Capter Fabrice Luchini n'est pas à la portée de tous, le roi des grands classiques sélectionnant avec une extrême exigence ses interlocuteurs. Sophie des Déserts s'est vu accorder les faveurs de l'acteur de 63 ans dans un café parisien en bas de chez lui, au coeur du 18e arrondissement de son enfance, et sur le tournage de son prochain film, Un homme pressé, avec l'assurance de "vendre du papier", "cocotte". Impérial en couverture du numéro d'octobre de Vanity Fair, photographié en juin dernier sur le lac du Chalet des îles, à Boulogne, Fabrice Luchini égratigne avec sensibilité cette image fascinante et insaisissable qu'il s'est bâtie au fil des années, sortant de sa zone de confort lorsqu'il abandonne sa parfaite maîtrise de la littérature pour s'intéresser à sa propre histoire.
Connu pour ses avis tranchés et ses confidences cash, il ne change pas de ton lorsque sa vie privée, qu'il a toujours pris soin de ne pas exposer, est évoquée. Vanity Fair revient ainsi sur sa longue relation rarement mentionnée, avec Cathy Debeauvais, "une passionnée de théâtre, ex-secrétaire de rédaction au magazine Challenges, dont les parents travaillaient avec Jean Vilar". De leur amour est née Emma en 1979, devenue productrice malgré la désapprobation de son père qui a tout fait pour la décourager. Si Fabrice Luchini est aujourd'hui proche de sa fille – il a joué dans sa réalisation Un début prometteur – il n'en a pas toujours été ainsi. L'acteur a parfois été si absent qu'Emma "le prenait pour un cousin". "Elle l'appelait par son prénom, le disait 'boucher' sur les fiches de renseignements scolaires", relate Vanity Fair. "Ça va mieux, mais je n'ai pas été un père terrible", admet avec honnêteté Fabrice Luchini. Le comédien s'était déjà confié sur cet échec sur le divan de Marc-Olivier Fogiel en 2015.
Une faible aptitude à créer des relations réelles
C'est avec la même honnêteté qu'il avoue n'avoir qu'un seul ami. "Je suis misanthrope. C'est périlleux de s'attacher, d'avoir des amis ; d'ailleurs je n'en ai qu'un", confie-t-il à Vanity Fair. Cet unique confident est identifié en la personne de l'écrivain Claude Arnaud. "Fabrice a longtemps été trop obnubilé par son propre destin. Il a une faible aptitude à créer des relations réelles. Quand la lumière s'éteint, quand le public disparaît, c'est dur. Derrière ce verbe étincelant, il y a des gouffres, des failles immenses", raconte d'ailleurs ce dernier.