Bernadette Chirac ne veut rien lâcher, surtout pas son précieux canton de Corrèze, dont elle est élue depuis trente-trois ans. Ce dernier est menacé de disparition par la réforme territoriale, alors Bernadette bataille ferme depuis des mois, de Tulle à Paris, pour protéger son canton du redécoupage. L'épouse de Jacques Chirac est prête à déposer des recours devant le Conseil d'État et même à "dire des choses". L'Express s'intéresse cette semaine aux échos très personnels du dernier combat politique de Bernadette Chirac...
Le couple Chirac découvre la Corrèze lorsqu'il acquiert le château de Bity à Sarran, en 1969. Deux ans plus tard, Jacques pousse Bernadette à se présenter au conseil municipal. C'est le début de la carrière politique de l'ex-première dame. Le 23 mars dernier, elle était réélue au conseil municipal : "Quand on travaille, on reste accroché au rocher qu'on a choisi au départ. Les gens le savent, s'en souviennent et en sont reconnaissants." Son rocher, c'est donc Sarran, cette petite commune de 260 habitants qui abrite le Musée Jacques Chirac, et la Corrèze, dont elle connaît chaque recoin. "Je peux entrer dans n'importe quelle ferme, raconte Bernadette Chirac cette semaine à L'Express. L'homme me propose de l'eau-de-vie de prune et la femme hurle : 'Mais enfin, Serge, tu sais bien que madame Chirac ne boit que de la tisane !' Eh bien cela, vous voyez, cela me manquerait terriblement."
Sophie Dessus, députée PS de la 1re circonscription de la Corrèze, qui connaît bien madame Chirac, dit à L'Express comprendre sa détresse : "Mettez-vous à sa place : c'est une étape de plus vers la mort." L'intéressée confirme que la perte de son canton serait une déroute personnelle : "Cela me rend malade. S'ils font cela, on m'enterre dans huit jours !" Bernadette Chirac ne cache pas non plus qu'en Corrèze, elle oublie ses tracas familiaux : "Mon mari décline ; ma fille aînée, Laurence, est malade ; ma fille cadette, Claude, m'empêche de voir mon petit-fils [Martin, qui vient de célébrer son 18e anniversaire, NDLR]. Alors quand j'arrive ici, j'oublie mes soucis parisiens." La Corrèze comme bol d'air frais, mais son coeur n'est jamais trop éloigné de Jacques. "Elle s'inquiète dès qu'elle se trouve loin de lui, confie Sophie Dessus, cette fois-ci à VSD. Elle n'hésite jamais à regagner Paris le soir tard après nos réunions à Sarran."
François Hollande, dont le fief est à Tulle, a longtemps pris soin de ne pas froisser Bernadette Chirac pour ne pas se mettre à dos les chiraquiens dans la commune. Désormais président de la République, il n'a plus besoin d'elle, peut-on lire dans L'Express : "Et il n'a aucune envie de lui rendre service." Dans VSD, un observateur révèle, sous couvert d'anonymat, que Bernadette Chirac a "tellement malmené tout le monde, y compris dans son propre camp, qu'elle n'a plus beaucoup de soutiens" : "Le temps des cantons est révolu. Tout comme la splendeur de Mme Chirac." Reste que sa réélection à Sarran est incontestable et que beaucoup disent que sa réélection aux cantonales de mars 2015 est gagnée d'avance. Car elle a fait beaucoup là-bas : la venue de trois grosses entreprises et la création de 140 emplois, un lotissement de gendarmes ou encore la récente rénovation de la caserne des pompiers... L'inconnu, c'est de savoir où elle se présentera si son canton est dispersé.