible : "Mon art n'a pas été dicté par des humeurs, mais par ma connaissance, ma culture, mon équilibre". D'équilibre, il en est question, finalement. Car, si Vincent Cassel se souvient des réactions tourmentées de leur père lorsqu'il sortait d'un concert de Rockin' Squat ("Mais qu'est-ce que j'ai fait à mon enfant pour qu'il soit si en colère ?"), il remarque aujourd'hui que son frangin a fait du chemin : "Il est plus en paix, car il a le Brésil comme ailleurs. Le rap est un milieu dur (...) Les concurrents attaquent sur tout. Si ce n'est pas parce que tu es fils de, c'est parce que tu n'es pas assez gangster, ou que tu te défonces. Matthias a réussi à se sortir de ça. Il a trouvé une manière d'être heureux sans être habillé d'une carapace." Il reste néanmoins l'option capuche, avertit l'intéressé...
Un portrait à retrouver en intégralité sur Libération.fr, en cliquant ici.
G.J.