Depuis l'exil de Gérard Depardieu en Belgique et son passeport russe généreusement donné par Vladimir Poutine, le monde du cinéma se divise en deux et s'affronte par presse interposée. En cause, les salaires des acteurs, trop ou pas assez payés.
Observateur privilégié et ô combien neutre de cette bataille des chiffres, François Berléand, acteur populaire mais loin de compter parmi les mieux payés de la profession. Sans tabous, et avec sa franchise légendaire, le comédien de 60 ans qui tourne actuellement en France avec la pièce de théâtre Quadrille s'est confié au Parisien du jour...
Il n'hésite pas à revenir ainsi sur la tribune du producteur et distributeur Vincent Maraval, qui estime que les acteurs français sont trop payés. "Il y a un vrai problème en France, reconnait l'acteur. Certains acteurs sont trop payés, mais 99% sont très peu payés." Il explique par la suite comment les agents négocient fermement les salaires de leurs poulains, sans que les producteurs puissent dire grand chose, notamment lorsqu'ils souhaitent absolument un acteur bankable. "En revanche, si l'acteur veut absolument faire le film, il peut baisser ses prétentions en passant de plus de 1 million d'euros à 500 000 euros ou 400 000 euros", précise François Berléand qui admet avoir déjà revu ses émoluments à la baisse pour certains projets.
"Pour mon dernier film, Douze ans d'âge, avec Patrick Chesnais, je prends 45 000 euros parce qu'il n'y a pas d'argent. Ce qui est une somme énorme, mais très peu dans le cinéma. Le maximum que j'ai touché pour un film, c'était 200 000 euros", explique-t-il encore. Seule exception à la règle, la télé : "Quand on fait une fiction qui fait 8 millions d'audience, pour celle d'après, on demande plus." Et ce fanatique du Paris Saint-Germain de poursuivre : "Pour le premier Transporteur, produit par Luc Besson, j'étais payé normalement. Mais vu le succès, pour la suite, j'ai touché sept à huit fois plus de la part des Américains. Et pas mal encore pour le Transporteur 3."
Autre succès populaire inattendu, Les Choristes, signé Christophe Barratier. Un premier film pour lequel François Berléand n'a touché "que" 100 000 euros, mais aucun bonus lié aux 8 millions d'entrées... Tout le contraire de la Balance, pour lequel le producteur Alexandre Mouchkine, devant le succès rencontré avait eu un petit geste : "[Il] m'a envoyé une lettre et un chèque correspondant à la moitié de mon cachet en remerciement de ma participation. C'était pareil pour tout le monde."
Mais ses cachets les plus réguliers, c'est au théâtre qu'il les gagne. Où le système est tout autre. "On est au pourcentage, explique-t-il. Si le spectacle marche, vous êtes bien payé. Si on fait un bide, vous ne gagnez pas bien votre vie. Depuis 10 ans, j'ai la chance d'avoir des succès, j'en vis bien." Ce qui ne l'empêche pas de soutenir la proposition de Vincent Maraval et son plafond de 400 000 euros plus un intéressement obligatoire : "Si on me propose 400 000 euros, je saute au plafond !"