En troquant en 2012 leur villa polémique au Mozambique contre une propriété idyllique dans le Péloponnèse, en Grèce, Willem-Alexander et Maxima des Pays-Bas, ainsi que le gouvernement néerlandais, pensaient bien avoir définitivement enterré la controverse. Mais il a suffi d'une grosse facture de près d'un demi-million d'euros, déterrée par l'agence de presse Reuters et le site de RTL Nieuws, pour raviver les braises du débat autour de la nouvelle villégiature royale. 461 000 euros pris sur les deniers publics, juste pour un peu d'intimité...
Les vacances au Mozambique, un fiasco total
Petit retour en arrière, en janvier 2012 : Mark Rutte, Premier ministre des Pays-Bas, se fait un plaisir d'annoncer publiquement lors d'une intervention au Parlement, à La Haye, que l'encombrant dossier "Mozambique" est clos. Après deux ans de micmacs sur le marché immobilier, la demeure d'une valeur de 2 millions d'euros que Willem-Alexander, alors prince héritier, avait fait construire dans le pays du Sud-Est de l'Afrique, à proximité des plages de la baie de Maputo, a été discrètement vendue, sans que la famille royale en ait eu la moindre jouissance. Le rêve d'offrir un petit coin de paradis exclusif aux quatre femmes de sa vie, sa femme Maxima et leurs filles Catharina-Amalia, Alexia, et Ariane, s'évanouissait cinq ans après avoir commencé à prendre forme, en 2007, et quelques mois seulement après la fin du chantier (juin 2011).
Soucieux de doter sa famille un refuge échappant à l'appétit des médias, qui s'étaient déjà immiscés dans leur vie privée dans l'Argentine natale de son épouse et n'auraient pas manqué de les repérer s'ils avaient jeté leur dévolu sur la French Riviera ou l'Italie, le fils de Beatrix des Pays-Bas avait ainsi investi avec des amis dans un projet immobilier de grand standing sur le littoral africain - un resort de luxe de 220 villas de prestige -, censé stimuler la vie locale. Outre la satisfaction pour Willem-Alexander de transmettre à son tour à sa progéniture l'amour de l'Afrique hérité de son père le prince Claus, qui vécut en Tanzanie, le futur monarque néerlandais pouvait en effet se réjouir de contribuer à l'amélioration des conditions de vie de la population autochtone, par la création d'emplois, de commodités (traitement des déchets, fourniture en eau potable), de plusieurs écoles, d'un hôpital, d'un centre communautaire... Même Maxima, grande ambassadrice mondiale du micro-développement, avait fait valoir que leur résidence secondaire serait un parfait QG pour des actions philanthropiques dans la région.
Mais les critiques et les suspicions s'étaient abattues en une pluie torrentielle : investissement financier personnel du prince et coût pour le contribuable, réalité des projets à destination de la population locale, coûts supplémentaires induits (service de sécurité des royaux sur place, déplacement, assistance médicale), impact environnemental, soupçons de corruption des autorités locales... Le projet devenait intenable, et a été abandonné, la villa étant finalement rachetée par le promoteur.
La paix dans le Péloponnèse ? 461 000 euros la clôture, ça fait cher le mètre de grillage !
Avril 2012. Trois mois après la résolution de la question mozambicaine, Mark Rutte dévoile que le ménage royal a acquis comme résidence secondaire une propriété de 4,5 millions d'euros dans le Péloponnèse, à l'ouest de la ville de Kranidi dans la région d'Argolis, à proximité du pittoresque village côtier de Doroufi. Un somptueux havre de paix isolé de 4 000 mètres carrés, avec vue magique sur le Golfe argolique, plage privée, voisins VIP (Vladimir Poutine, la famille Niarchos ou Sean Connery), à quelques kilomètres de Porto Cheli, fief de l'ancienne famille royale de Grèce pour lequel Willem-Alexander et Maxima auraient eu un coup de foudre lors de leur participation au mariage du prince Nikolaos et de la princesse Tatiana en août 2010. Anciennement occupée par le photographe allemand Manfred Rieker, la propriété est idéale.
Mais si Willem-Alexander souhaitait élire un lieu de vacances unique notamment par pragmatisme, pour ne pas démultiplier inutilement les dépenses et frais logistiques (services de sécurité, notamment), l'affaire qui vient de surgir contredit dramatiquement ses voeux d'économies ! 461 000 euros, voilà en effet le budget qui aurait été englouti dans... une clôture ! En fait, la somme, somptuaire et sortie de la poche du contribuable néerlandais, aurait servi à la location, pour une durée de 30 ans, d'un terrain entourant la propriété grecque du couple royal, selon le contrat de location révélé par Reuters et RTL Nieuws, afin d'y ériger la clôture en question de part et d'autre de la résidence royale, de façon à maintenir les intrus à l'écart. Un terrain qui, s'il avait été purement et simplement acheté, aurait coûté... 35 000 euros seulement. Autant dire que l'addition reste en travers de la gorge des sujets de Sa Majesté, et d'une bonne partie des responsables politiques. Un peu plus d'un an après son intronisation, le 30 avril 2013, on peut dire que le roi Willem-Alexander des Pays-Bas, jusqu'ici irréprochable, vit sa première sérieuse controverse.
Avec beaucoup de bon sens, il faut bien en convenir, un responsable de l'opposition, Alexander Pechtold, chef de file du parti D66, a posé une question judicieuse : "Le gouvernement doit évidemment protéger le roi, mais il faut également éviter les coûts inutiles. La question est de savoir s'il était nécessaire de louer le terrain du voisin pour un demi-million d'euros au lieu de construire la clôture sur son propre terrain", s'est-il interrogé face à la facture "remarquablement élevée" imposée au contribuable néerlandais. En guise de réponse à la polémique, le Premier ministre Mark Rutte, qui avait en début d'année signalé que l'Etat prendrait en charge la sécurité de la propriété grecque du couple royal, a affirmé que la location du terrain polémique était nécessaire, sans autre commentaire. Au début de l'été, certains médias locaux s'étaient eux aussi montrés critiques au sujet de l'installation d'une marina privée dans la résidence. Willem-Alexander et ses filles ne vont quand même pas devoir mettre les voiles à nouveau ?