Un court instant, on a cru que le générique aurait subi un lifting nécessaire, lorsque des notes semblables aux synthés de Thriller résonnent... En vain ! Le flonflon poussiéreux fait toujours loi aux Victoires, sans doute nostalgiques malgré elles de l'âge d'or de La Chance aux chansons.
Comme annoncé, une douzaine des animateurs qui ont jalonné l'histoire de ce rendez-vous dédié à la chanson française étrennent les plâtres d'une soirée qu'a précédée une polémique pas encore apaisée tandis que Michel Drucker, Nagui, Guillaume Durand, Daniela Lumbroso, Philippe Gildas, Caroline Tresca, Arthur, Patrick Sabatier, Frédérique Bedos, Christian Morin, en relais, mot à mot, prononcent la première phrase du concert des récompenses hébergé par le Zénith de Paris.
Charles Aznavour, monsieur Charles, si peu habile aux discours, apparaît alors en sa qualité de président d'honneur pour la formule d'inauguration rituelle, que suit un copieux morceau de bravoure : un medley constitué des plus beaux "merci" de l'histoire des Victoires, drôles, touchants voire poignants, ou encore pleins de panache - où chaque image semble avoir conservé la saveur de l'instantané, et ou certaines d'entre elles revêtent l'aura des légendes, comme celle d'un Bashung jeune et bien portant soulevant - déjà - un trophée.
Si le générique a échoué à nous faire frissonner comme Thriller, c'est bien avec un hommage au défunt King of Pop que cette édition anniversaire entre dans le vif du sujet : M, doigts de feu et sculpture physique impassible, General Electriks, good vibes en bande, Amadou et Mariam pour le mythique " Mama-se, mama-sa, mama-coo-sa " de Wanna be Startin' something, Charlotte Gainsbourg pour un Billie Jean osé en spoken word...
Symbole de la modernité affichée et de la volonté de ces 25e Victoires de faire un geste en direction des succès populaires, la véritable compétition est ouverte par... Helmut Fritz (ordre alphabétique oblige, certes...), pour la catégorie Chanson originale de l'année (une catégorie arbitrée par le public). Ca m'énerve, un message des Victoires à l'adresse de ses récents détracteurs ? On revient élégamment sur les sentiers battus de l'esprit Victoires avec le passage, dans la foulée, d'un Benjamin Biolay lancé dans un duo plein de souffle avec la symphonie sentimentale de La Superbe, son single si bien nommé. Coeur de Pirate, après une année 2009 marquée par l'abordage réussi de la Québécoise, revient pour défendre, avec son piano, Comme des enfants, puis cède la place à Calogero avec cette ode à l'amitié, C'est dit, troussée par Jean-Jacques Goldman.
Les quatre candidats à un succès d'estime public passés, un premier intermède fait honneur à l'orchestre qui officie sous la direction d'Arnaud Dunoyer de Segonzac. Un ensemble, dans lequel se sont glissés des musiciens qui furent présents aux débuts des Victoires il y a 25 ans, qui fournit la bande originale d'un hommage à Charles Aznavour, dispensé par Maurane, Alexis HK, Amandine Bourgeois, Benjamin Biolay, Nolwenn Leroy. Le V des Victoires vibre à l'unisson avec celui d'AznaVour, et le président d'honneur, un moment au bord des larmes, monte sur scène pour recevoir le prix honorifique qui vient consacrer l'ensemble de son oeuvre. Une victoire d'honneur reçue des mains du ministre de la Culture et de la Communication Frédéric Mitterrand, d'humeur stand-up, qui a ciselé son discours sur les titres cultes d'Aznavour et l'a truffé de traits d'humour pleins d'auto-dérision. Le grand Charles ne boude pas son plaisir, accueillant ce trophée : " Vous connaissez mon principe : je les accepte tous, parce que j'ai attendu très longtemps pour en avoir un ", badine-t-il avec ce mélange de modestie et d'humour qui lui est propre, avant de formuler des louanges de bon aloi quant à la vitalité de la nouvelle chanson française.
50 minutes sans la moindre distinction " d'actualité " attribuée, fait remarquer votre voisin de canapé lorsque vous ressassez : pfiou, 4 heures sans pub... Mais un cocktail de belles émotions, déjà...