C'est au 13ème étage du tribunal pénal new-yorkais (la Criminal Court de Manhattan), salle 51, au 100 Centre Street, que Dominique Strauss-Kahn comparaîtra lundi 6 juin, à 9H30 (15h30 heure française) devant le juge Michael Obus. C'est ce même juge qui a accepté le 19 mai la libération conditionnelle de DSK après 4 nuits et 5 jours de prison dans l'enfer de Rickers Island. Ce 6 juin, c'est une audience cruciale pour l'ancien patron du FMI, qui doit dire s'il plaide ou non coupable des crimes sexuels dont l'accuse cette jeune femme de chambre de 32 ans, employée depuis 3 ans à l'hôtel Sofitel de Manhattan.
Dès le début de cette audience, "l'Honorable judge" Michael Obus (qui est très respecté par le personnel du tribunal) lira l'acte d'accusation devant la salle qui sera pleine à craquer puisque l'audience est publique. Cet acte qui comporte sept chefs d'accusation dont "agression sexuelle, tentative de viol et séquestration" a été établi par le procureur Cyrus Vance Jr, (district Attorney) et son équipe, sur la base des décisions du Grand Jury qui a entendu le témoignage sous serment de la victime présumée, Nafissatou Diallo (la presse américaine et même l'AFP n'ont jamais donné son nom), le 18 mai dernier. Le dossier s'appelle "Le peuple de l'Etat de New York contre Dominique Strauss-Kahn" et porte le N° 201NY035773. Ce sera la première fois où l'on entendra la voix de M. Strauss-Kahn depuis son arrestation le 14 mai dernier : il devra dire s'il plaide coupable ou non coupable.
S'il plaide coupable, il n'y aura pas de procès. Il ira en prison pour un nombre d'années à négocier avec le juge. Nous ne croyons pas du tout à cette théorie, d'autant plus qu'il s'est très confortablement installé dans sa luxueuse résidence de TriBeCa (un quartier huppé-bohême du sud de Manhattan) au 153 Franklin Street, où il vit avec son épouse Anne Sinclair. Il reçoit quotidiennement sa fille Camille (dont le témoignage pourrait être essentiel au cours du procès,elle aurait déjeuné avec son père le 14 mai , après l'agression présumée...) et son frère et sa belle-soeur sont venus également lui rendre visite. Le couple a reçu le 1er juin meubles, vêtements et tableaux en provenance de leur propriété de Washington. Le signe d'une installation à long terme.
Quid des autres enfants de DSK, Vanessa, Laurin et Marine ? Ce sont ses trois aînés dont la maman est Hélène Dumas, dont il a divorcé pour épouser Brigitte Guillemette, maman de Camille, 26 ans. Et que pensent les deux fils d'Anne Sinclair (dont le père est le brillant journaliste Yvan Levaï), Elie et David (c'est en raison de l'arrivée d'un bébé chez David - elle doit maintenant être grand-mère pour la première fois -, qu'Anne Sinclair n'était pas à New York avec son mari) de toute cette triste histoire ? Ils sont tous étrangement silencieux...
S'il plaide non-coupable - comme l'a déclaré avec force son avocat Benjamin Brafman "mon client nie les faits qui lui sont reprochés", a-t-il martelé à la sortie du tribunal et dans la seule interview donnée à un journal israélien et sur TF1 -, un procès se tiendra dans quelques mois, et M. Strauss-Kahn devra alors faire face à sa victime présumée. L'ancien directeur général du Fonds monétaire international, 62 ans, encourt théoriquement jusqu'à 74 années de prison s'il est reconnu coupable des crimes dont il est accusé, crimes qu'il a également niés dans sa lettre au board du FMI. En attendant ce procès, il restera équipé d'un bracelet électronique à la cheville, a une liberté de mouvement très limitée (il ne peut se déplacer que sous escorte pour se rendre au tribunal, chez le médecin, chez son avocat ou à des offices religieux). Après avoir remis tous ses documents de voyage aux autorités américaines, payé une caution cash de 1 million de dollars, plus une garantie de 5 millions de dollars, il vit sous la surveillance de nombreuses caméras 24h/24h et de deux gardes armés.
Après avoir fait la Une des tabloïds new-yorkais qui l'ont baptisé "Le Perv", abréviation de pervers, DSK a écrit à ses anciens collègues du FMI qu'il vivait "un cauchemar". Ce "cauchemar" va reprendre de plus belle, lundi après que l'acte d'accusation sera connu par toute la presse.
Les avocats de DSK pourraient cependant changer de stratégie si preuves ADN il y avait (l'accusation affirme qu'elle possède des preuves ADN ou autres permettant de confondre l'accusé ?) et plaider l'acte consensuel... Pas terrible pour l'image Strauss-Kahn - un rapport sexuel accepté avec une jeune femme de 32 ans, femme de ménage dans un hôtel de luxe, dont, pour le moment, le profil serait celui d'une immigrée africaine pieuse, travailleuse, veuve et mère célibataire modèle d'une ado de 16 ans ? - mais moins grave qu'une condamnation ! Rappelons qu'à n'importe quel moment de la procédure, l'accusé peut décider de plaider coupable.
Après l'audience de lundi et jusqu'au procès (qui ne devrait pas avoir lieu avant octobre 2011), les dossiers de la défense et de l'accusation seront constitués. C'est pendant ce temps que tous les éléments pouvant décrédibiliser la victime auprès des jurés seront précieux pour les avocats de la défense de DSK. Attention cependant comme l'a déclaré Arnaud Montebourg , que "les enquêtes privées à coups de dizaine de milliers de dollars pour discréditer une plaignante qui a droit au respect, n'appartiennent pas au champ des valeurs dans lesquelles je me suis toujours situé" et ne soient pas contre-productives dans l'esprit de chacun. L'opinion publique française, américaine et celle des jurés.
Jusqu'au procès, Nafissatou Diallo, la victime présumée qui est sous protection judiciaire - dont la vie est aux antipodes de celle d'Anne Sinclair ! -, va trouver le temps long dans des conditions de vie forcément moins confortables que celles du présumé coupable... Elle va devoir serrer les dents, car sa "destruction" par la défense de DSK, va bientôt commencer.