Après un week-end calme, une livraison de parasols pour se protéger du soleil et des photographes sur sa superbe terrasse, avoir pu discuter au téléphone (d'après Europe1) avec Martine Aubry, Laurent Fabius et Jack Lang (attention aux écoutes Dominique !),Dominique Strauss-Kahn a rendu visite hier, mardi 31 mai, à son avocat new-yorkais, à J-7 de sa prochaine comparution devant la justice américaine qui le poursuit pour crimes sexuels, avec pas moins de sept chefs d'inculpation. L'ancien boss du FMI, accompagné de son épouse Anne Sinclair, est descendu d'une voiture noire pour s'engouffrer dans l'immeuble occupé par le cabinet de son avocat Benjamin Brafman sur la Troisième Avenue de Manhattan. Vêtu d'un costume sombre et d'une chemise blanche, sans cravate, l'ancien ministre du gouvernement Jospin semblait un peu tendu, alors que sa femme a souri en serrant la main à Me Brafman qui attendait le couple au pied de son immeuble. Aucune déclaration aux nombreux journalistes qui l'attendaient à cette adresse et devant le domicile où il est assigné à résidence dans le quartier de Tribeca. Il est resté environ 90 minutes chez son avocat. C'était sa deuxième sortie en ville.
Pour rappel, DSK doit comparaître à nouveau lundi 6 juin devant le tribunal pénal de Manhattan pour une audience au cours de laquelle ses avocats doivent annoncer formellement s'il plaide coupable ou non coupable des faits qui lui sont reprochés.
Dès sa remise en liberté (très) surveillée de la sinistre prison de Rickers Island le 20 mai suite à une décision du juge Obus, Dominique Strauss-Kahn avait trouvé à se loger dans un "modeste" appartement (3 pièces) provisoire, mis à sa disposition par la société de sécurité Stroz Friedberg. Anne Sinclair s'était vue refuser d'autres lieux, par des propriétaires ou co-locataires récalcitrants, ne souhaitant pas prendre le risque de loger son "encombrant" mari, et sa meute de journalistes. Depuis cette date, on avait pu voir l'épouse modèle sortir à plusieurs reprises du 71 Broadway pour chercher un gîte convenable à son homme.
Mercredi 25 mai, c'était chose faite. On a pu voir (voir vidéo ci-dessus) l'ancien patron du Fonds Monétaire International (FMI) quitter en fin de soirée - entouré de policiers et de garde du corps, DSK avait le sourire aux lèvres... -, l'appartement où il résidait pour s'installer dans une superbe maison du quartier de TriBeCa, à New York. C'est là qu'il attend confortablement, très confortablement même - mais toujours sous très haute surveillance - son procès pour tentative de viol sur la femme de chambre du Sofitel, Nafissatou Diallo, 32 ans. Un logement de plus de 630 mètres carrés répartis sur quatre niveaux, à 50.000 dollars (35.000 euros) par mois. Il a le droit, sous escorte policière, de se rendre à des rendez-vous avec ses avocats, chez le médecin ou encore à des offices religieux. Pour ce faire, il doit prévenir le juge Obus six heures à l'avance. Il reste assigné à résidence et sous la surveillance d'hommes en armes 24 heures sur 24 (au moins deux personnes), avec un appareil électronique à la cheville. Il a aussi le droit de recevoir quatre personnes à la fois (après que leurs noms ont été agréés par le juge) sans compter les membres de sa famille. De nombreuses caméras de surveillance ont été installées (à ses frais) dès son arrivée. DSK vit une "Loft Story" à l'américaine quoi. Le site TV Mag a d'ailleurs eu l'idée de demander son avis à la papesse de la télé-réalité, Alexia Laroche-Joubert sur cet enfermement "judiciaire/cathodique". Elle a répondu que DSK va très bien s'en sortir car c'est un homme public, qu'il a l'habitude des caméras, et qu'il sait parfaitement gérer son image... devant les caméras sans doute ! Le Canard Enchaîné du 25 mai, dans le Journal (imaginaire) de Carla B, fait dire à la première dame "Pauvre Anne Sinclair ! Obligée de vivre avec son incontrôlable mari sous l'oeil des caméras de surveillance (...) Star du petit écran dans les années 80, la voici embarquée malgré elle dans la télé-réalité" et de conclure "Pourvu que TF1 ne lui propose pas un nouveau contrat du genre "Embedded with DSK" ! Hilarant palmipède !
Cette maison de deux étages, située au 153 Franklin Street à TriBeCa, a été récemment rénovée par le célèbre architecte Leopoldo Rosati, et était à vendre sur le marché pour presque 14 millions de dollars. Elle possède une terrasse, une salle de sport, un home cinéma et un spa avec bain à remous (voir le détail des pièces somptueusement aménagées ci-dessus). TriBeCa est un ancien quartier très en vogue d'usines et de hangars transformés dans les années 90 en immeubles de lofts, qui est devenu la Mecque des bobos new-yorkais. John Kennedy Jr et son épouse Caroline y avait établi leurs bases avant leur tragique décès et de nombreuses stars y vivent : Christy Turlington, Harvey Keitel, Jay-Z et son épouse Beyoncé entre autres. Le soir de son arrivée, le moins qu'on puisse dire c'est que DSK n'a pas été bien accueilli. Une passante lui a hurlé "porc". Il a haussé les épaules. A toutes les dépenses somptuaires auxquelles Anne Sinclair doit faire face (c'est DSK qui a déclaré que la fortune de sa femme l'avait mis à l'abri du besoin) le maire du district de Manhattan, Scott Stringer, va aussi lui aussi, présenter l'addition. "Il a calculé que sa présence dans ce quartier va coûter plusieurs millions de dollars à la ville" relate le JDD. L'élu invite le Français "à sortir son chéquier" pour rembourser le prix du maintien de l'ordre, des embouteillages et de tous les services annexes dont les escouades de policiers mis à son service.
A la suite du changement de résidence du couple DSK, et devant l'opulence et l'aménagement de l'endroit, la presse américaine et anglo-saxonne s'est déchaînée, on peut comprendre ! Déjà, après le versement d'une caution d'un million de dollars pour la libération provisoire de DSK et un dépôt de garantie de 5 millions, le choix d'une telle maison dont le loyer estimé à 35.000 dollars par mois a fait couler beaucoup d'encre aussi en France. Ce luxe affiché a beaucoup embarrassé les socialistes français... euh, un peu hypocrites non ?
"Je comprends que cela puisse choquer des millions de Français d'entendre parler de loyers pareils, de loyers aussi importants", avait déclaré jeudi 26 mai le porte-parole du PS, Benoît Hamon. Mais selon le député Jean-Christophe Cambadélis, partisan affiché de DSK, ce dernier n'est pas responsable de cet étalage de luxe ! "Ce n'est pas de sa faute", dit-il en évoquant un "choix contraint". "Ce n'est pas lui qui a décidé d'être assigné à résidence, ce n'est pas lui qui a décidé qu'il ne pouvait pas prendre d'appartement parce que les gens ne supportaient pas le nombre de journalistes qui étaient en bas de chez lui, déclare-t-il. Ca, c'est pas le problème de Strauss-Kahn, c'est le problème de la justice américaine (...), c'est ça le système américain". Cambadélis, c'est un vrai copain quand même.Dès vendredi 27 mai, au petit matin, première sortie du couple. Dominique Strauss-Kahn et sa femme Anne Sinclair sont sortis hors de leur résidence (très) surveillée et y sont revenus peu après 9H00 (13h, heure française) après avoir rendu visite à un cardiologue (voir vidéo ci-dessus). Ce nouvel environnement permet à DSK et à ses avocats de préparer au mieux sa défense, et ils s'y emploient. Dès le mercredi 25 mai, les avocats ont répété que leur client serait acquitté et ont nié avoir eu tout contact avec la victime présumée ou sa famille, le New York Post ayant assuré qu'ils leur avaient proposé de l'argent. Les hostilités ont commencé, après de nombeuses fuites, téléguidées ou non, dans la presse. Nous vous avons relaté tous les derniers rebondissements supposés dans cette triste histoire : un rapport consenti, un chantage de la femme de ménage, un chèque à sept chiffres proposé par DSK, les soi-disants déclarations de Nafissatou Diallo racontant par le détail son agression présumée, les résultats des tests ADN, TOUT et son contraire !
Les avocats de Dominique Strauss-Kahn ont attendu que leur client soit très confortablement installé, pour évoquer ces fuites propres à compromettre le droit de leur client à un procès équitable, en disant posséder pour leur part des informations pouvant mettre en cause la crédibilité de la femme de chambre qui l'accuse de tentative de viol. Dans une lettre adressée aux procureurs de Manhattan, les avocats de la défense, William Taylor et Ben Brafman, se plaignent de divulgations sur l'affaire par la police de New York, auprès des médias. La police de New York a fermement démenti. Ils disent cependant ne pas en imputer la responsabilité aux procureurs, mais ont divulgué le communiqué suivant :"Si notre intention était d'alimenter malhonnêtement la frénésie des médias, nous pourrions à présent diffuser des informations substantielles qui, à notre sens, saperaient sérieusement la qualité de cette action en justice et entameraient gravement la crédibilité de la plaignante dans cette affaire", écrivent Brafman et Taylor. "Nous vous demandons d'user des moyens que vous jugerez appropriés pour faire cesser immédiatement les fuites", ajoute leur lettre, datée du 25 mai et adressée au procureur de Manhattan, Cyrus Vance Jr.Joan Illuzzi-Orbon, procureur adjoint de Manhattan, a immédiatement répondu à Brafman et Taylor que les procureurs étaient "préoccupés" par le fait qu'ils aient choisi d'annoncer publiquement être en possession d'informations "susceptibles d'avoir un effet négatif sur l'affaire et d'entamer gravement la crédibilité de la victime". "Nous n'avons connaissance d'aucune information de cette nature", écrit-elle à son tour. L'accusation dit même réunir des éléments à charge de plus en plus "substantiels" contre l'ancien ministre français. Et avec une pointe d'humour, elle a ajouté "Si vous souhaitez que nous enquêtions sur quoi que ce soit concernant cette affaire, nous serons heureux de le faire". Depuis c'est silence radio de part et d'autre...
Mais Jeffrey Shapiro, l'avocat de la femme de chambre guinéenne - qui s'était élevé avec force contre la théorie du rapport consenti par sa cliente ! - qui poursuit l'ancien directeur général du FMI, n'a pas manqué de répondre. Il dit ne pas être surpris que les avocats de Strauss-Kahn affirment détenir des informations contre elle, et il a parlé à ce sujet de basses manoeuvres. "Une fois de plus, c'est faire de la victime le méchant", a dit Shapiro. "Ça me rend fou. Je connais cette femme. J'ai lu la peur dans ses yeux et sa volonté d'en finir avec tout cela." On ne sait où cette jeune femme de 32 ans et sa fille de 16 ans sont réfugiées, mais ce ne doit pas être dans un palace, ni une suite mise à leur disposition par le Sofitel ! Les news magazines en kiosque aujourd'hui et demain nous proposent beaucoup de photos de DSK et d'Anne Sinclair, de leur loft incroyable, la description de leurs repas, mais peu se penchent vraiment sur le cas de Nafissatou Diallo. On sait par contre qu'une équipe de choc, une batterie de détectives privés, ainsi que TD International, une société de consultants de Washington qui comprend d'anciens officiers de la CIA et d'ex-diplomates américains se sont joints à l'équipe de défense de DSK. La vie de Nafissatou Diallo est en train d'être épluchée dans les moindres détails. D'après Le Figaro, deux pointures du barreau auraient rejoint Jeffrey Shapiro, le premier avocat de la jeune femme de chambre. Il s'agirait de Kenneth Thompson et Norman Siegel. Le premier est un spécialiste du harcèlement sexuel et le second est le symbole de la lutte pour les droits civiques. A la place de Nafissatou (surnommée Ophélia sur son lieu de travail, le Sofitel), on aurait plus confiance dans les deux pointures qui ont rejoint l'équipe du procureur Cyrus Vance Jr. Joan Illuzzi-Orbon et Ann Prunty, deux femmes habituées aux affaires de viol et d'agression sexuelles, sont au côté du procureur pour l'appuyer dans ce procès très, mais alors très médiatique.
Pour résumer toute cette affaire, un nouveau mot vient de faire son apparition. Après l'Acadabrantesque de Chirac, c'est Sidération qui décrit le mieux l'état de stupéfaction dans lequel l'affaire DSK a plongé les médias. "Je n'ai jamais vu ce mot employé autant ! C'est très fort" a déclaré Bernard Pivot, et il s'y connaît le Bernard !
Les épiphénomènes de tout cela ?
- Jean-François Kahn a été obligé (contraint par lui même, devant sa glace le matin ?) de quitter le journalisme. Il l'a annoncé dans son bloc-note paru dans le numéro de Marianne - hebdomadaire qu'il a dirigé jusqu'en 2007 - du 28 mai. La polémique suscitée par son commentaire sur cette affaire "Si c'est un troussage de domestique, c'est pas bien" a eu raison de sa carte de presse, bien qu'il se soit excusé ensuite ! Trop tard, c'était une sacrée connerie, cette saillie !
- Carla Bruni-Sarkozy et Roselyne Bachelot entre autres, sont signataires de la pétition contre le sexisme lancée par l'association "paroles de femmes". Les "Il n'y a pas mort d'homme" de Jack Lang, "le troussage de domestique" de Kahn et le "c'est un tort d'aimer les femmes ?", trop c'est trop ! Ces réflexions ont été entendues dans les médias pour défendre Dominique Strauss-Kahn !
- Nicolas Sarkozy et son épouse Carla Bruni - bien enceinte et rayonnante - ont fait un parcours sans faute pendant le G8 à Deauville. Dans leur rêves les plus fous, ils n'auraient jamais pensé que DSK ne soit pas présent ! En revanche, sur l'affiche du G8, les responsables, pris de court, n'avaient pas eu le temps d'enlever la photo de DSK. Donc il était là quand même, par l'image.
-Depuis ce tsunami sidérant, le Nicolas fait profil bas, interdit à ses troupes des commentaires et semble moins "bling-bling". Il est néanmoins sorti de sa réserve vendredi à l'issue du sommet du G8, évoquant une affaire "triste" et dénonçant les "propos choquants" de certains responsables en France sur ce sujet... service minimum, monsieur le président !
- Le FMI compte coopérer avec l'enquête judiciaire sur les faits d'agression sexuelle et tentative de viol dont est accusé son ancien directeur général DSK, a déclaré une porte-parole de l'institution. Vont-ils donner à l'accusation le dossier de sa liaison adultérine avec Piroska Nagy, l'ancienne haute responsable d'origine hongroise du département Afrique du FMI ?
- Ce sont des hommes qui sont "les femmes de ménage" du nouveau domicile de DSK. D'après le New-York Post (photos à l'appui !) le staff n'est que... masculin, des hommes "chargés de testostérone" et "taillés comme des plombiers", ont passé la journée à nettoyer la maison chic de DSK et sa femme. Une sage précaution ou un ordre du service chargé de la surveillance du mari d'Anne Sinclair ?
-Christine Lagarde parcourt la planète pour se faire élire à la place de DSK, patronne du FMI.
- Kirstie Alley (célèbre actrice des années 80 Allo maman, ici bébé ou Nord et Sud) qui vient de perdre de très nombreux kilos en participant à Dancing with the stars - elle a terminé deuxième, sous les applaudissements ! - vient d'emménager (provisoirement ?) au 149 Franklin Street, et devient donc la voisine de DSK qui réside au 153. Elle a déclaré, en posant pour les photographes : "je n'irai pas lui porter des oranges. Mais jusqu'à preuve du contraire, il est innocent".
Elle a raison. DSK est présumé innocent, Nafissatou Diallo est présumée victime.
Lundi 6 juin, c'est le prochain rendez-vous de Dominique Strauss-Kahn avec la justice. C'est ce jour là que le tribunal pénal de New York officialisera l'acte d'accusation, qui comprend 7 chefs d'inculpation, formellement décidé par le grand Jury, le 19 mai. L'ex patron du FMI devra plaider coupable ou non coupable. Un calendrier sera alors fixé et le 7 juin, les avocats du présumé innocent pourront enfin examiner la totalité du dossier du procureur. C'est là que l'armée de choc de DSK se mettra réellement au travail afin de démonter, pièce par pièce, les chefs d'inculpation. Si procès il y a - il paraît évident que DSK plaidera non-coupable - il pourrait commencer en octobre 2011.
Mais d'ici là, on peut s'attendre à de nombreux rebondissements... Jean de la Fontaine dans sa célèbre fable Les animaux malades de la peste terminait par "Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir"...