C'était l'événement télévisuel de ce 5 novembre, la diffusion sur D8 de Campagne intime, le documentaire de Farida Khelfa sur la campagne électorale de Nicolas Sarkozy. Un portrait sensible d'un homme en bataille et de son épouse Carla Bruni-Sarkozy. Bien sûr, Farida et Carla sont amies de longue date - chacune ayant été témoin du mariage de l'autre -, mais le documentaire offre ces petits moments, parfois furtifs, qui en disent long sur un caractère, une méthode de travail. Le film prend toute son ampleur quand le candidat se réfugie aurpès de sa fillette Giulia ou quand les résultats tombent au soir du deuxième tour. On y découvre comment le couple gère la défaite. Campagne intime a rencontré un vrai succès, réunissant 1,5 million de téléspectateurs sur la chaîne de la TNT, soit 5% du public.
Sarko en peignoir
Le documentaire de Farida Khelfa débute dans l'hôtel particulier du couple dans le 16e arrondissement de Paris. Carla gazouille avec Giulia, Nicolas attrape les images d'un match de foot. Le couple quitte les lieux pour se rendre sur le plateau du JT de TF1. Il se déclare candidat. Nous sommes le 15 février 2012. Le lendemain, la campagne débute. On retrouve le couple au petit matin à l'Elysée, Sarkozy est encore en peignoir, micro-cravate bien en place. Direction Marseille, premiere étape d'une longue série de déplacements.
Jusqu'au premier tour, Farida Khelfa balaye avec rapidité la campagne. Elle capte des moments essentiels du second tour. Ce jour-là, sa caméra est d'abord dans le secrétariat de l'Elysée. L'angoisse est palpable : fera-t-on les cartons ce soir ? Face caméra, Carla, à peine remise de sa grossesse, se dit éreintée par les derniers mois : "L'attente, c'est le plus épuisant. Oui, je fume plus. Je ne regarde pas la télévision, je ne regarde rien. Je suis avec le bébé. Je suis avec Nicolas." Les premiers chiffres arrivent, ça se présente mal.
Carla Bruni annonce à Aurélien (son fils avec Raphaël Enthoven) et Louis (fils de Cécilia Attias avec Nicolas Sarkozy) que Nicolas a probablement perdu. La chanteuse remonte le moral des petits, voit le bon côté des choses : "C'est extraordinaire tout de même. Aujourd'hui il referme la porte sur 37 ans de vie politique." Elle semble sereine, lui travaille pour son discours, dont le coeur – il insiste sur ce point - doit être ses remerciements aux Français. Il y tient plus que tout. On découvre un Sarkozy d'un calme olympien devant sa déroute : "L'incohérence consiste à accepter la victoire et refuser la défaite. L'incohérence, c'est d'être fort dans la victoire et faible dans la défaite, et ça je ne peux pas le supporter."
Edouard Balladur entre en scène et évoque déjà un retour possible. Nicolas Sarkozy n'y croit pas. Carla Bruni estime qu'il est dommage d'abandonner tous ces Français qui l'ont soutenu ces derniers mois. "Le retour ça n'existe pas", conclut Nicolas Sarkozy. Un conseiller descend au secrétariat de l'Élysée : "On a les résultats, c'est une lettre pour vous de là-haut."
Une campagne rythmée par les gazouillis de Giulia
Au congrès UMP du 11 mars à Villepinte, Nicolas Sarkozy est officiellement investi par son parti. En coulisses, un défilé de stars : Gérard Depardieu, Emmanuelle Seigner et Bernadette Chirac. Dans la voiture du retour, Carla Bruni exprime sa peur de le voir prendre des bains de foule : "J'aime pas trop ça. J'ai peur que quelqu'un lui dessus... une femme." Une petite blague, mais on la sent sincère.
Le 15 avril à la Concorde, premier meeting géant de campagne. Farida Kehlfa ne filme pas les discours, mais avant et après, quand la chemise est trempée jusqu'aux os, qu'il faut en changer avant de rejoindre la foule. Pierre Sarkozy exprime son trac fou chaque fois que son père monte au pupitre : "C'est pire que si c'était moi. Ça ne passe pas." Le jeune DJ dit ne pas être militant, ni croire au clivage gauche-droite : "Je crois aux personnalités et j'ai confiance en mon père."
Arrive le premier tour. Tout s'accélère. Farida Kehlfa filme les séances de travail de Nicolas Sarkozy et "ses gars", comme dit Carla. Analyse des résultats, écriture de son intervention publique. À sa demande, Carla le rejoint. Lecture du discours final. Un conseiller bute sur un mot : vaut-il mieux dire "sans contrôle" que "sans limites" ou autre ? Carla Bruni glisse un petit mot en faveur du conseiller. Nicolas Sarkozy justifie avec une précision mathématique son choix. Il a le dernier mot. À la maison, la petite Giulia attend sagement dans son pyjama à rayures, la tête posée sur un coussin brodé à son nom, avant de s'envoler dans les bras de son papa. Fin d'une longue journée.
Après le Trocadéro, Carla Bruni et Nicolas Sarkozy débriefent chacun au téléphone le meeting qui vient de s'achever. "Immense connerie, j'ai oublié le sursaut national..." Mais son premier réflexe n'est pas d'analyser, mais de retrouver les bras de sa petite Giulia. La récompense après la performance sportive que constitue un tel meeting. La fillette, alors âgée de quelques mois, est clairement la star inattendue de ce documentaire... On la suit jusque dans son bain et dans son lit. Même floutée, sa petite tête blonde crève l'écran. L'intimité de cette campagne est là, dans ces moments où Nicolas Sarkozy se réfugie auprès de sa fille.