Dolores O'Riordan était certes devenue une star mondiale, chanteuse du groupe à succès The Cranberries, mais n'avait "jamais oublié d'où elle venait", comme l'a souligné le maire de Limerick suite à l'annonce choquante de la mort de l'artiste irlandaise, dont le corps sans vie a été retrouvé dans un hôtel de Londres le 15 janvier 2018.
Dans sa région natale non plus, où l'annonce de son décès à 46 ans seulement a suscité une très vive émotion, on ne l'oublie pas : ce dimanche 21 janvier, ils étaient des centaines et des centaines, habitants de la commune, de la province du Munster et même de tout le pays, à vouloir dire adieu à l'enfant du pays, dont la dépouille a été exposée en l'église Saint Joseph. Là où elle avait fait sa première communion et sa confirmation.
Le cercueil est ouvert - je ne suis pas sûre que les gens s'attendaient à cela. Elle a l'air en paix.
A l'avant-veille des obsèques de Dolores O'Riordan, qui se dérouleront mardi 23 janvier dans sa petite ville de Ballybricken et seront suivie de son inhumation dans la plus stricte intimité au cimetière de Caherelly où repose depuis 2011 son père Terence, son cercueil, orné du motif de Marie au pied de la croix gravé dans le chêne, est arrivé peu après midi sur l'avenue O'Connell, où une longue file s'étirait sur le trottoir devant l'église. Porté sous le regard de sa mère Eileen à l'intérieur de l'édifice religieux par des membres de sa famille, accablée de chagrin, il était exposé ouvert : "C'est très triste. Le cercueil est ouvert - je ne suis pas sûre que les gens s'attendaient à cela et elle a l'air si frêle, très tranquille, en paix", a commenté une élue locale, en charge des affaires culturelles, auprès du quotidien local Limerick Leader. Cette paix que la chanteuse avait de son vivant tant de mal à trouver, prisonnière de l'enfer de la dépression et sujette à des troubles bipolaires... On a d'ailleurs pu craindre qu'elle ait mis fin à ses jours, ce qu'elle avait déjà tenté de faire en 2013 ; mais, si les circonstances de sa mort doivent encore être établies, les enquêteurs semblent avoir écarté cette hypothèse. Maman de trois enfants (Taylor, 20 ans, Molly, bientôt 17 ans, et Dakota, 12 ans, issus de son mariage avec Don Burton, révolu depuis 2014) qui étaient son principal motif de joie, elle avait même retrouvé l'amour auprès du jeune musicien Olé Koretsky, inconsolable et s'apprêtait à réaliser un nouveau projet.
Affichés sur les portes de l'église Saint Joseph, de discrets messages intimaient aux visiteurs de ne pas utiliser leurs smartphones pour prendre des photos et le personnel des pompes funèbres veillaient à ce qu'ils restent bien derrière les cordons rouges empêchant d'approcher trop près du cercueil. Une distance respectueuse qui n'empêchait pas de distinguer les cheveux de jais de Dolores O'Riordan, le fard à paupières sombre également et le haut noir à paillettes, son allure pour sa toute dernière représentation - un mois après son ultime concert, donné à l'occasion de la soirée de Noël à New York du magazine Billboard.
En matière de photo, les gens venus se recueillir pouvaient en revanche observer, à côté d'un registre de condoléances ouvert au public, une image de sa rencontre, en 2001, avec le pape Jean-Paul II. Devant le cercueil flanqué d'un seul bouquet de fleurs jaunes et rouges, certains ont dit une prière, d'autres se sont touché le coeur ; beaucoup ont laissé couler des larmes tandis que résonnait, tombant tristement de deux haut-parleur, la douce et nostalgique ballade Linger. Evidemment. C'est en effet avec ce morceau, premier succès de The Cranberries, que l'histoire avait commencé, lorsque, auditionnant devant les frères Hogan pour la place de chanteuse dans le groupe, Dolores O'Riordan avait fait mouche en proposant sa version revue et corrigée de la chanson originelle.
"La chanson est finie, mais la mémoire perdure [lingers on, dans le texte, NDLR]", soulignait justement le message d'hommage inscrit, clin d'oeil chagrin, lors de cette chapelle ardente. Après cet hommage public, la dépouille de Dolores O'Riordan doit reposer lundi 22 janvier à la maison funéraire de Ballyneety, non loin de son domicile de Ballynricken, où elle était revenue après avoir vécu quelques années en Ontario, au Canada (où ses enfants demeurent toujours, avec leur père). Les funérailles auront ensuite lieu mardi en l'église St Ailbe à Ballybricken, avant son inhumation.
"And now it's just farewell
Put your hands in my hand
We'll find another end" (The Cranberries, Can't be with you)
GJ